De plus en plus bas, les taux de crédit immobilier n’en finissent plus de battre des records. Une conjoncture très défavorable aux taux variables, ou révisables. Conséquence : ces types de crédit ne représentent plus que 2,5% du marché. Qui sont ces irréductibles emprunteurs à taux variable ? Et dans quel cas le révisable est-il encore digne d’intérêt ?

Le taux révisable n’est plus à la mode. En 2004, il faisait office de véritable alternative au taux fixe, avec 22,1% de la production de crédits immobiliers selon l’observatoire Crédit Logement/CSA. Mais à l’époque, le taux d’intérêt moyen des crédits immobiliers tournait autour des 4%. En novembre 2014, il n'est plus que de 2,38% selon la même source. Or le principal atout du taux révisable est de pouvoir obtenir un taux plus avantageux, en l’échange de quoi l’emprunteur accepte que son taux d’intérêt évolue au fil du temps, suivant les aléas des marchés. Avec une certaine mesure toutefois puisque les taux révisables sont quasi systématiquement « capés », c’est-à-dire qu’ils ne peuvent être révisés à plus de 1 ou 2 points, selon le contrat, à la hausse ou à la baisse.

En savoir plus sur le fonctionnement des crédits à taux révisable (ou variable)

« Plus de marché du révisable » aujourd'hui

En cette fin d’année 2014, les taux fixes atteignent des niveaux record (à la baisse) et l’écart entre les taux fixes et variables proposés par les banques est si faible (0,50 à 0,70 point en moyenne) que les emprunteurs optent presque toujours pour du fixe. « Aujourd’hui, l’avantage du taux variable devient ridicule », juge Michel Mouillart, économiste à l’université de Paris-X Nanterre et spécialiste de l’immobilier. La conjoncture est telle que Sandrine Allonier, responsable des relations banques chez le courtier VousFinancer, estime qu’il n’y a aujourd’hui « plus de marché du révisable ». Pourtant, cette famille de taux accaparait encore plus de 6% de la production de crédit immobilier en septembre 2013. Une part tombée à 2,5% en novembre selon Crédit Logement/CSA. Les taux de crédit immobilier étant actuellement à leur plus bas historique, les emprunteurs anticipent une remontée potentielle dans les années à venir et sautent donc sur l’opportunité de fixer leur prêt à un taux très bas.

Outre ces aspects conjoncturels, les établissements financiers privilégient volontairement le taux fixe selon Sandrine Allonier : « Pour les banques, le taux fixe, c’est une clientèle qui s’engage généralement sur 20 ans et qui va domicilier ses revenus sur un compte courant. » Il fait ainsi office de produit d’appel pour capter de nouveaux clients. Contrairement au révisable qui « correspond plus à des emprunts sur une durée de moins de 10 ans » selon Sandrine Allonier. Ce qui explique que les banques fassent plus d’efforts pour l’un que pour l’autre.

Taux variables : « des cas atypiques »

A la vue de tous ces vents contraires, on peut se demander pourquoi certains emprunteurs optent encore pour un taux variable. Sandrine Allonier estime que ces taux sont actuellement octroyés par « certaines banques spécialisées » ou par le Crédit Foncier. Contacté, le service presse du Crédit Foncier a décliné notre demande, invoquant un déficit d’information sur ce marché devenu anecdotique. Deux grands réseaux ont eux aussi passé leur tour sur ce sujet.

« Actuellement, les taux variables ne répondent pas à la problématique générale des emprunteurs » selon l’économiste Michel Mouillart, avant de préciser, pour identifier ces fameux 2,5% : « On trouvera toujours des opérations atypiques, sur des durées d’endettement très courtes, des montants élevés, avec des montages financiers complexes ». Même avant la marginalisation des taux révisables, sous l’effet de la baisse des taux, Michel Mouillart juge que ces crédits convenaient plutôt à une « catégorie de ménages moins sensibles au risque », aux « revenus plutôt élevés », avec des profils d’investisseurs. « Leur objectif est de rembourser leur crédit au plus vite, sur 5 à 7 ans par exemple, en optimisant au maximum le coût de l’opération et de l’emprunt. »

Sandrine Allonier ajoute que ces taux convenaient aussi, il y a peu, à une autre clientèle, plus fragile : ceux dont le taux d’endettement était légèrement trop élevé pour que leur dossier puisse être accepté par les banques. Dans leur cas, les taux variables, plus bas, permettaient de faire passer le dossier de demande de crédit. Mais là encore, les écarts sont désormais devenus trop faibles.

Le compromis taux mixte

La responsable relations banques de VousFinancer cite ainsi l’exemple d’une « banque grand public » où les taux fixes sur 20 ans, pour les bons profils sont à 2,45%. Le taux variable « capé 1 » (révisable jusqu’à un point au-dessus du taux de départ) est actuellement à 2% et le « capé 2 » à 1,82. Des différences « pas suffisantes » en cas d’évolution à la hausse des marchés : « Les emprunteurs préfèrent ne pas prendre de risque », assure Sandrine Allonier. Elle fait donc la promotion des taux mixtes, une formule qui permet de profiter d’un taux fixe pendant plusieurs années avant de basculer sur du taux variable. Dans ce même grand réseau bancaire, le taux mixte (7 ans à taux fixe puis révisable) est actuellement de 2,05%, un compromis intéressant pour Sandrine Allonier qui ajoute que cette formule permet de payer moins d’intérêts d’emprunt durant la première partie du remboursement du crédit. Mais elle concède que les taux mixtes compétitifs, encore présents en 2012 et 2013, se font aujourd’hui plus rares.

« On est loin du retour du révisable ! » reconnaît-elle. Mais les banques pourraient à nouveau le rendre compétitif, sous l’effet de la contrainte. Le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer mettait ainsi en garde les établissements financiers sur la faiblesse des taux de crédit immobilier en juin dernier. Il pointait notamment le risque que font peser ces taux bas, offrant peu de marges aux banques, pour leur rentabilité future, en cas de remontée des taux sur les marchés financiers. Or les crédits immobiliers à taux variable permettent d’atténuer ce risque en le reportant en partie sur l'emprunteur. Mais pour l’heure, les banques préfèrent encore attirer de nouveaux clients à coup de taux fixes réduits.