En faisant évoluer son offre d’entrée de gamme baptisée « Welcome », Boursorama Banque devient la première des banques en ligne historiques à s’ouvrir gratuitement à tous, sans conditions de revenus ou de domiciliation. Un tournant dont Benoît Grisoni, directeur général adjoint de Boursorama et patron de la banque de détail, nous explique les raisons.

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En rendant gratuite l'offre « Welcome », Boursorama devient la première banque en ligne gratuite pour tous sans conditions. Est-ce une rupture dans l’histoire de l’enseigne ?

Benoît Grisoni : « La vraie rupture se situe, je pense, au lancement de l’offre Welcome, en septembre 2016 [NDLR : lire à ce sujet : Boursorama Banque : un compte bancaire accessible à tous mais en payant]. Avant cela, nous avions vécu 10 ans avec des conditions de revenus. Et malgré nos efforts pour abaisser les barrières à l’entrée, nous conservions l’image d’une banque élitiste. La première version de Welcome a été une étape pour changer cette image, elle a atteint son objectif mais nous avons choisi d'aller plus loin dans la simplification de l’offre. »

Pourquoi avoir attendu un an pour faire ce choix ?

B.G. : « En un an, de nombreux paramètres ont changé. Le contexte financier s’est amélioré, il y a un infléchissement à la hausse de la courbe des taux, la bourse se porte mieux et la nouvelle fiscalité de l’épargne devrait être plus favorable. Cela crée de la confiance et les perspectives de revenus s’améliorent. »

Le contexte concurrentiel a aussi beaucoup changé…

« On a l’impression qu’il y a une annonce par semaine… »

B.G. : « Oui, on a l’impression qu’il y a une annonce par semaine. Des grands commerçants, comme Carrefour, se mettent à faire de la banque avec des offres plus agressives que par le passé ; des opérateurs télécom, comme Orange ou SFR, s’y mettent ; des fintechs aussi, avec des offres parfois limitées mais qui bénéficient d’une certaine aura, comme N26. En attendant l’arrivée, l’an prochain, de la banque mobile de La Banque Postale. Bref, la concurrence est plus forte que jamais, et pour rester les mieux-disants en étant capables de toucher de nouveaux segments de clientèle, nous devions nous réinventer. »

Quelle population que vous ne touchiez pas avant avez-vous capté grâce à Welcome ?

B.G. : « Des étudiants principalement, entre 18 et 25 ans, qui voyagent pas mal. C’est en pensant à eux que nous avons amené deux nouveautés dans l’offre : la gratuité sur les paiements à l’étranger hors zone euro et un découvert autorisé de 100 euros. »

Ce choix peut étonner : les clients Welcome vont bénéficier de la gratuité sur un service facturé aux clients traditionnels ? Pourquoi ce deux poids deux mesures ?

B.G. : « Les retours que nous avons eu depuis un an nous ont montré que la clientèle Welcome est particulièrement sensible au prix, plus sans doute que celle qui vient pour une carte Premier. Nous souhaitions aussi donner à la carte Welcome un côté globe-trotter qui correspond bien à la cible. Cela ne veut pas dire que la question de l’harmonisation de cette ligne tarifaire ne se posera pas un jour. Mais rappelons que nous sommes déjà les mieux-disants pour nos autres clients, avec une commission sur les paiements et retraits hors zone euro de 1,95%, la plus basse du marché. »

Le jeune technophile voyageur est un profil que vise aussi ouvertement N26. Que pensez-vous de l’émergence de ces néobanques ?

« Un effet de mode autour des fintechs »

B.G. : « Je constate d’abord qu’on mélange des acteurs très différents, certains très intéressants, d’autre un peu moins. Je constate aussi que nombre de néobanques ont fait évoluer leur business model, ont arrêtées ou ont été rachetées. Il y a aujourd’hui un effet de mode autour des fintechs, mais il faut être capable de les trier en fonction de leur réalité économique. Compte Nickel, par exemple, est une réussite commerciale indéniable. N26, après des difficultés de lancement et plusieurs changements de tarifs, commence également à trouver sa place. D’autres acteurs, en revanche, affichent des propositions de valeurs qui me semblent marginales. »

Dans ce contexte, les banques en lignes traditionnelles se sentent-elles fragilisées ?

« Parler de banque en ligne n’a plus trop de sens aujourd’hui »

B.G. : « Parler de banque en ligne, à mon avis, n’a plus trop de sens aujourd’hui. Il y a, il est vrai, un écosystème traditionnel, avec Fortuneo, ING Direct et nous, notamment. Mais tous les acteurs du marché sont aujourd’hui des banques en ligne, en détiennent une ou aspirent à en détenir une. Ce qu’il faut regarder, c’est ce qui a une existence commerciale, et ce qui n’en a pas. »

Boursorama Banque a perdu 24 millions d’euros en 2016. Comment expliquer ce chiffre, et est-il tenable ?

B.G. : « Il faut rappeler que lorsque Boursorama était cotée, elle a publié des comptes bénéficiaires de 2003 à 2014. Nous connaissons aujourd'hui, et nous le revendiquons, une très forte croissance portée par d’importants investissements dans la technologie, dans le marketing, dans le personnel... Des investissements qui, évidemment, ne peuvent s’amortir instantanément, mais que notre actionnaire [NDLR : la Société Générale] continue de considérer comme utiles. »

Le choix d’Orange Bank de proposer une carte bancaire gratuite sans conditions de revenus a-t-il eu une influence sur le choix de faire évoluer Welcome ?

B.G. : « Oui, c’est un paramètre parmi d’autres. »

Avez-vous été surpris par ce choix ?

B.G. : « Pas tellement. On sait que l'activité bancaire, pour Orange, a d'abord vocation à apporter de la croissance à une base de clients saturée côté télécoms. Dans ce cadre, l’opérateur n’avait d’autre choix que de s’aligner sur les fondamentaux du marché, notamment la gratuité de la carte bancaire. Les objectifs financiers sont sans doute secondaires, la priorité est de conquérir et fidéliser de nouveaux clients. »

Votre concurrent historique, ING Direct, a annoncé le lancement d’une nouvelle carte bancaire, avec report des opérations en temps réel et pilotage depuis le mobile. Est-ce que ça va inspirer Boursorama ?

B.G. : « Nous n’avons pas attendu pour proposer des services autour de la carte. Le paiement sans contact est disponible depuis près de 5 ans, comme l’augmentation ou la baisse des plafonds en temps réel ou les retraits exceptionnels sans frais, etc. Sans doute ne le faisons-nous pas assez savoir. »

Et le paiement mobile ?

« Le paiement mobile, la grande fonctionnalité à venir »

B.G. : « C’est la grande fonctionnalité à venir, un mode de paiement auquel nous croyons et qui va beaucoup se développer dans les 2 ans qui viennent. Nous ne sommes pas parmi les premiers à le proposer mais nous y travaillons, et il y a aura des avancées pour nos clients dans l’année à venir. »

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