Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a défendu lundi devant l'Assemblée la « bonne décision », « aussi difficile soit-elle », d'une surtaxe exceptionnelle de grandes entreprises pour « solder les reliquats du passé » rapidement et compenser partiellement la censure de la taxe sur les dividendes.

« Ce lundi (...) ne restera pas dans ma mémoire comme le meilleur des lundis que j'aurai eu à passer comme responsable politique, et pourtant je suis convaincu que c'est une bonne décision, conforme à l'intérêt général de la nation française », a affirmé Bruno Le Maire dans son intervention liminaire dans le cadre de l'examen du collectif budgétaire 2017. Et de retracer à grands traits l'histoire de la taxe sur les dividendes, qu'il avait ces dernières semaines qualifiée de « scandale d'Etat ».

Loin de « chasser la poussière sous le tapis », ce qui aurait « empêché de tenir bien les comptes de la nation », ou de « renvoyer aux calendes grecques » le remboursement, l'exécutif a décidé de « solder le plus vite possible » et « une bonne fois pour toutes » les « reliquats du passé », a-t-il affirmé. La surtaxe choisie est l'article quasiment unique d'un projet de loi de finances rectificative (PLFR) élaboré par l'exécutif après une décision du Conseil constitutionnel début octobre qui invalide la taxe sur les dividendes, introduite en 2012, et contraint l'Etat à rembourser 10 milliards d'euros, principalement aux grandes entreprises.

« Un effort exceptionnel »

Au lieu du taux normal de 33,3%, les bénéfices des 320 plus grands groupes français, réalisant plus de 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires, seront ainsi taxés à 38,3%, et même à 43,3% pour ceux dont l'activité dépassera 3 milliards d'euros cette année. C'est « un effort exceptionnel mais que ne porteront que ceux qui peuvent le porter », cela « ne concernera pas les PME, TPE, les entreprises les plus fragiles mais portera sur les bénéfices », a plaidé Bruno Le Maire.

Et pour « éviter que certaines entreprises basculent trop rapidement dans le taux de 38,3% », le ministre s'est déclaré favorable au « lissage » souhaité par le rapporteur général de la commission des Finances, Joël Giraud (LREM). Pour éviter « autant que possible » les effets de seuil, Joël Giraud propose d'atténuer le taux de chacune des contributions pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 1 et 1,1 milliard d'euros et entre 3 et 3,1 milliards respectivement.

« Ce que nous avons proposé ne change pas d'une virgule »

Le ministre de l'Economie (LREM, ex-LR) a aussi assuré que la surtaxe exceptionnelle ne modifie nullement la trajectoire des finances publiques, notamment la réduction du déficit sous les 3%. Et « ce que nous avons proposé pour le quinquennat ne change pas d'une virgule » en faveur des entreprises, a insisté le locataire de Bercy, évoquant entre autres la baisse de l'impôt sur les sociétés de 33,3% à 25% d'ici 2022, qui « coûtera plus de 11 milliards d'euros aux finances de la nation ».

Le président de la commission des Finances Eric Woerth (LR), intervenant peu après, a regretté la « précipitation » du gouvernement. « Face à ce que vous qualifiez de scandale d'Etat, vous scénarisez la réponse par une forme de théâtralisation fiscale », a-t-il dénoncé, pointant un « effet de communication ». Il a aussi mis en avant un « message assez catastrophique vis à vis de l'étranger », car « ce que comprennent les investisseurs étrangers c'est qu'en France, on peut augmenter la fiscalité au moindre coup de vent ».