Le projet de loi Consommation a été définitivement adopté ce jeudi par le Parlement. Retour sur les principaux apports du texte porté par le ministre Benoît Hamon dans le domaine des crédits à la consommation.

C’est un long voyage législatif qui s’est s’achevé aujourd’hui : celui de la loi Consommation, déjà surnommée « Loi Hamon », du nom du ministre délégué à l’Economie sociale et solidaire qui l’a portée face au Parlement. Il y a en effet bientôt 10 mois que le texte a été déposé à l’Assemblée nationale. Il a depuis été l’objet de plusieurs controverses, a été amendé à de nombreuses reprises, avant que les deux assemblées s’entendent sur un texte commun, en commission mixte paritaire, la semaine passée.

Il faut dire que cette loi Consommation embrasse un large éventail de sujets, de l’action de groupe à la lutte contre les clauses abusives en passant par l’assurance emprunteur. Elle a fait, également, de la lutte contre le surendettement l'un des ses chevaux de bataille, avec une mesure phare : la création d’un « fichier positif », répertoriant les crédits en cours de remboursement.

Un « fichier positif », enfin

Après des années de tergiversations, de controverses et de propositions de lois enterrées, Benoît Hamon a en effet choisi de passer à l’action en incluant (par amendement) la création d’un « registre national des crédits aux particuliers » dans son projet de loi. Celui-ci recensera « les crédits à la consommation accordés aux personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels » : dans le détail, les crédits conso amortissables, renouvelables ou affectés, les autorisations de découvert, ainsi que les opérations de location-vente et de location avec option d’achat. Mais pas les crédits immobiliers, ce qui a déclenché les critiques de certains.

Lire aussi : Crédit conso : une version allégée du « fichier positif » dans la loi consommation ?

Ce « fichier positif » sera alimenté par les déclarations des prêteurs. Il aura également vocation à recenser les incidents de remboursements, y compris ceux des crédits immobiliers, et remplacera donc à terme l’actuel FICP (Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers). La consultation du fichier sera payante et obligatoire, y compris à l’occasion de la reconduction d’un contrat de crédit renouvelable. Pas d’obligation de la consulter, par contre, pour les crédits municipaux accordant des prêts sur gage.

Son objectif sera de fournir aux établissements de crédit, de paiement et de monnaie électronique « un élément d’appréciation de la solvabilité » des emprunteurs. Il faudra toutefois des années avant que ce ne soit vraiment le cas. En effet, le registre n’intégrera pas le stock de crédits actuellement en cours de remboursement, mais seulement les nouveaux prêts contractés.

Le registre sera tenu par la Banque de France, qui gère déjà le FICP. Un décret pris en Conseil d’Etat précisera prochainement la liste des informations qui y sera contenue pendant toute la durée de la période de remboursement. Un identifiant spécifique sera également créé pour l’occasion, selon des modalités à définir également par décret. Son fonctionnement sera observé par un comité de suivi, composé de parlementaires mais aussi d’un représentant de la Cnil.

Alternative amortissable au crédit renouvelable

Pour améliorer la prévention du surendettement, Benoît Hamon a également choisi d’encadrer un peu plus la distribution des crédits renouvelables sur le lieu de vente ou dans la vente à distance. Dans le domaine, la loi Consommation reprend le travail là où l’avait laissé la loi Lagarde, il y a quatre ans.

Cette dernière, qui avait modifié en profondeur les règles de distribution des crédits à la consommation, oblige déjà les prêteurs à disposer d’une alternative en crédit amortissable à côté de leur offre de crédit renouvelable, sur les lieux de vente ou dans le cadre de la vente à distance. La loi Hamon va plus loin, en les obligeant à présenter cette offre, à partir du moment où le montant du prêt dépasse un certain seuil, qui devrait être de 1.000 euros. Les vendeurs doivent également fournir aux clients les informations permettant de comparer « de façon claire le fonctionnement, le coût et les modalités d’amortissement des deux crédits proposés selon au moins deux hypothèses de délai de remboursement. » Le seuil, ainsi que les modalités de présentation des deux offres, feront l’objet d’un décret d’application. Ces obligations entreront en vigueur neuf mois après la publication du décret.

Un an de durée de vie pour les crédits renouvelables

Deux autres mesures touchant au crédit renouvelable ont été très critiquées par les banques. La première concerne les plans de surendettement, dont la durée va être ramenée de 8 à 7 ans, sauf s’ils intègrent un crédit immobilier lié à la résidence principale. La seconde raccourcit la durée de vie des lignes de crédits renouvelables non utilisées : de deux ans actuellement, elle va passer à un an. Dans le détail, lorsqu’une ligne de crédit renouvelable n’aura pas été utilisée depuis un an, elle sera suspendue. L’emprunteur aura alors douze mois pour demander la levée de cette suspension, après une nouvelle vérification de sa solvabilité. S’il ne le fait pas, le contrat de crédit est résilié de plein droit.

Lire aussi : Loi consommation : 8 millions de crédits renouvelables en sursis

Autre apport, également complémentaire de la loi Lagarde : la fin de la liaison, dans la grande distribution, entre l'usage de la fonction crédit de la carte du distributeur, et le bénéfice de certains avantages. « Lorsque le crédit renouvelable (…) est assorti d’une carte ouvrant droit à des avantages de toute nature, le bénéfice de ces avantages ne peut être subordonné au paiement à crédit », explique l’article 47 de la loi Hamon. Une brèche dans le modèle économique des filiales bancaires de la grande distribution, qui doit entrer en vigueur neuf mois après la promulgation de la loi.