Des taux de crédit qui restent exceptionnellement bas, des durées d'emprunt qui s'allongent et des prix qui baissent petit à petit : en 2015, la conjoncture immobilière a été favorable aux emprunteurs. Or ces tendances devraient se poursuivre. Voici ce qui attend les emprunteurs en 2016.

Pour les prêts immobiliers, l’année 2015 restera celle des taux bas record, ces derniers ayant même provoqué un afflux de rachats de crédit, et par conséquent un niveau de production inédit dans les banques depuis plus de 10 ans. Les taux ont ainsi atteint leur « plancher » à la fin du printemps de l’avis de nombre d’observateurs, avant d’opérer un rebond soudain mais finalement léger au cœur de l’été, pour redescendre très légèrement en fin d’année.

Des taux durablement bas

Pour les emprunteurs, la principale question est donc de savoir s’ils peuvent espérer des taux bas pendant encore plusieurs mois, ou craindre une véritable remontée. Contrairement au mois de mai dernier, plus personne n’ose crier au loup : « En 2015, nous avons constaté que la forte remontée de l’OAT 10 ans (1), observée durant les mois d’avril et de mai [de 0,46% début avril à 1,21% le 8 juin, NDLR], n’avait eu qu’une incidence modérée sur les taux des crédits immobiliers », rappelle Michel Mouillart, professeur d’économie à l’Université Paris Ouest et membre de l’observatoire Crédit Logement-CSA.

Désormais, quasiment tous les observateurs s’accordent sur des conditions d’emprunt favorables début 2016, et même au-delà. « Tant que le coût de la ressource ne remonte pas, c’est-à-dire en l’occurrence celui des dépôts d’épargne des ménages sur lesquels les banques se refinancent largement, les taux des crédits immobiliers resteront bas », souligne Michel Mouillart. « Le seul élément qui pourrait contredire cette hypothèse, c’est si la BCE changeait sa politique. Mais cela reste pour le moment très improbable ! » La Banque centrale européenne maintient en effet depuis plusieurs mois son principal taux directeur à 0,05%.

« Un taux moyen de 2,30% au pire fin 2016 »

Sur la base des précisions de la Banque de France, l’économiste table sur « un taux moyen de 2,25% à 2,30% [toutes durées confondues, NDLR] au pire fin 2016. » Une hypothèse finalement très proche des 2,20% constatés en novembre par l’observatoire Crédit Logement-CSA. La relative stabilité des taux fait pour l’heure consensus parmi les observateurs. Elle se vérifiera, ou non, à partir de février, le mois au cours duquel les banques « engagent leur stratégie commerciale » et « modifient leurs grilles » de taux selon Michel Mouillart, un mouvement que l'économiste considère comme le début de la reprise saisonnnière de l’activité immobilière.

Les taux devraient donc rester à des niveaux comparables à ceux de début 2015. L’afflux de rachats et de renégociations de crédit va-t-il donc repartir de plus belle ? Probablement pas, nombre d’emprunteurs souhaitant renégocier leur crédit l’ayant déjà fait courant 2015 : « Il est peu probable [qu'un tel niveau de production] soit de nouveau atteint en 2016 », confirme Sandrine Allonier, directrice des relations banques de VousFinancer, dans un communiqué. La part des rachats et renégociations avait ainsi atteint la moitié de la production de crédits immobiliers en août selon la Banque de France, pour retomber à l'automne.

Primo-accédants : retour « confirmé »

Si la stabilité des taux fait consensus, les analyses divergent en revanche sur le retour de ceux qui achètent leur résidence principale pour la première fois (2). « Les primo-accédants restent les grands absents de la reprise du marché immobilier », jugeait ainsi le courtier Cafpi en septembre, en estimant qu’ils représentaient alors seulement « 30% des acquisitions », neuf et ancien confondus.

Un constat que ne partage pas l’observatoire Crédit Logement-CSA qui a évoqué leur retour dès le printemps, « et cela a été confirmé par la suite », insiste Michel Mouillart. « Nous constatons une reprise soutenue du marché de l’accession à la propriété », précise l'économiste. « Cela va légèrement moins vite pour les jeunes actifs et les ménages modestes, des populations qui sont souvent dans la position de primo-accédants, mais cela progresse tout de même nettement. Sur un an le nombre d’accessions a augmenté de l’ordre de 14%, expliquant à lui seul le redémarrage du marché de l’ancien et celui des ventes des constructeurs de maisons individuelles. »

PTZ, érosion des prix et durées d'emprunt à rallonge

En 2016, ces primo-accédants profiteront en outre de l’élargissement du Prêt à taux zéro. Si cela va permettre « d’amplifier cette reprise », en particulier dans le neuf, l’impact du PTZ restera insuffisant dans l’ancien avec 10.000 opérations espérées par le gouvernement : « Ce n’est donc pas à la hauteur des besoins », juge l’universitaire Michel Mouillart. « Aujourd’hui, il manque 70.000 ou 80.000 primo-accédants dans l’ancien pour retrouver les niveaux de 2006-2007. »

Tous s’accordent en revanche sur la volonté des banques d’attirer ces primo-accédants, comme en témoigne la part grandissante d’emprunts sur 25 ans et plus. Mais la conjoncture économique ne permet pas un retour plus massif. D’autant que les prix baissent lentement. Le service études économiques du Crédit Agricole table ainsi sur une nouvelle diminution de 1% des prix dans l’ancien en 2016, juste assez pour atténuer leur « sur-évaluation ». En résumé, l’année s’annonce dans la droite ligne de 2015. Pour les candidats à l’emprunt, c’est plutôt une bonne nouvelle.

Voir les évolutions des taux immobiliers des derniers mois

(1) Obligations assimilables au Trésor : titres d’emprunt émis par l’Etat français.

(2) Ou qui n’ont pas été propriétaires depuis 2 ans.