Hausse des tarifs, ouverture aux entreprises et à la banque privée : la Banque Postale, qui fête son 10e anniversaire, évolue. Au risque d'abandonner son statut de « banque pour tous » ?

Des clients en difficulté financière mis en attente, pour traiter prioritairement le cas de clients plus aisés : c'est ce qui se passe dans certains centres financiers de la Banque Postale, selon un témoignage syndical rapporté par Les Echos. Un état de fait contesté dans le même article par la direction marketing de l'enseigne, mais qui entre en résonance avec le constat posé par de nombreux observateurs et clients : la Banque Postale a changé.

Dans l'imaginaire collectif, la Banque Postale, c'est en effet la banque de tous. Un statut à part, lié au fait qu'elle est financée sur des fonds publics et dépositaire d'une mission d'accessibilité bancaire, qui l'oblige à ouvrir un Livret A aux caractéristiques particulières à toute personne en faisant la demande. Signe que le devenir de cette mission pose question, elle a récemment fait l'objet d'une consultation publique organisée par le Comité consultatif du secteur financer (CCSF), l'organe qui encadre les relations entre les banques et les consommateurs. La réponse a été unanime : oui, cette mission reste pertinente et nécessaire, et ne pourrait être assumé par une autre enseigne. La Banque Postale a notamment l'avantage d'être présente dans près de 10.000 points de vente de la Poste.

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Une mission de service public qui coûte cher

Cette mission, toutefois, a un coût : elle mobilise en effet les guichets et les guichetiers de la Poste pour des opérations effectuées sur des « petits » Livrets A, utilisés comme des comptes courants par leurs titulaires. Selon le CCSF, plus de la moitié des opérations effectuées en 2014 sur des livrets d'épargne de la Banque Postale concernaient des dépôts et retraits d'espèces sur des Livrets A, dont 1 sur 2 affichaient un encours inférieur à 150 euros.

Evidemment, l'Etat compense en partie les coûts induits par cette mission. La Banque Postale a ainsi touché 225 millions d'euros cette année à ce titre. Mais est-ce suffisant ? Car dans le même temps, la Poste, confrontée à une baisse de revenus sur son activité historique, la distribution de courrier, mise beaucoup sur la banque pour se maintenir à flots.

Alignement des tarifs

Depuis 2014, elle a engagé une large opération de formation de ses guichetiers, afin de leur permettre de soulager les conseillers financiers pour la vente de produits bancaires courants. Ces conseillers, eux, sont encouragés à se consacrer à des marchés plus rentables : assurance-vie, crédit immobilier, etc. Autre évolution, constatée par Les Echos : la Banque Postale, qui a racheté en 2013 la Banque Privée Européenne (la BPE) au Crédit Mutuel Arkéa, commence à installer dans les agences postales des espaces dédiés à la banque privée.

Ultime signe que la Banque Postale s'aligne sur les pratiques des autres banques commerciales : la tarification. De ce point de vue, l'enseigne a longtemps marqué sa différence, et reste plutôt bien placée (11e du comparatif cBanque des tarifs bancaires sur le profil classique). Mais elle rentre progressivement dans le rang en facturant, comme les autres, les retraits effectués dans les distributeurs (DAB) de la concurrence, ou des frais de tenue de compte.

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