L’examen du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires débute aujourd’hui. Parmi les amendements présentés en commission, certains proposent une suppression pure et simple des commissions d’intervention, payées notamment par les clients des banques quand ils dépassent leur découvert autorisé. Une solution qui a toutefois peu de chances d’être retenue.

Réguler, voire interdire les commissions d’intervention ? Certains parlementaires y songent, alors que l’examen du projet de loi de séparation et de régulation bancaire débute aujourd’hui. Au sein de la commission des finances, qui a examiné le texte ces dernières semaines, des amendements ont été déposés en ce sens par des députés PS soucieux de « durcir » le volet « protection du consommateur bancaire » du texte gouvernemental.

Selon notre relevé de tarifs, ces commissions coûtent cher, très cher. Le montant moyen facturé par les banques à chaque fois qu’une opération débitrice place le compte d’un client en situation d’anomalie, notamment lorsque son autorisation de découvert est dépassée, est actuellement de 8,71 euros pièce (1). Mais au-delà du coût unitaire, le problème vient surtout de leur accumulation : les sommes payées par certains clients en difficulté peuvent atteindre plusieurs centaines d’euros par mois, les plafonds (journaliers, mensuels, parfois annuels) appliqués par les banques étant très variables, et surtout très élevés.

Que propose le texte gouvernemental pour y remédier ? La même chose, à peu près, que le rapport sur la tarification des services bancaires, remis en juillet 2010 à Christine Lagarde, à l’époque ministre de l’Economie du gouvernement Fillon : plafonner « pour les personnes fragiles » le montant de ces commissions.

La riposte des banques a déjà commencé

Les parlementaires de la majorité devraient toutefois aller un peu plus loin. Certains envisagent ainsi une suppression pure et simple des commissions d’intervention, en obligeant les banques à intégrer leur montant dans le calcul du taux effectif global (TEG) appliqué au découvert non autorisé. Ces députés reprennent ainsi la logique de plusieurs associations de consommateurs (INC, UFC, etc), qui jugent les commissions d’intervention illégales dans la mesure où, additionnées aux intérêts débiteurs, elles portent le coût total du découvert au-delà du taux de l’usure. Il serait toutefois étonnant de voir une solution aussi radicale être adoptée.

Car le gouvernement marche sur des oeufs. Les banques, par la voix de la Fédération bancaire française (FBF), ont d’ores et déjà déclenché la riposte. Dans un document de trois pages publié hier 11 février, l’association professionnelle a ainsi rappelé les efforts concédés ces dernières années en matière d’accès aux services bancaires, de prévention des incidents de paiement et de plafonnement des frais.

Dans un communiqué, elle a également mis la pression sur l’exécutif : « (…) un encadrement généralisé des commissions d’intervention se traduirait par une automatisation des traitements et une augmentation des rejets de paiements, ce qui serait pénalisant pour les consommateurs comme pour les commerçants. » Cité par le quotidien Les Echos, Jean-Paul Chifflet, patron du Crédit Agricole et de la FBF, se faisait encore plus précis, évoquant une menace pour « l’emploi dans les réseaux d’agences bancaires » et un risque d’augmentation des marges prises par les banques sur les crédits.

Des plafonds dépendant des revenus ?

Plutôt qu’une interdiction, les parlementaires vont donc probablement s’orienter vers une limitation des commissions d’intervention, en montant et en nombre. Un amendement propose ainsi un montant maximum de 5 euros par opération. Un autre suggère de plafonner à trois par mois les commissions d’intervention pouvant être facturées à un même client. Plusieurs amendements proposent également d’étendre les catégories bénéficiant de ces plafonds au-delà des seules populations fragiles, voire à l’ensemble de la clientèle bancaire.

Mais dans ce domaine, Karine Berger, rapporteure du projet de loi, reste prudente. « Il faudrait pouvoir adapter ce plafond de manière pragmatique, par exemple que son niveau soit lié aux revenus des clients », explique la députée PS, citée elle aussi par Les Echos. « Notre objectif, c’est de cibler les classes moyennes et populaires qui connaissent un coup dur. Mais nous serons très prudents : il faut éviter que les banques n’aient plus intérêt à intervenir ».

(1) Coût moyen au 1er janvier 2013 d’une commission d’intervention dans les banques nationales et les réseaux de banques régionales, y compris d'Outre-Mer.