Exonération de la taxe d’habitation pour 80% des Français, transformation de l’ISF en impôt sur la fortune immobilière, « flat tax » sur les revenus du capital, etc. Quelles mesures le nouveau président de la République a-t-il promises ou esquissées concernant le secteur bancaire, le patrimoine et la fiscalité ?

Banque et Fintech

« Nous avons besoin de vous ». Invité d’honneur de l’événement Fintech Revolution en mai 2016, Emmanuel Macron, alors ministre de l’Economie, avait déclaré sa flamme à l’écosystème des start-ups financières françaises, réunies pour l’occasion. Un an plus tard, le nouveau chef de l’Etat conserve-t-il le même état d’esprit ? On peut le supposer. Certes, le programme officiel de l’ex-candidat Macron ne compte aucune occurrence du mot « fintech » - et une seule du mot « banque », à propos des « banques de données ». Tout juste évoque-t-il la création d’un « marché unique du numérique en Europe » et d’un « fonds de capital-risque [qui] permettra de financer le développement des start-ups européennes ». Mais il est vrai que le sujet n’est pas de ceux qui permettent de gagner massivement des électeurs.

Le secteur, toutefois, ne s’y trompe pas : ancien banquier, ancien ministre de l’Economie, candidat au tropisme numérique affirmé, Emmanuel Macron et son profil pro business a tout pour plaire à la fintech française. Le nouveau président de la République fait d’ailleurs partie des trois candidats (avec Benoît Hamon et François Fillon) à avoir consulté les représentants de l’écosystème en amont de l’élection.

Au cours de ses deux années passées à Bercy, d’août 2014 à août 2016, Emmanuel Macron avait déjà affiché sa volonté de lever les freins au développement d’une économie de l’innovation dans le secteur financier : en desserrant le cadre réglementaire du crowdlending (création des minibons, relèvement des plafonds d’investissement…) ; en facilitant le dialogue entre les autorités de régulation et les fintechs ; en contribuant aussi indirectement à promouvoir l’émergence ou le développement de nouveaux acteurs de la banque de détail grâce à la mise en œuvre d’une procédure simplifiée de changement de banque.

Depuis l’Elysée, il devrait demander à son gouvernement de poursuivre l’effort, avec un objectif : promouvoir des champions français de la Fintech. Deux échéances l’y poussent : la transposition de la directive révisée sur les services de paiement (DSP2), l’an prochain ; le Brexit, ensuite, qui risque de remettre en cause la domination de Londres sur le secteur financier européen. Au profit de Paris ? Oui, mais aussi potentiellement des concurrents Francfort, Dublin ou Luxembourg.

Epargne et placements financiers

Le volet patrimoine du programme est mieux connu. Dès février, Emmanuel Macron a annoncé vouloir créer un « prélèvement unique » sur les revenus du capital. Une proposition qui a suscité bien des débats dans le monde de la gestion patrimoniale, et qui a contraint l’équipe d’En Marche – mouvement désormais rebaptisé la République en Marche – à apporter des précisions. Ce mouvement politique a confirmé une « référence » pour « la taxation de l’épargne », à un taux de 30%, lequel inclut impôt sur le revenu et prélèvements sociaux. Cette « flat tax » resterait optionnelle : dans une réponse apportée à la Faider, l'équipe du nouveau président explique maintenir la possibilité d’opter pour le barème classique de l’impôt sur le revenu, option « en pratique favorable pour les épargnants non imposables ou très faiblement imposables ». Par ailleurs, cette flat tax ne modifierait en rien le cadre existant des Livret A, LEP, LDDS ou autre PEA.

Quid de l’assurance-vie ? Dans cette même réponse envoyée à la Faider, en avril, le mouvement d'Emmanuel Macron a clarifié les contours de l’exception assurance-vie : « Au delà d’un montant d’encours de 150.000 euros par personne, soit le même montant que le PEA, les nouveaux versements effectués après la mise en place de ce prélèvement de 30% y seront soumis. »

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Autrement dit, les revenus tirés des sommes présentes à ce jour sur un contrat et les contribuables possédant moins de 150.000 euros en assurance-vie continueront à profiter de la fiscalité actuelle.

Impôt sur le revenu, taxe d'habitation et ISF

Sur la fiscalité dans son ensemble, le nouveau chef de l’Etat a esquissé de nombreuses pistes de réforme, qui doivent encore être précisées. Le cadre devrait toutefois rapidement être connu : « Nous mettrons fin à l’instabilité fiscale », promet-il dans son programme. « Une loi d’orientation votée en 2017 fixera pour 5 ans l’évolution de la fiscalité sur le quinquennat. »

Première proposition : permettre aux couples qui le souhaitent de « faire le choix d’une imposition individualisée », une option potentiellement intéressante lorsqu’un membre du couple dispose de revenus bien inférieurs à ceux de son conjoint ou de sa conjointe. Concernant l’impôt sur le revenu, Emmanuel Macron laisse aussi planer un doute sur la mise en œuvre du prélèvement à la source, prévue pour le 1er janvier 2018. Après avoir évoqué une expérimentation d’un an, fin mars, Emmanuel Macron a confirmé l’hypothèse d’un report du prélèvement à la source à l’approche du second tour. A priori, il s'agit d'une adaptation du calendrier plus que d'une remise en cause de la réforme. Attention toutefois : le budget 2017 a intégré ce nouveau mode de perception de l’impôt sur le revenu dans la loi. Un report devra donc passer par un vote du Parlement.

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Autre chantier annoncé par l’ancien ministre de l’Economie : transformer « l’ISF en ''impôt sur la fortune immobilière'' » (IFI), pour reprendre son programme. Cette réforme se traduirait par une sortie de « milliers de foyers » de l’assujettissement à l’ISF, sans augmenter l’impôt pesant sur les autres contribuables à en croire le programme détaillé par En Marche : « La réforme allègera en moyenne de moitié la charge fiscale des contribuables assujettis à l’ISF. Les 50% les moins fortunés ont un patrimoine qui n’est constitué d’immobilier qu’à 55% environ. » Le programme de l'ancien ministre prévoit en outre une hausse de la CSG (contribution sociale généralisée) de 1,7 point, sauf pour les retraites modestes et les indemnités chômage.

Côté fiscalité, la mesure emblématique d’Emmanuel Macron reste toutefois l’exonération de la taxe d’habitation pour les classes moyennes et populaires : « Dès 2020, 4 Français sur 5 ne paieront plus la taxe d’habitation, et l’Etat remboursera entièrement auprès des communes leur manque à gagner, à l’euro près, en préservant leur autonomie fiscale », lit-on dans le programme du candidat élu. Plus concrètement, seront exonérés les ménages dont les revenus annuels ne dépassent pas 20.000 euros par part. En Marche affirme que cette mesure fiscale, mise en œuvre progressivement de 2018 à 2020 et qui coûterait 10 milliards d’euros à l’Etat, a été intégrée au « cadrage budgétaire » du candidat, désormais élu président de la République.

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