Le Commissaire européen à la Concurrence Joaquin Almunia a mis en garde vendredi les banques et traders qui seraient impliqués dans le scandale des manipulations du taux interbancaire Libor, prévenant qu'en cas de faute avérée, ce serait une « sérieuse atteinte » à la concurrence.

« Si des pratiques collusives sont avérées, il s'agira d'une sérieuse atteinte au développement d'une concurrence saine sur les marchés financiers », a menacé vendredi à Paris Joaquin Almunia, selon une version de son discours distribuée à la presse. Cette sortie intervient au moment où certaines banques sont réticentes à engager des discussions avec les autorités européennes de la concurrence sur ce qu'elles considèrent comme des allégations infondées de mauvaise conduite, a indiqué de son côté le Financial Times.

La Commission européenne veut pourtant alourdir les amendes en cas de mauvaise conduite avérée dans ce scandale, selon le quotidien britannique. Les pénalités pourraient se monter à 10% du chiffre d'affaires pour chaque institution financière et monter jusqu'à 30% pour une banque qui serait reconnue coupable dans les trois volets de l'enquête de l'UE, selon le journal, citant des « sources proches du dossier ».

« Nous soupçonnons l'existence de cartels entre certains acteurs des marchés des produits dérivés -des banques, mais aussi des courtiers », a indiqué Joaquin Almunia dans son discours. Ces possibles accords « anticoncurrentiels » consistant à manipuler les taux pouvaient permettre aux participants de réaliser des bénéfices additionnels injustifiés sur leurs opérations de marché, a expliqué le Commissaire européen, sans toutefois donner de nom.

Au moins une douzaine de banques et de traders sont dans le viseur des enquêteurs européens, selon des documents et une enquête du FT. Jusqu'ici limitée à l'euro et au yen, les autorités européennes ont élargi leur enquête sur cette affaire à tous les instruments et produits financiers liés au franc-suisse et à la monnaie helvétique elle-même, a confirmé vendredi le commissaire européen.

Barclays, RBS et UBS déjà à l'amende

Les banques britanniques Barclays et Royal Bank of Scotland et la suisse UBS, ont déjà été condamnées à de lourdes amendes par les autorités britanniques et américaines pour avoir manipulé le taux interbancaire Libor, central dans le monde de la finance. Le scandale du Libor avait éclaté fin juin lorsque Barclays avait révélé qu'elle allait payer une amende de 290 millions de livres pour mettre fin aux enquêtes des régulateurs britannique et américain. Face à la vive polémique, son flamboyant directeur général, Bob Diamond, avait été poussé à la démission.

Contrairement aux Etats-Unis, qui passent des accords distincts avec certaines banques, « nous appréhendons les cartels en traitant de façon simultanée l'ensemble des acteurs impliqués. C'est la manière dont nous procédons si ces enquêtes confirment nos soupçons », a dit M. Almunia.