Formulé de longue date par certains distributeurs web des contrats d’ACMN Vie, le souhait d’un transfert du portefeuille vers un autre assureur a été exaucé. Depuis le 1er janvier, les ex-clients web d’ACMN Vie sont devenus des clients de Suravenir. Que vont devenir ces contrats transférés ? Quid des rémunérations 2015 et 2016 ? Les réponses de Bernard Le Bras, président du directoire de Suravenir, et ex-dirigeant d’ACMN Vie à l'époque où cet assureur était moteur sur le marché internet.

Maintenant que le transfert est effectif, pouvez-vous nous raconter comme se sont passées les négociations avec ACMN Vie ?

Bernard Le Bras : « Nous avons ouvert ce dossier au mois de juin dernier. ACMN Vie [filiale du Crédit Mutuel Nord Europe, NDLR], qui privilégie le développement sur ses réseaux bancaires, a décidé de céder son portefeuille de contrats distribués par des courtiers web indépendants, et a donc contacté les assureurs susceptibles d’être intéressés par un transfert. Ce portefeuille, conséquent, n’était toutefois plus en fort développement depuis plusieurs années. »

Concrètement, quels contrats et combien de clients sont concernés par ce transfert de portefeuille ?

B. LB. : « Cela concerne six distributeurs [Altaprofits, Linxea, Hedios, MonFinancier, Assurancevie.com et Epargnissimo, NDLR] pour 20.000 contrats au total et 700 millions d’euros d’encours. Pour Suravenir, il s’agit d’un apport significatif au niveau de l’assurance-vie en ligne. Nous disposions avant ce transfert de quinze partenaires web indépendants. Mais notre portefeuille web est plus récent que celui d’ACMN Vie. Au niveau du nombre de contrats, il était comparable à celui d’ACMN Vie, mais légèrement moins important en termes d’encours (450 millions d’euros environ). Ce transfert nous permet donc de doubler notre portefeuille d’assurance-vie web, Fortuneo mis à part. »

Que va-t-il se passer en 2016 pour les titulaires de contrats ex-ACMN ?

B. LB. : « Les 20.000 contrats en question ont d’ores et déjà migrés vers le système de gestion de Suravenir. Ils conservent leur antériorité fiscale, leurs caractéristiques et leurs supports d’investissement. Les clients deviennent des clients Suravenir. Ainsi, s’ils veulent consulter leur portefeuille, ils peuvent le faire soit sur leur espace client via le site de Suravenir, soit sur le site du distributeur partenaire. A ce jour, les contrats restent identiques à leur situation 2015. Mais nous avons l’intention de les faire évoluer, et ce dès 2016 [les contrats existants évolueront mais ils resteront fermés à de nouvelles souscriptions chez les six courtiers concernés, NDLR]. »

Quelles évolutions comptez-vous apporter à ces contrats ?

B. LB. : « A ce jour, ils ne disposent que d’un seul fonds en euros. Si les distributeurs le souhaitent, il sera par exemple possible d’ajouter un second. Ce nouveau fonds sera bien évidemment Suravenir Opportunités [fonds euros diversifié déjà présent sur les contrats web de Suravenir, NDLR]. »

Chez vous, en dehors des fonds spécifiques comme Suravenir Opportunités, tous les fonds euros sont englobés dans l’actif général, commun avec les autres contrats. Quid de l’ex-fonds euros d’ACMN Vie, Rendement Sélection ?

B. LB. : « Concrètement, nous n’avons pas un fonds en euros qui arrive chez Suravenir en provenance d’ACMN Vie. Ce dernier nous a transféré les actifs et les passifs correspondant à son portefeuille web, au prorata. Une opération qui se déroule sous le strict contrôle de l’ACPR (1). Ces actifs sont désormais intégrés à l’actif général de Suravenir. »

Si tout est dans le même pot commun, à quoi peuvent s’attendre les ex-clients ACMN en termes de rémunération ? La même que pour votre fonds euros web Suravenir Rendement ?

B. LB. : « C’est une très bonne question. Et elle se pose non seulement pour les rendements 2016 mais aussi dès à présent pour les taux 2015 car les revenus qui vont permettre de servir une rémunération nous ont aussi été transférés. C’est désormais à Suravenir qu’il incombe de décider du taux 2015 pour ces contrats. En 2014, il y avait un écart de rémunération entre Suravenir Rendement (3,22%) et le fonds euros web d’ACMN Vie (2,50%). Je ne sais pas encore ce qui sera décidé pour les taux 2015 de Suravenir, il est encore trop tôt. »

A terme, les ex-contrats ACMN Vie sont-ils destinés à s’aligner sur les actuels contrats Suravenir ?

B. LB. : « L’idée est effectivement d’aller vers une convergence. C’est la solution la plus simple pour l’assureur comme pour les distributeurs et dans l’intérêt des adhérents. La question du rendement répond donc à cette même logique de convergence. »

Que ferez-vous des doublons ? Puisqu’à terme un ex-contrat Linxea Evolution ressemblera donc en tous points à un Linxea Avenir.

B. LB. : « Ils auront certes des caractéristiques similaires mais le client conservera deux contrats distincts, avec une antériorité fiscale différente s’il ne les a pas ouvert au même moment. »

La logique de pot commun, dans l’actif général, avec des rendements différents est celle choisie par nombre d’assureurs. Votre grand concurrent sur le marché web, Generali, critiquait toutefois indirectement cette politique récemment dans Les Echos en indiquant avoir opté pour des rendements similaires « à frais de gestion identiques »… Une réaction ?

B. LB. : « Pas particulièrement. Effectivement, Generali a mis en place cette politique l’an dernier, les rendements servis sur le web restant plus intéressants grâce à de moindres frais de gestion. Mais nous n’intervenons pas exactement sur les mêmes marchés. Generali gère des contrats patrimoniaux pour les conseillers de gestion de patrimoine indépendants, et des contrats web. Nous, nous sommes sur plusieurs gammes de contrats : le grand public avec les assurances-vie distribuées dans les caisses locales du Crédit Mutuel Arkéa (2), le patrimonial et le web. Pour les contrats bancaires, nous servons des rendements comparables à ceux de nos concurrents, idem pour les autres segments de marché. La tendance récente est toutefois au rapprochement des différentes gammes de rendement. Ce débat existe dans tous les établissements financiers qui ont plusieurs canaux de distribution. Chez Arkéa, le sujet a été tranché de longue date : la banque en ligne, avec Fortuneo (3), est un axe stratégique de développement pour le groupe. A partir de là, ce n’est pas choquant d’avoir une politique commerciale plus agressive sur l’assurance-vie en ligne, qui concerne Fortuneo et les distributeurs web. »

L’an passé, vous avez laissé entendre dans une interview qu’ouvrir la possibilité de transférer individuellement une assurance-vie n’était pas une priorité. Est-ce toujours votre avis ?

B. LB. : « Que les épargnants soient favorables à l’ouverture du transfert d’un assureur à un autre, à leur initiative, cela paraît logique. D’autant que cela est possible pour le Perp notamment. La réglementation va-t-elle évoluer ? C’est possible voire probable. Reste à savoir quand. Ce n’est effectivement pas forcément une priorité. La possibilité de transférer un portefeuille donné, comme ici les contrats web d’ACMN Vie, d’un assureur à un autre, apporte déjà une partie de la réponse. »

(1) Autorité de contrôle prudentiel et de résolution

(2) Crédits Mutuels de Bretagne, du Sud-Ouest et du Massif Central.

(3) Comme Suravenir, Fortuneo est une filiale à 100% du Crédit Mutual Arkéa.