De plus en plus centrées sur leurs sites web et leurs applications mobiles, les banques en ligne disposent pourtant toujours de conseillers joignables par téléphone, par mail ou via les réseaux sociaux. Quels efforts font-elles pour maintenir, voire développer, ces canaux humains ? Enquête.

Avant de devenir des « banques en ligne », ING Direct, Boursorama Banque et consorts ont été des « banques directes », dont l’essentiel de la relation avec les clients se faisait au téléphone, par l’intermédiaire de conseillers.

Toutefois, depuis l’explosion de l’internet grand public, sur PC d’abord puis sur mobile, les enseignes du marché ont eu tendance à se recentrer sur leurs sites web et sur leurs applications, devenus les deux premiers canaux de communication avec leurs clients. Ce faisant, elles ont encouragé ces derniers à devenir de plus en plus autonomes dans la gestion de leurs finances personnelles. Dans ce contexte, que représentent aujourd’hui les services clients des banques en ligne ? Y a-t-il une vie hors du site web des banques en ligne ? Nous avons interrogé les principales intéressées.

Un conseiller pour 3 800 clients en moyenne

Sur les 6 banques contactées (1), 4 seulement nous ont répondu : preuve que la question est sensible. Parmi elles, Fortuneo n’a pas souhaité nous communiquer le nombre de ses conseillers. « Nos effectifs sont confidentiels », nous a expliqué la communication de la banque. BforBank, qui cette fois n’a pas répondu à nos sollicitations, nous avait de son côté donné un chiffre à l’occasion d’un précédent article.

Nombre de clients fin 2016Nombre de conseillersRatio clients par conseillerPlateformes
ING Direct1 million210 environ4 761Un site à Paris, un site externe en France
Boursorama Banque977 000200 environ4 885Un site à Boulogne-Billancourt
Fortuneo600 000 ¹NC/Un site en France
Monabanq290 000 ²100 environ2 900Un site à Villeneuve d'Ascq, près de Lille
BforBank165 000632 619NC
Hello Bank284 000NC/Deux sites à Paris et Lille
¹ Chiffres France, Belgique et Luxembourg - ² En octobre 2015, pas de chiffre plus récent - NC : non communiqué

Bilan : en moyenne, les différentes enseignes comptent environ un(e) conseill(è)r(e) pour 3 800 clients. Une moyenne qui masque des disparités. D’un côté, les deux leaders du marché, Boursorama Banque et ING Direct, qui comptent plus d’un million de clients et autour de 200 conseillers, affichent un ratio clients par conseiller autour de 4 800 ; de l’autre, des enseignes plus modestes, comme Monabanq et BforBank, se situent plutôt autour de 2 800.

Evidemment, ce constat purement quantitatif ne présume pas de la qualité du conseil fourni. Mais il peut au moins laisser espérer une plus grande facilité d’accès au conseil, avec plus réactivité, voire de proactivité, et moins d’attente.

Des canaux variés, des temps de réponse variables

Justement, quels sont les délais d’attente selon les canaux utilisés pour contacter sa banque ? De 20 secondes chez Monabanq à 2 minutes maximum pour Fortuneo : les enseignes affichent des temps de réponse au téléphone que certains clients trouveront peut-être un peu courts par rapport à la réalité. Concernant les mails, Fortuneo affirme répondre « dans la journée », Boursorama Banque en moins de 12 heures et Monabanq en moins de 24 heures. Des résultats finalement assez proches.

Les seuls canaux où l’on retrouve des différences importantes, ce sont les réseaux sociaux, souvent utilisés comme support de SAV, pour signaler un problème ou une erreur. Deux enseignes semblent ainsi avoir particulièrement mis l’accent sur ces canaux : Monabanq, qui affirme répondre en 15 minutes, et Hello Bank, 30 minutes maximum. Fortuneo (4 heures) et surtout Boursorama (12 heures) sont moins réactifs.

