La politique française va donner le la aux marchés européens la semaine prochaine, éclipsant les autres événements alors que les investisseurs s'apprêtent à être sur le pont dès l'aube lundi pour jouer leur partition.

Après des semaines d'incertitudes, les marchés verront une partie des doutes se lever à l'issue du premier tour de l'élection présidentielle française, dont l'imminence les a poussés à un certaine fébrilité la semaine écoulée. « C'est la grande échéance », résume auprès de l'AFP Marco Bruzzo, directeur général délégué de Mirabaud AM France. « Le taux d'indécision est au plus haut depuis plusieurs décennies pour une présidentielle, puisque quatre candidats ont entre 18 et 23% des voix dans les sondages. Difficile de prédire l'issue du scrutin », ajoute-t-il.

Les investisseurs craignent avant tout un second tour opposant Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen, deux candidats eurosceptiques dont l'élection pourrait remettre en question la cohésion de la zone euro. Dans ces conditions, nombre de gérants de portefeuilles se préparaient à une semaine potentiellement agitée sur les marchés.

« Le risque politique a déjà été pris en compte »

« Du côté des gérants d'actifs, nous avons diversifié les portefeuilles depuis un mois, le risque politique a déjà été pris en compte. Tous les scénarios sont possibles : nous attendons donc lundi pour savoir comment nous repositionner », explique à l'AFP Florence Barjou, responsable de la gestion multi-actifs chez Lyxor.

« S'il n'y a pas de candidat extrême, le marché pourrait poursuivre sa hausse, notamment le secteur bancaire et les valeurs cycliques. Dans le cas contraire, il pourrait y avoir une correction à court terme, les valeurs défensives internationales résistant mieux que les domestiques », anticipe de son côté Marco Bruzzo. Cette échéance devrait occulter en grande partie les autres rendez-vous de la semaine, notamment la réunion de politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE), prévue jeudi.

La BCE va certainement « jouer la sécurité »

« Entre les deux tours de la présidentielle, on ne voit pas la BCE délivrer un message qui pourrait surprendre les marchés », estime ainsi Florence Barjou. L'institution de Francfort va certainement « jouer la sécurité » après le premier tour, note aussi Reinhard Cluse, de la banque UBS, et ce d'autant plus que la remontée de l'inflation en zone euro a connu un coup d'arrêt en mars, confortant la stratégie actuelle de la BCE.

S'ils passeront également au second plan, les résultats d'entreprises continueront néanmoins de donner du grain à moudre aux investisseurs. A la Bourse de Francfort, des mastodontes comme BASF, Bayer ou Deutsche Bank seront ainsi sur le gril, tandis qu'à Londres, AstraZeneca, Barclays et RBS sont aussi à l'agenda. A Paris, Kering, Hermès ou encore Total animeront la cote, après des poids lourds comme Pernod Ricard ou Schneider la semaine écoulée. Or, de bonnes publications des deux côtés de l'Atlantique « expliquent que le marché ait bien tenu » ces derniers jours, relève Florence Barjou.

La Bourse de Londres souffre du Brexit

« Après les bons chiffres macroéconomiques de janvier et février en zone euro, nous avons eu des résultats qui dans leur majorité sont supérieurs aux attentes, avec des perspectives prudemment optimistes des chefs d'entreprises », souligne également Marco Bruzzo. Tout en enregistrant de fortes variations, le CAC 40 s'est maintenu avec une progression d'environ 4% depuis le début de l'année.

Une bonne tenue qui n'a toutefois pas été observée à Londres, laquelle a souffert d'une remontée de la livre sterling après l'annonce d'élections législatives anticipées par la dirigeante britannique Theresa May. Or la hausse de la livre, réduisant les revenus tirés de l'étranger par les nombreuses multinationales cotées à l'indice vedette de la Bourse de Londres, a pesé in fine sur le FTSE-100. La politique fâche décidément les investisseurs !