Sur les quatre premiers mois de l’année 2014, le Plan épargne logement (PEL) affiche une collecte de plus de 4 milliards d'euros, plus que le Livret A et le Livret développement durable (LDD) réunis selon les statistiques de la Banque de France. Rémunéré à 2,50% avant cotisations sociales, soit 2,11% net de tout impôt, le PEL apparaît en effet plus rentable que le Livret A et ses 1,25%. Le décryptage et les conseils de Didier Davydoff, ex-économiste à la Banque de France et actuel directeur de l’Observatoire de l’épargne européenne.

Les statistiques de la Banque de France portant sur le mois d’avril confirment que la hausse de la collecte du PEL, régulière depuis la mi-2009, s’accélère. Comment l’expliquez-vous ?

« C’est la correction d’une anomalie. En comparaison aux autres produits d’épargne bancaire, le PEL présente un bon rendement financier. Si étonnement il doit y avoir, c’est plutôt qu’il n’ait pas eu plus de succès auparavant. Cela fait quand même un moment que la rémunération du PEL est nettement supérieure à celle des autres produits bancaires. Alors que les contraintes sont extrêmement légères ! Au pire, si vous retirez votre épargne avant 2 ans de détention, vous retrouvez le taux du CEL (actuellement à 0,75%, NDLR). »  

Lire à ce propos sur cBanque : le fonctionnement du PEL

« L’an passé, il y a eu une forte actualité autour du Livret A puisque son plafond a été porté à 22.950 euros au 1er janvier 2013. Un bon nombre de particuliers ont saturé leurs droits en orientant leur épargne vers le Livret A (deuxième meilleure collecte de l’histoire en janvier 2013, record pour le LDD en 2012, NDLR). Cette année, les Livret A et LDD sont moins mis en avant. Et comme la rémunération pourrait baisser en août, les épargnants cherchent autre chose. » 

Les banques mettent actuellement le PEL en avant sur internet et en agences. Mais s’agit-il réellement du meilleur produit en termes de sécurité et de rendement à l’heure actuelle ?

« Oui, au niveau des produits d’épargne bancaire. Après, il faut le comparer à l’assurance-vie, qui offre un rendement légèrement supérieur, plus proche de 3% (la rémunération moyenne des fonds euros a été de 2,8% en 2013, hors cotisations sociales comme pour le PEL, NDLR) mais avec des conditions de conservation et de durée de détention qui sont plus exigeantes. »

A qui conseillez-vous le PEL ?

« Tout le monde. Pour qui est-il encore plus intéressant ? Les personnes qui visent à acquérir à terme un bien immobilier. Cela permet de disposer d’une épargne conséquente et de bénéficier en outre de la prime qui peut faire monter la rémunération au-dessus de 3% (prime conditionnée à l’octroi d’un prêt épargne logement, NDLR). Le PEL, plafonné à 61.200 euros de versements, est en revanche moins intéressant pour les personnes les plus fortunées. Ces dernières vont plutôt opter pour l’assurance-vie. »

Reste la contrainte de l’obligation annuelle de versements, qui équivaut à 45 euros par mois…

« Si l’on ne peut pas économiser 45 euros par mois, il est difficile d’épargner tout court… Avec une très faible capacité d’épargne, il faut commencer par mettre un ou deux mois de salaire sur un Livret A. Ensuite, l’épargne-logement est intéressante. »

L’autre mouvement d’ampleur du début 2014 est la très forte collecte des livrets fiscalisés, proche des 7 milliards d'euros, deux fois supérieure à celle du début 2013 mais faisant toutefois suite à une décollecte au dernier trimestre 2013…

« Je l’explique plus difficilement car ces livrets sont mal rémunérés : en moyenne de 1,25% en avril, ce qui est extrêmement bas puisqu’à la différence du Livret A il faut dans ce cas prendre en compte les prélèvements fiscaux. Il s’agit peut-être de personnes ayant atteint leur plafond sur leurs Livret A et LDD. Ou peut-être est-ce l’effet des campagnes commerciales de certains établissements. »

Les taux promotionnels et primes de bienvenue peuvent-ils expliquer une telle hausse de la collecte ?

« Il y a toujours des chasseurs de taux promotionnels. Après, sur la collecte des livrets fiscalisés, il faut relativiser la hausse : il s’agit aussi d’un rattrapage puisque l’encours avait fortement baissé courant 2013 (décollecte de 5,8 milliards sur l'année, NDLR). »

Avec la perspective d’une probable baisse du rendement du Livret A à 1% au 1er août prochain, les tendances actuelles vont-elles se confirmer ?

« Ce que l’on constate en Europe, c’est que sur l’année 2013, il y a un reflux des produits bancaires et une reprise de l’épargne financière. Mais, globalement, les revenus des ménages baissent, donc la masse de l’épargne diminue. Et un facteur important doit être pris en compte : le marché immobilier est en baisse. Les vendeurs, en particulier les 50-60 ans, récupèrent moins d’argent. Ce moteur de l’épargne des ménages s’essouffle. »