L'Assemblée nationale a adopté jeudi par 35 voix contre 21 l'amendement de l'ex-Premier ministre Jean-Marc Ayrault, qui amorce une progressivité de la CSG, malgré de profondes critiques d'une partie des socialistes et de fortes réserves du gouvernement.

A l'issue de près de deux heures de débat intense dans un hémicycle inhabituellement garni pour un débat budgétaire, les députés ont donné leur feu vert à l'amendement de M. Ayrault et de Pierre-Alain Muet (PS), présenté dans le cadre du projet de budget de l'État pour 2016. Ils ont adopté une ultime retouche supprimant toute référence à la perspective d'un « impôt citoyen sur le revenu » fusionnant impôt sur le revenu et Contribution sociale généralisée (CSG). Sur cet amendement signé par quelque 160 députés PS et présenté à l'identique par les écologistes et les radicaux de gauche, le gouvernement s'en était remis au vote de l'Assemblée.

Satisfait de l'issue d'une bataille feutrée de plusieurs semaines, celui qui fut locataire de Matignon jusqu'à son remplacement par Manuel Valls en mars 2014 a déclaré à la presse juste après le vote : « Je ne suis pas dans la revanche », « ce n'est pas une affaire personnelle ». Il s'est dit animé par « une conviction de justice fiscale pour les classes populaires », notant que « 100 euros sur la feuille de paye de plus au 1er janvier 2017, c'est ça le sens politique » de la mesure.

Critiques à gauche

Si nombre de frondeurs PS mais aussi des députés comme Karine Berger ont soutenu la mesure dans l'hémicycle, le chef de file des députés socialistes de la commission des finances Dominique Lefebvre a été le plus virulent dans les critiques. L'amendement n'ouvre « aucun droit nouveau » et n'accordera « pas un euro de revenu disponible de plus » aux salariés, tout en risquant d'être inconstitutionnel pour « rupture d'égalité devant l'impôt », selon lui.

Plus policé, le ministre des Finances Michel Sapin a formulé des critiques similaires sur le fond et jugé que le texte « soulève de véritables interrogations » constitutionnelles mais aussi opérationnelles. « Le gouvernement ne peut donc pas être favorable à cet amendement », a-t-il dit, tout en s'en remettant au choix des députés. « S'il est adopté (...) il conviendrait de travailler très précisément pour qu'un certain nombre des inconvénients que je viens de décrire puissent être surmontés par des modifications qui ne seraient pas d'ailleurs mineures », a-t-il prévenu.

Une « idée épouvantable » pour la droite

Hostiles à une mesure introduite « à la hussarde », pouvant augmenter « beaucoup » le coût pour l'Etat de la prime d'activité et être censurée par le Conseil constitutionnel, la droite et le centre ont voté contre.

Réunir IR et CSG, idée « épouvantable » selon Charles de Courson (UDI), constituerait « une bombe fiscale » néfaste notamment aux classes moyennes, a aussi affirmé l'ancien ministre du Budget Eric Woerth (Les Républicains).