Vous n’êtes jamais à découvert ? Vous avez un peu d’épargne sur un Livret A ou une assurance-vie en euros ? En toute logique, vous pensez être un bon client pour votre banque. Pourtant, tout n’est pas forcément aussi simple. Explications.

Il ne faut jamais l’oublier : avant d’être un service quasi-indispensable au quotidien, la banque est avant tout une activité commerciale. A ce titre, un bon client est d’abord pour elle un client qui lui rapporte de l’argent. Même si les conseillers bancaires préfèrent sans doute un client peu rentable mais fiable à un autre plus rémunérateur mais présentant des risques.

Pour tenter de caractériser les caractéristiques du bon client bancaire, nous avons interrogé Guillaume Alméras, éditeur de Score Advisor, site spécialisé en stratégie bancaire. Il nous a confirmé qu’en matière bancaire, il fallait se méfier des idées reçues : « Tout est contre-intuition dans ce secteur, c’est ce qui le rend passionnant ».

Etre jeune, actif et pas encore propriétaire

Ça peut paraître injuste, mais c’est comme ça : les banques ont tendance à choyer un peu plus que les autres leurs jeunes clients, à coup de forfaits à prix réduits et d’avantages divers. « Le client idéal pour elles, c’est le jeune actif, entre 27 et 37 ans », confirme Guillaume Alméras. « Les équipes marketing de toutes les enseignes travaillent toutes cette cible ».

L’enjeu est évident : comme tout commerce, la banque doit veiller à renouveler sa clientèle. Ces jeunes actifs, qui ont de grandes chances de gagner de mieux en mieux leur vie au fil des ans, sont des sources de liquidités pour l’avenir. Il sont aussi susceptibles de souscrire, à court ou moyen-terme, des crédits, notamment immobiliers, qui figurent en bonne place dans les sources de revenus des banques. L’emprunteur immobilier a, enfin, l’avantage d’être un client quasi-captif, qui s’engage la plupart du temps à domicilier son salaire dans l’établissement prêteur.

Pourtant, cette tendance au « jeunisme » peut se discuter. Toujours selon Guillaume Alméras, les banques en ligne, notamment, ont sans doute tort de cibler à tout prix dans leur communication les jeunes urbains aisés, plutôt que « les jeunes seniors, qui ont généralement plus d’argent et plus de temps pour chercher les meilleurs placements ».

Etre en CDI, si possible dans la fonction publique

C’est la première chose que regardent les chargés de clientèle au moment d’accueillir un nouveau client : est-il un salarié en contrat à durée indéterminée ? Plus que le niveau des revenus, c’est avant tout la stabilité des rentrées d’argent qui lance une relation bancaire sur de bonnes bases. A ce titre, les fonctionnaires, qui disposent en plus d’une sécurité de l’emploi, sont souvent avantagés, notamment sur les taux des crédits qui leur sont proposés.

A l’inverse, les intérimaires, les travailleurs indépendants, sans parler des demandeurs d’emploi, suscitent plus de méfiance, même si les mœurs bancaires tendent à évoluer en la matière. « Les banques s’adaptent à la conjoncture », constate en effet Guillaume Alméras. « Elles accordent de plus en plus facilement des crédits à des salariés en CDD, voire à de jeunes chômeurs. Tout simplement parce qu’ils sont de plus en plus nombreux. »

Etre riche (mais pas trop)

« C’est une illusion de croire que la rentabilité d’un client augmente avec la richesse », tranche Guillaume Alméras. Certes, les clients à gros salaires et/ou gros patrimoine sont recherchés. Ils ont une capacité d’épargne supérieure à la moyenne, et sont donc d’importants pourvoyeurs de liquidités. Ils ont aussi généralement une propension au risque plus importante, et pourront donc être orientés vers des produits qui permettent aux banques de prélever des frais de gestion : l’assurance-vie multisupports et les produits de bourse notamment. Ils sont enfin le plus souvent de gros utilisateurs de services bancaires, en optant par exemple pour des cartes bancaires haut de gamme.

Mais voilà, ces clients sont aussi généralement plus durs en affaires. « Plus un client est riche, plus il est en position de négocier durement, et de vous faire baisser vos marges », explique Guillaume Alméras.

Faire « chauffer la carte bleue » en évitant les dérapages

Comme les crédits ou les frais de gestion sur les placements, les paiements par carte bancaire sont une autre source de revenus importante pour les banques. Les découverts, aussi, à condition qu’ils soient sous contrôle, courts et maîtrisés.

Car si un client en grande difficulté peut rapporter de l’argent, sous forme de commissions d’intervention et autres lignes de frais sanctionnant les incidents de fonctionnement du compte, il représente également un coût important. « Il est source de risques », explique Guillaume Alméras. En mobilisant son conseiller bancaire, notamment si son cas part en contentieux, il coûte aussi cher en temps de travail, à une époque où les enseignes ont plutôt tendance à réduire leurs réseaux d’agences, et le nombre des salariés qui y travaillent.

Un « client moyen » en conclusion

Au final, le client idéal pour les banques pourrait bien être le client moyen. « Un client qui n’est ni trop ni pas assez », confirme Guillaume Alméras, « qui fait du découvert, mais qui sera capable de le combler sans difficultés ; un client bien équipé en produits et services, mais qui n’est pas en position de trop négocier les prix ». Moyen, mais aussi autonome. Car « le client qui dispose d’un petit compte, qui vient souvent en agence, qui préfère payer en chèque qu’en carte : ce client-là, les banques l’orientent volontiers vers La Banque Postale (1) », conclut Guillaume Alméras.

NB : l'idée de cet article a été inspirée par une conversation du forum cBanque sur laquelle vous pouvez réagir : C'est quoi, être un bon client d'une banque ?

(1) Contrairement aux autres enseignes bancaires, qui peuvent interrompre à tout moment leur relation commerciale avec un client, La Banque Postale, dont le capital est détenue majoritairement par l’Etat, assume une mission de service public et a l’obligation d’ouvrir un compte bancaire à toute personne qui le demande.