Un changement de bénéficiaire, envoyé par lettre simple datée du 5 juillet et reçue le 20 juillet, peut-il être contrecarré par une acceptation de l’ex-bénéficiaire reçue le 10 juillet ? C’est la question à laquelle la Cour de Cassation a dû répondre dans son arrêt du 26 mars 2015 : en matière d’assurance-vie, les actes modificatifs sont valables même s’ils n’ont pas de « date certaine ».

Monsieur X a souscrit en 1999 auprès de l’AFER une assurance-vie et a désigné son épouse comme bénéficiaire. Le 5 juillet 2000, il modifie cette clause bénéficiaire pour y remplacer sa femme par ses enfants. Cette révocation, réalisée par lettre simple, est reçue par l’AFER le 20 juillet 2000. Or, le 10 juillet 2000, l’association d’épargnants avait reçu une lettre non datée de son épouse acceptant la clause bénéficiaire.

La question posée à la Cour de Cassation peut, en termes juridiques, paraître complexe : faut-il appliquer l’article 1328 du Code civil ? Selon cet article, les actes, qui ne sont pas rédigés devant un officier public (notaire, avocat, etc.), n’acquièrent une date certaine pour les tiers qu’au jour de leur enregistrement (dans le cas présent, lors de la réception du courrier par l’AFER) (1).

La date de signature du courrier prévaut

La deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Civ.2e, 26/03/15,14-11206) considère cependant que cet article du Code civil ne s’applique pas aux contrats d’assurance-vie ou à leurs actes modificatifs. Selon cet arrêt, il faut retenir la date de signature du courrier et, seulement à défaut de date indiquée, celle de la réception du courrier. La modification de la clause bénéficiaire a donc bien eu lieu avant l’acceptation de l’ancienne version par l’épouse. Monsieur X n’avait donc pas besoin de l’accord de sa femme.

La question ne se poserait plus aujourd’hui : depuis la loi du 17 décembre 2007, l’acceptation, pour être valide, doit comporter la double signature du souscripteur (le plus souvent, c’est également l’assuré) et du bénéficiaire.

(1) L’article 1328 du Code civil dispose que : « les actes sous seing privé n'ont de date contre les tiers que du jour où ils ont été enregistrés, du jour de la mort de celui ou de l'un de ceux qui les ont souscrits, ou du jour où leur substance est constatée dans les actes dressés par des officiers publics, tels que procès-verbaux de scellé ou d'inventaire ».