Depuis janvier 2013, les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement (IOBSP) doivent être immatriculés à l’Orias, le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance, et doivent pour cela répondre notamment à de nouvelles exigences de formation. Plus d’un an après la mise en place du nouveau statut des courtiers et mandataires, quel bilan peut-on tirer de cette réforme ? Jean-Bernard Valade, président honoraire de l’association française des intermédiaires bancaires (Afib) et administrateur à l’Orias répond à nos questions. Interview.

Jean-Bernard Valade, pouvez-vous nous rappeler ce qui a changé pour les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement (IOBSP) en 2013 ?

« La Loi Lagarde de 2010 prévoyait un parfait encadrement de l’activité des IOBSP. Deux décrets d’application de cette loi ont été publiés en janvier 2012. Le premier oblige les IOBSP à être immatriculés au registre unique de l’Orias. Le second est beaucoup plus long et compliqué et définit ce qu’est désormais un IOBSP. Toute personne qui, par oral ou par écrit, expose les modalités d’une opération de banque ou de service de paiement est désormais un IOBSP. Ces intermédiaires sont divisés en quatre catégories : le courtier qui ne travaille qu’en vertu du mandat de son client, le mandataire exclusif qui travaille pour une banque en exclusivité, le mandataire non-exclusif qui est mandaté par plusieurs banques et le mandataire MIOBSP (mandataire d’intermédiaire en opérations de banque et services de paiement, NDLR). La partie la plus importante du décret dit que pour être IOBSP il faut soit avoir un diplôme reconnu par la profession de niveau bac+3, soit avoir une expérience professionnelle significative, soit suivre une formation de 150 heures. » 

Lire par ailleurs : Les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement (IOBSP) 

Quel était l’objectif de cette réforme ?

« L’objectif était bien sûr de protéger le consommateur. Grâce à l’inscription obligatoire sur le registre de l’Orias, le consommateur peut savoir si la personne qu’il a en face de lui a les capacités et la qualité pour lui présenter un prêt (1). C’est une vraie loi de protection du consommateur. » 

Peut-on tirer un premier bilan de ces deux réformes ?

« Le bilan général est qu’effectivement la protection du consommateur s’est accrue. D’ailleurs, les associations de défense des consommateurs regardent les IOBSP d’un œil totalement différent : avant ils étaient un peu “bizarres” et pas forcément professionnels, maintenant un intermédiaire en opération de banque est devenu quelqu’un de “fréquentable”, un véritable professionnel. C’est une vraie avancée positive. » 

Selon les chiffres publiés cette semaine par l’Orias, 92% des intermédiaires ont renouvelé leur inscription. C’est un chiffre satisfaisant ?

« Oui, il l’est. C’est vrai que lorsque l’on regarde les chiffres absolus, le nombre de professionnels à ne pas avoir renouvelé leur immatriculation est énorme. Mais en valeur relative, nous retrouvons les pourcentages des autres professions. Les 92% de renouvellement correspondent au tri classique d’une profession. Toutefois, pour être très clair et très sincère, il y a également des personnes qui ont décidé d’arrêter le métier parce qu’il devient tellement professionnel que certains estiment que cela ne leur convient plus, que cela devient trop compliqué. Et c’était le but recherché de la réforme. » 

En se penchant un peu plus sur les chiffres de l’Orias, nous constatons que seulement 74% des courtiers en banque ont renouvelé leur inscription. Comment s’explique cet écart ?

« La différence existe parce que les courtiers forment la partie la plus compliquée de cette activité. J’ai personnellement beaucoup œuvré pour que l’on durcisse les conditions d’accès à ce métier car le courtier n’est pas contrôlé par une banque. Il ne faut pas qu’il fasse n’importe quoi, il ne faut pas que ce soit la jungle ! C’est pourquoi le courtier doit répondre à des exigences beaucoup plus grandes que le mandataire en opérations bancaires par exemple. Donc forcément, une fois encore, ces exigences en ont arrêté certains. Comme dans toutes les professions, le jour où elles sont encadrées, il y a de la casse… » 

La Chambre nationale des conseils intermédiaires en opérations de banque (CNCIOB) dénonce la difficulté de ces courtiers à obtenir leur renouvellement. Vous comprenez leur réaction ?

« Je n’ai pas d’avis sur leur prise de position parce que le CNCIOB ne représente pas les intermédiaires en opérations de banque. Ce sont des CIF (conseillers en investissements financiers, NDLR) qui ont trouvé la solution intelligente de créer une section IOB. Il y a aujourd’hui deux associations représentatives de la profession qui sont l’Afib et l’Apic (Association professionnelle des intermédiaires en crédits, regroupant Cafpi, Empruntis et Meilleurtaux, NDLR). » 

Quand la CNCIOB parle de fermeture de cabinets et de licenciements à cause de la réforme, ça vous paraît justifié ?

 « Si des professionnels n’ont pas pu renouveler leur immatriculation, cela veut dire qu’ils n’en avaient pas les capacités. L’Afib ou l’Apic ne nous ont pas transmis de tels communiqués. Le retour que nous avons des professionnels est plutôt très bon parce que ces réformes professionnalisent enfin le secteur. Quand la réglementation s’est durcie en Angleterre, les parts de marché du courtage en crédits immobiliers sont passées de 20% à 60%. Il est en train de se passer la même chose en France et les IOBSP savent que c’est une bonne chose pour eux. Resteront sur le bord de la route ceux qui n’ont pas pu s’adapter à une réglementation contraignante. Mais c’est parce qu’elle est contraignante que la profession a de plus en plus de crédibilité. » 

(1) Les particuliers peuvent vérifier sur le site www.orias.fr que leur interlocuteur est bien inscrit sur le registre des IOBSP.