La loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance-vie en déshérence, qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2016, s’appliquera aussi au stock de comptes, contrats et coffres-forts actuellement en déshérence. Un rattrapage qui va obliger les banques et les assureurs à transférer plusieurs milliards d’euros à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et à l’Etat avant le 1er janvier 2017.

« (…) Permettre le retour à leurs propriétaires légitimes de fonds qu’ils ont délaissés, ou dont ils ne connaissent pas l’existence, et qui demeurent aujourd’hui de manière indue au bilan d’institutions financières » (1) : c’est l’objet que s’est fixé la loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance-vie en déshérence, publié au JO le week-end dernier. L’ambition est claire : il ne s’agit pas seulement de prévenir, à l’avenir, les situations de déshérence de comptes bancaires ou d’assurances-vie, mais bien de traiter le « stock » actuel de comptes non réclamés et ainsi de régler un problème qui pèse, selon les estimations - basses - de la Cour des comptes, 1,2 milliard d’euros pour les comptes bancaires et 2,76 milliards pour les contrats d’assurance-vie.

Aujourd’hui en effet les banques n’ont aucune obligation, ou presque, à l’égard de ces avoirs oubliés. Elles n’ont pas à rechercher leurs propriétaires, ni même à s’assurer qu’ils sont vivants. Certes, elles ont la possibilité, au bout de 10 ans, de transférer les sommes à la Caisse des Dépôts (CDC). Mais elles n’en ont pas l’obligation et dans les faits, n’y ont guère intérêt, s’agissant de sommes qu’elles conservent à leur bilan et sur lesquels elles prélèvent des frais de gestion, parfois jusqu’à épuisement du solde. Ce sont donc des milliers de comptes qui aujourd’hui dorment, sans que personne n’ait intérêt, ou la possibilité, de les réveiller jusqu’au terme de la prescription trentenaire et le versement des sommes à l’Etat.

Une date-limite au 1er janvier 2017

La loi, qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2016, va chambouler beaucoup de choses dans le domaine. D’abord, elle introduit dans le code monétaire et financier une définition du compte bancaire inactif, notion sans fondement juridique à l’heure actuelle. Elle oblige également les banques à vérifier que les titulaires des comptes dormants sont vivants, et à transmettre la gestion des comptes déclarés inactifs à la Caisse des Dépôts au bout de dix ans (trois ans si le titulaire est décédé).

Lire par ailleurs : Comptes bancaires inactifs : les nouvelles obligations des banques à partir de 2016

Ces nouvelles règles s’appliqueront aussi au stock actuel de comptes. L’article 13 de la loi donne aux banques la marche à suivre, et une date-limite pour la mettre en œuvre : le 1er janvier 2017 (2). A cette date, tous les comptes bancaires dont l’inactivité, au sens de la loi, est intervenue entre 10 ans et 30 ans (3 et 30 ans si le décès du titulaire est connu) avant l’entrée en vigueur de la loi, devront être transférés à la CDC. Si l’inactivité date de plus de 30 ans à cette même date, les fonds reviendront directement à l’Etat, au nom du principe de la prescription trentenaire. Le même article introduit toutefois une exception à ce principe. En effet, les comptes transmis à la CDC dans le cadre de cette opération de rattrapage n’y resteront pas 20 ans ou 27 ans (titulaire décédé), comme c’est le cas pour les « nouveaux » comptes inactifs, mais 30 ans, période au cours de laquelle les titulaires ou leurs héritiers pourront toujours récupérer les fonds.

Sous le contrôle de l’ACPR

La procédure est globalement la même pour les contrats d’assurance-vie : les sommes dues à l’assuré ou au(x) bénéficiaire(s) devront être tranférées avant le 1er janvier 2017 à l’Etat si elles n’ont pas été réclamées, au moment de l’entrée en vigueur de la loi, depuis au moins 30 ans à compter de l’échéance du contrat ou du décès de l’assuré. Si le délai est compris entre 10 et 30 ans, c’est à la CDC que les assureurs devront s’adresser. L’exception à la prescription trentenaire déjà évoquée vaut également ici.

Le périmètre de la loi inclut également les coffres-forts, qui sont concernés par le rattrapage, sans toutefois passer par la case CDC. Les coffres-forts oubliés depuis plus de 30 ans et dont les frais de location n’ont plus été payés depuis au moins un an au moment de l’entrée en vigueur de la loi pourront être ouverts, leur contenu vendu et transféré à l’Etat.

Que le transfert concerne un compte bancaire, un contrat d’assurance-vie ou un coffre-fort, les établissements teneurs devront par ailleurs en informer les titulaires, les souscripteurs, les héritiers ou les bénéficiaires six mois en amont, par le biais d’un courrier recommandé.

Enfin, l’effectivité de cette opération de rattrapage sera contrôlée par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), qui remettra un rapport sur la question au Parlement avant le 1er mai 2016.

(1) Source : rapport de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur la proposition de loi, enregistré le 5 février dernier.

(2) Les modalités d’application seront néanmoins précisées par un décret en conseil d’Etat.