Les efforts budgétaires pour assainir les finances publiques au début du quinquennat de François Hollande ont freiné la croissance, estime l'OFCE. Mais l'inflexion de la politique économique du gouvernement à partir de 2014 commence à porter ses fruits, même si le chômage reste élevé.

Dans une étude sur le bilan du quinquennat publiée lundi, l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) affirme que « la consolidation budgétaire en France et en Europe a eu un impact négatif important [sur la croissance], de 0,8 point par an en moyenne entre 2012 et 2017 ». « La simultanéité des politiques d'austérité en Europe a amplifié leur impact récessif en déprimant la demande intérieure, mais aussi la demande extérieure », expliquent les auteurs de l'étude, qui décrypte la politique économique menée par le gouvernement entre 2012 et 2016.

« Le rythme de réduction du déficit a été trop rapide »

Entre 2012 et 2013, la fiscalité imposée aux ménages et aux entreprises s'est ainsi alourdie de 52 milliards d'euros, dont 15,5 milliards avaient été décidés par la majorité précédente. Un ajustement budgétaire « conséquent », qui explique en partie les résultats « décevants » du début de quinquennat. L'impact de ce choc fiscal, destiné à redresser les comptes publics qui étaient fortement déficitaires, a été « sous-estimé par le gouvernement » et « n'était pas compatible avec une baisse du chômage au cours de la première moitié du mandat », estiment ainsi les auteurs de l'étude.

Selon l'institut de recherche, « la simultanéité des politiques d'austérité en Europe a amplifié leur impact récessif en déprimant la demande intérieure, mais aussi la demande extérieure ». « Le rythme de réduction du déficit a été trop rapide », estime ainsi le président de l'institut, Xavier Ragot, qui évoque une « erreur originelle partagée au niveau européen ». Au moment où les hausses d'impôts ont été décidée, « la reprise était encore fragile : du coup, on a calé dans la côte », ajoute-t-il.

Un pouvoir d'achat dégradé

Selon l'OFCE, l'inflexion vers une politique de l'offre en 2014, incarnée par le Pacte de responsabilité et le Crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) - un vaste dispositif d'allègement de charges pour les entreprises - « porte ses fruits en fin de mandat avec le rétablissement des marges des entreprises », observe l'étude. « Au cours de la dernière partie du quinquennat », « la croissance française devrait emboîter le pas de celle de la zone euro », soulignent les auteurs de l'étude, qui rappellent que le taux de marge des entreprises a atteint son plus haut niveau depuis 2000.

Sur l'ensemble du quinquennat, les entreprises ont bénéficié de 20,6 milliards d'euros d'allégements fiscaux, tandis que les ménages, malgré les récentes baisses d'impôts, ont vu leurs impôts augmenter de 35 milliards. Le pouvoir d'achat des ménages, en 2016, reste inférieur de 350 euros à son niveau de 2010. « Les politiques de compétitivité et de soutien aux entreprises ont des effets faibles à court terme et important à long terme, tandis que les politiques de hausse d'impôt ont des effets importants à court terme, pour décroître progressivement », souligne l'OFCE, qui explique ainsi que l'amélioration n'intervienne « qu'en fin de mandat ».

6 millions de Français « fragilisés vis-à-vis de l'emploi »

Sur le front de l'emploi, le rétablissement est ainsi qualifié de « lent » par l'institut de recherche, qui pronostique que le chômage au sens du BIT aura augmenté « d'environ 100.000 personnes malgré 720.000 créations d'emplois » sur l'ensemble du quinquennat Hollande. Dans le détail, le Pacte de responsabilité et le CICE auront permis de « créer ou sauvegarder de l'ordre de 230.000 emplois à l'horizon 2017 ». Les autres mesures - prime à l'embauche pour les PME, contrats de génération, plan de formation de 500.000 chômeurs - devraient avoir un effet limité, estiment par ailleurs les auteurs du bilan.

En outre, si l'on prend en compte le « halo du chômage » (personnes qui veulent un emploi, sans être comptées comme chômeurs au sens du BIT) et le sous-emploi, « ce sont près de 6 millions de personnes qui se trouvent fragilisées vis-à-vis de l'emploi, soit 8% de plus que 4 ans auparavant », indiquent-ils.