L’opposition sur chèque n’est pas libre. La réglementation prévoit quatre cas légaux dans lesquels elle est légitime, et pas un de plus. Et si vous sortez de ce cadre, vous vous exposez à des sanctions. Décryptage.

Faire opposition au paiement d’un chèque bancaire, c’est donner l’ordre à votre banque de ne pas payer un ou plusieurs chèques qui pourraient être présentés sur son compte. Mais attention, ce recours n’est pas d’usage libre. Le code monétaire et financier, dans son article L 131-35, liste précisément les événements justifiant le recours à l’opposition sur chèque. Et des sanctions sont prévues quand le titulaire du compte présente une opposition hors les cas légalement autorisés.

Quatre motifs d’opposition, pas un de plus

L’opposition ne peut avoir lieu que s’il y a perte ou vol, utilisation frauduleuse ou encore si le bénéficiaire du chèque fait l’objet d’une mesure de redressement ou liquidation judiciaire. En cas de perte ou vol, d’ailleurs, l’opposition au paiement n’est pas seulement une faculté, elle constitue une obligation dont l’omission engage la responsabilité civile du titulaire du compte.

Il y a perte lorsque vous avez, par exemple, envoyé par le service postal un chèque, que le bénéficiaire n’a pas reçu. Ou encore lorsque vous avez rangé un chèque ou un chéquier et que vous êtes dans l’incapacité de vous souvenir du lieu où ils sont rangés. Parfois aussi lors d’un déménagement, un carton d’effets se perd alors qu’il contient votre chéquier.

Le vol est la soustraction frauduleuse d’un chèque ou de formules de chèque. Selon l’article 311-12 du code pénal, le vol commis au préjudice de ses parents, de ses enfants ou du conjoint n’existe pas, sauf s’il porte sur les moyens de paiement tels que chèques, chéquier ou cartes bancaires. Vous pouvez, et devez même, faire opposition pour vol si un membre de votre famille s’empare du chéquier ou d’un chèque vous appartenant.

L’utilisation frauduleuse désigne la situation de falsification ou de contrefaçon de chèque. C’est le cas, par exemple, quand quelqu’un imite votre signature, modifie pour l’augmenter la somme que vous y aviez inscrite ou encore utilise vos cordonnées pour fabriquer un faux chèque.

Le quatrième cas d’opposition autorisée concerne la situation où le bénéficiaire de votre chèque est l’objet d’une mesure de règlement ou liquidation judiciaire.

Des exemples d’oppositions abusives

Un consommateur est-il dans son bon droit en faisant opposition au paiement d’un chèque lorsqu’une commande n’est pas conforme à ce qu’il a demandé, ou quand des travaux ou des réparations ont été mal exécutés ? Non. Un litige civil ou commercial, pas plus qu’un abus de faiblesse commis au détriment d’une personne fragilisée, ne constituent des motifs légaux d’opposition sur chèque.

De même, il ne vous est pas non plus possible de faire opposition si un commerçant présente immédiatement le chèque à l’encaissement alors qu’il vous a promis d’attendre un certain délai.

Attention ! En dehors des quatre cas légaux, l’opposition est considérée comme abusive et expose à une peine de cinq ans d’emprisonnement et 375 000 € d’amende.

Comment faire opposition ?

Si vous vous situez dans un des 4 cas légaux, et tout particulièrement si votre chéquier a été perdu ou volé, vous devez prévenir le plus rapidement possible votre banque par téléphone, et lui confirmer au plus tard dans les 48 heures votre opposition par lettre recommandée avec avis de réception, afin qu’elle soit transmise à la Banque de France pour inscription au fichier national des chèques irréguliers (FNCI). Vous pouvez aussi déposer la lettre au guichet de votre agence contre reçu.

Lorsque le chèque que vous avez rédigé et remis à un bénéficiaire a été perdu ou volé, ce dernier devra rédiger une attestation de désistement que vous donnerez à votre banque en même temps que l’opposition écrite.

L’autre solution, plus fiable car elle évite les oublis et les discussions sur l’heure précise de l’opposition, consiste à téléphoner au centre national d’appel chèques perdus ou volés (CNACPV), mis en place par la Banque de France et qui fonctionne quels que soient votre banque et votre lieu de résidence. Ce service gratuit, disponible 7 jours sur sept, 24 heures sur 24 au numéro unique 08.92.68.32.08, vous délivre un numéro d’enregistrement à conserver précieusement, et enregistre votre opposition avec date et heure précise, pour une durée limitée à 48 heures. Au-delà, elle s’efface, sauf si vous avez confirmé votre opposition par écrit auprès de votre agence bancaire, qui demandera alors que l’inscription au FNCI soit maintenue.

Combien de temps dure l’opposition ?

Dans certains établissements bancaires, l’opposition est enregistrée pour une durée maximale de six mois renouvelables ; dans d’autres, elle dure un an. Vérifiez ce qu’il en est exactement de la durée appliquée par votre banque : cette information figure sur son guide tarifaire.

Faut-il nécessairement déposer une plainte auprès des autorités de police ?

A notre connaissance, il n’existe pas de texte légal qui le prévoit, mais soyez pragmatique. Si votre agence bancaire exige que vous déposiez plainte, faites-le. Lorsque le chèque que vous avez rédigé et remis à un bénéficiaire a été perdu ou volé, ce dernier devra rédiger une attestation de désistement que vous donnerez à votre banque en même temps que l’opposition écrite.

Si vous avez souscrit une assurance des moyens de paiement, n’oubliez pas d’informer immédiatement l’organisme d’assurance, qui pourra peut-être prendre en charge les frais d’opposition et les montants éventuellement débités de votre compte à la suite de la perte ou le vol du chèque ou chéquier.