Des plateformes situées en France

Il n’est pas rare, lorsqu’on appelle une hotline, de tomber sur un interlocuteur avec un fort accent, signe souvent que le service client a été sous-traité à un prestataire situé hors des frontières nationales, sans doute pour des questions de coût.

Qu’en est-il du côté des banques en ligne ? Aucune n’a recours à ce type d’arrangement. Hormis ING Direct, qui indique avoir externalisé « en France » une partie de son service clients, les autres enseignes revendiquent des plateformes internes et situées en France, en général au sein de leur siège : à Boulogne-Billancourt pour Boursorama et à Villeneuve d’Ascq pour Monabanq, notamment.

Des agences virtuelles, des conseillers spécialisés

Comment s’organisent les équipes de conseillers au sein de ces plateformes téléphoniques ? Sans surprise, presque toutes les enseignes affirment disposer de conseillers experts pour les produits plus complexes : l’assurance-vie, la bourse et, pour celles qui le proposent, le crédit immobilier. Pour faciliter la communication, Boursorama réserve même aux emprunteurs immobiliers la possibilité de contacter un conseiller par tchat.

Les banques en ligne, Fortuneo et Boursorama notamment, affirment aussi adapter le conseil au profil du client (jeune/senior, modeste/aisé). Un sujet sur lequel Monabanq fait valoir sa différence, en revendiquant un « suivi hyper-personnalisé grâce à [des] conseillers coachs », explique la communication de l’enseigne, mais qui ne fait pas de « distinction pour la qualité de service : chez nous, un étudiant peut avoir le même conseiller qu’un cadre dirigeant, par exemple ».

Monabanq et Boursorama ont aussi la particularité de fonctionner en « agences virtuelles », dans lesquelles chaque client est affecté. Enfin, conformément à leurs obligations, toutes les enseignes disposent de conseillers spécialisés dans le suivi des personnes financièrement fragiles.

L’intelligence artificielle, en projet pour certaines

C’est une nouvelle tendance du service aux clients bancaires : le recours à des « intelligences artificielles », des programmes informatiques capables de répondre automatiquement à certaines requêtes transmises par écrit (mail ou tchat). On sait qu’Orange Bank et le Crédit Mutuel, notamment, travaillent sur le sujet. Qu’en est-il des banques en ligne ?

C’est prévu « prochainement » chez Boursorama Banque et Monabanq. Cette dernière précise qu’elle l’utilisera « sur des demandes très spécifiques où le conseiller n’a pas de valeur ajoutée, à savoir sur des sujets très opérationnels comme des infos sur l’ouverture de compte par exemple ». Silence radio, en revanche, du côté des autres enseignes.

Un recours au conseiller de plus en plus souvent facturé

Le recours au conseiller, par téléphone ou par mail, pour initier certaines opérations pouvant être effectuées en autonomie sur le site web (virement, commande de chéquier, activation du sans contact, demande de RIB, etc.) est de plus en plus souvent facturé. C’est le cas d’assez longue date pour Boursorama Banque et Fortuneo, qui le facturent 5 euros pièce, et de Hello bank (3,70 euros pour un virement, par exemple).

Plus récemment, BforBank a rejoint le mouvement, et fait payer ce service 3 euros. Explication de la cheffe de produit en charge de la tarification, Rebecca Smadja : « Il s’agit [d’encourager les clients] à utiliser leur espace client en ligne pour ces opérations du quotidien, de manière à libérer du temps pour le véritable conseil bancaire ».

Monabanq et ING Direct, de leur côté, ne pénalisent pas encore le recours au conseiller. Les deux banques sont en effet sur des modèles sensiblement différents : pas de gratuité chez Monabanq (2 euros par mois minimum) et une gratuité sous conditions de dépôts chez ING Direct (à défaut 5 euros par mois).

(1) Questionnaire identique envoyé à BforBank, Boursorama Banque, Fortuneo, Hello Bank, Monabanq et ING Direct.