Longtemps réservés à des investisseurs avertis, les ETF se tournent désormais vers les investisseurs particuliers. 10 ans après leur explosion aux Etats-Unis, ces produits dupliquant les indices et promettant « souplesse, transparence et liquidité », peuvent-ils bousculer le marché français ?

Et si l’heure des trackers était venue ? Après des débuts timides, ces produits aussi appelés ETF (exchange traded funds, fonds indiciels côtés) suscitent un frémissement chez les investisseurs français. Ce qui les séduit : des fonds côtés en bourse, dont le cours reproduit la performance d’un indice de référence (si le CAC 40 gagne ou perd 2%, un ETF CAC 40 suivra la même tendance). Un intérêt logique, selon Florin Aftalion, professeur émérite à l’Essec (1). « Sur le long terme, toutes les études le prouvent : c’est impossible de battre le marché. »

Signe de l’ouverture du marché : l’émergence de nouveaux acteurs, comme Yomoni (2). Lancé depuis quelques jours, son contrat d’assurance-vie Yomoni-Vie, adossé à Suravenir, ne propose pas de fonds en euros. Mais un investissement en gestion pilotée 100% ETF, s’appuyant sur 90 trackers, selon 10 profils de risques. « Ce qu’on propose, c’est un contrat simple, entièrement digital, à la portée de tous, avec un ticket d’entrée à 1.000 euros », détaille Mourtaza Asad-Syed, PDG de Yomoni. Le courtier promet « une allocation d’actifs stratégique et tactique, ajustée tous les mois ». Après avoir levé 3,5 millions d’euros, la startup a de grandes ambitions : collecter un milliard d’euros en 5 ans ! « Nous entrons dans une phase d’adoption massive des ETF ».

Des frais extrêmement bas

Les ETF peuvent-ils concurrencer les traditionnels OPCVM ? « Les choses sont en train de bouger », assure Regis Yancovici, fondateur de jinvestismoinscher.fr, et spécialiste des ETF. Leur principal atout : des frais entre 0 et 0,3% annuels ! « Moins de frais, c’est plus de performance. Pour un OPCVM, il y a un certain flou autour des frais directs et indirects, qui peuvent atteindre 2,5%. Ce sont des points de performance de perdus, » explique-t-il. De quoi justifier la communication de Yomoni, qui assure être parmi « les moins chers du marché », avec une offre affichant 1,6% de frais annuels.

Autre avantage : l’aspect « rationnel » de l’investissement. « Quand on achète une action ou un OPCVM, on achète une part de rêve : choisir le produit qui va battre le marché. Or, 80% des OPCVM sous performent leur indice de référence, » ajoute Regis Yancovici. Avec les trackers, pas de surprise : la performance correspond à l’indice.

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Un produit qui dérange les banquiers ?

« Les trackers cumulent les avantages : des frais minimum et plus de transparence, » analyse Florin Aftalion. « Ils subissent le risque du marché, c’est inévitable. Mais on évite des risques inutiles. C’est une approche saine. » Pourtant, à fin août 2015, l’encours des ETF en Europe n’est que de 495 milliards de dollars. Trois fois moins qu’aux Etats-Unis. Surtout, 90% de cet investissement est institutionnel.

Le produit est-il boudé par les particuliers ? Plutôt par les intermédiaires, selon Ludovic Djebali, responsable Europe chez Source (fournisseur de 75 ETF) : « ces produits sont plus achetés que vendus ! » Traduction : l’offre existe, mais elle est peu mise en avant. « Un banquier n’a aucun intérêt de distribuer les ETF, quand un fonds ''maison'' est chargé 10 fois plus », glisse-t-on chez Yomoni.

Source assure néanmoins que le mouvement est en marche. « C’est une lame de fond qui arrive. Aux Etats-Unis, dès que les conseillers financiers n’ont plus été rémunérés à la commission, mais à la performance et au conseil, le marché des ETF a explosé ». Si la réglementation va dans le même sens en Europe, Ludovic Djebali prédit le même succès. « Mais cela dépendra aussi de l’émergence de solutions packagées. Aux USA, le marché repose sur des intermédiaires, plateformes et sociétés spécialisées, proposant des modèles d’allocation d’actifs ou donnant accès à une offre large d’ETF. Ce modèle peut s’exporter en Europe. Un investisseur non averti ne saura pas forcément comment placer son patrimoine en ETF, il faudra l’accompagner dans ce processus. Ceux qui ne semblent pas prêts, ce sont les distributeurs ! »

Avertissement : les ETF présentent un risque de perte en capital. La robustesse même de leur fonctionnement est mise en cause par certains analystes en cas de conditions extrêmes des marchés.

(1) Auteur de « Trackers et ETFs : De nouveaux instruments d'investissement », aux éditions Economica.

(2) Une autre Fintech, Anatec, est également en passe d’obtenir son agrément AMF.