Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a prévenu jeudi que la double circulation en France de l'euro et du franc comme le propose Marine Le Pen serait « un danger » et pénaliserait « les plus modestes ».

« On entend notamment avancer certaines hypothèses de double monnaies avec le retour à une monnaie nationale en parallèle d'une monnaie européenne », a affirmé François Villeroy de Galhau, lors d'une conférence à la Banque de France, dans une allusion à peine voilée à la proposition de Marine Le Pen et du Front national. « Je me dois de dire que de telles hypothèses mettraient en danger la confiance dans la monnaie », a affirmé le gouverneur, dans une rare intervention dans le débat politique français, à trois jours seulement du second tour de la présidentielle.

François Villeroy de Galhau, qui a d'abord rappelé l'indépendance de la Banque de France, s'est employé à démontrer que cette double circulation de monnaies se ferait au détriment de la devise nationale. « Cette double circulation n'existe dans aucun pays avancé », a-t-il assuré. « Ailleurs, là où il y a, ou bien là où il y a eu deux monnaies qui circulent et avec lesquelles on peut payer, l'une inspire moins confiance que l'autre », a-t-il expliqué.

« En général, c'est la monnaie nationale qui en souffre »

Avant de lancer un avertissement : « En général, c'est la monnaie nationale qui en souffre, la seule qui soit accessible aux ménages et notamment aux plus modestes ainsi qu'aux PME », a affirmé le gouverneur, soulignant le risque que la monnaie nationale perde vite de la valeur « avec des prix qui augmentent beaucoup trop et un impact négatif sur le pouvoir d'achat ».

Marine Le Pen veut réinstaurer une monnaie nationale comme monnaie du quotidien des Français et négocier parallèlement la transformation de l'euro en « monnaie commune » pour les échanges internationaux.

ECU : « il ne s'agissait pas d'une vraie monnaie »

« Si on envisageait le retour à l'ECU, il faut rappeler que celui-ci n'existe plus depuis 18 ans et qu'il ne s'agissait pas d'une vraie monnaie », a par ailleurs précisé le gouverneur de la Banque de France. « L’ECU était une unité de compte, avec laquelle ni les particuliers ni les entreprises ne pouvaient payer. À supposer que ce soit possible, revenir à l’ECU présenterait de graves inconvénients par rapport à l'euro d'aujourd'hui : jusqu’à l’introduction de l’euro, la France de fait ne participait pas à la décision sur le niveau des taux d’intérêt, et devait suivre la politique monétaire allemande ; le franc était à la merci d'attaques spéculatives des marchés financiers, épuisant nos réserves de change comme nous l'avons connu en 1992-1993. C’est pour régler ces problèmes que nous avons fait l’euro. »