Voici des réactions d'acteurs du monde économique et de politiciens après les mesures pour les entreprises annoncées par Jean-Marc Ayrault.

Le commissaire à l'Investissement Louis Gallois, auteur du rapport, estime que « le gouvernement a pris la mesure du problème » de compétitivité. « Ce qui me paraissait essentiel était de dire que la compétitivité était une priorité nationale et je pense que cette idée est passée, est reconnue », a expliqué l'ancien président d'EADS, jugeant le programme annoncé par le Premier ministre « extrêmement ambitieux ». Il a noté au passage que ce programme reprenait « d'assez nombreuses mesures » qu'il avait suggérées. « On pourrait les lister et je crois que la liste serait assez longue », a-t-il commenté. Louis Gallois regrette, cependant, que l'aide aux entreprises monte en puissance sur trois ans et non sur un ou deux comme il l'avait exhorté, il a rappelé que « la crainte des industriels, quand c'est un dispositif un peu étalé, est qu'on modifie pendant le cours de l'exécution ».

La Fédération française du bâtiment (FFB) a dénoncé dans un communiqué le relèvement du taux intermédiaire de TVA de 7% à 10% en 2014 : « Cette hausse pour les travaux d'entretien et de rénovation de logements est contraire à tous les engagements pris depuis des mois par le gouvernement et le président de la République, qui a même formellement démenti, le 19 octobre dernier, toute hypothèse de hausse de la TVA dans le bâtiment » regrette à la FFB. « Les clients vont se tourner vers les auto-entrepreneurs qui n'ont pas les mêmes charges que nous et qui ont une TVA à 0% », a déploré auprès de l'AFP Patrick Liébus, le président de la Capeb (Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment). Pour M. Liébus, « cela va avoir un impact direct sur l'emploi car on va élargir l'écart entre nous et les auto-entrepreneurs qui dissimulent souvent du travail au noir ».

Alain Bazot, président de l'association de consommateurs UFC-Que Choisir : « Il y a une belle occasion ratée de rendre enfin notre système de TVA un petit peu plus compréhensible, un petit peu plus intelligent », a déclaré Alain Bazot à l'AFP. « La logique de la TVA est devenue obsolète », a-t-il ajouté, estimant que le taux intermédiaire et le taux le plus réduit, censés bénéficier aux produits de première nécessité, étaient devenus « de grands fourre-tout ». Selon les annonces du gouvernement, la taxation des transports publics passera à 10% contre 7%, alors que l'on « veut favoriser leur utilisation », a-t-il souligné. A contrario, tous les aliments verront leur taux abaissé à 5%, qu'ils soient « sains » comme les fruits et légumes ou qu'il s'agisse de « barres chocolatés », relève-t-il.

L'association de consommateurs CLCV : pour l'association ces hausses de TVA « pénaliseront une fois encore les consommateurs les plus modestes (car elles ne sont pas progressives) » et risqueront « également d'affaiblir le pilier central de l'activité (consommation) à un moment où plus que jamais la croissance est en panne ».

Les réactions politiques

François Fillon, candidat à la présidence de l'UMP : « Le gouvernement nous annonce qu'il reprend une partie des propositions du rapport Gallois », a déclaré l'ancien Premier ministre lors d'une conférence de presse. « En n'en reprenant qu'une partie et en renvoyant à 2014 la partie essentielle, c'est-à-dire la baisse des charges sociales à travers un système très complexe de crédit d'impôts, il renonce au choc de compétitivité. Il n'y aura donc pas de choc de compétitivité et comme il n'y aura pas de choc de compétitivité, il n'y aura pas de redressement de l'économie française en 2013 », a-t-il affirmé, entouré de plusieurs de ses lieutenants. S'agissant de la hausse de la TVA, M. Fillon a ironisé sur le fait qu'après avoir abrogé la loi en ce sens en juillet, le gouvernement « nous explique qu'il va augmenter la TVA pour financer un crédit d'impôt qui permettrait de baisser les charges sociales en 2014 ». « Les socialistes sont aujourd'hui devant ce qui ressemble terriblement à un virage, à un renoncement des engagements vis-à-vis de leurs électeurs ».

Gilles Carrez, président de la commission des Finances à l'Assemblée nationale : Le gouvernement « reconnaît enfin qu'il y a un problème de compétitivité et de coût du travail, et que, pour baisser le coût du travail, il faut compenser avec la TVA. Tout cela va vraiment dans le bon sens, sauf que cela va à 180 degrés à l'inverse de ce qu'il nous disait il y a à peine quinze jours... Cherchez la cohérence ! », a dit M. Carrez à la presse dans les couloirs de l'Assemblée.

Le président de l'UDI, Jean-Louis Borloo : Les annonces du Premier ministre « tournent le dos au rapport Gallois qui préconisait un allégement tout de suite de 30 milliards de cotisations sociales. Ici, il n'y a rien pour fin 2012 et pour 2013 mais un crédit d'impôt pour 2014 d'un montant inconnu, de 5 à 7 milliards, peut-être 8 milliards, financé par de la TVA », a constaté l'ancien ministre de l'Ecologie lors d'un point presse. « Cette TVA qui était si critiquée devient une réponse et c'est tant mieux. Mais ce qui est surprenant, c'est que c'est pas la TVA à l'importation mais celle (la TVA intermédiaire, ndlr) qui touche les artisans notamment du secteur du bâtiment, ce qui est un peu dommage », a-t-il regretté.

La présidente du Front National, Marine Le Pen : « C'est le retour de la TVA sociale, ça n'était pas la peine de la critiquer tant. C'est une démonstration supplémentaire que lorsque nous dénonçons l'UMPS nous avons raison puisqu'ils ont exactement les mêmes idées et les mêmes solutions à apporter », a réagi Marine Le Pen, en marge d'une conférence de presse au siège du FN à Nanterre.

François Bayrou, président du MoDem : "Pourquoi en France ne peut-on jamais prendre des décisions simples, compréhensibles par tous et tranchées ?, s'est-il interrogé. "Au lieu d'une baisse claire et nette des charges, on a une proposition très difficile à comprendre, le crédit d'impôt lié à l'investissement", a constaté le leader centriste pour qui ce choix "pose des questions qui doivent dérouter les entreprises : quelles règles, quel contrôle et à quelle date les aides seront-elles mises à disposition ?".

Pierre Laurent, secrétaire national du PCF : « C'est un véritable coup de massue contre le pouvoir d'achat. Un choc oui, mais un choc avant tout pour celles et ceux qui, six mois après la défaite de Nicolas Sarkozy jour pour jour, attendaient autre chose que cette nouvelle cure d'austérité », déclare Pierre Laurent dans un communiqué. « Au contraire, le PCF préconise la baisse des charges financières d'intérêts et des dividendes qui étouffent le système productif français », ajoute le secrétaire national du PCF.

Le rapporteur général du Budget, Christian Eckert (PS) : Interrogé sur la modification des trois taux de TVA, ce député de Meurthe-et-Moselle a déclaré que « certes, globalement, on demandera plus de contribution aux Français sous cette forme, mais en 2014. On se donne le temps pour préparer les choses », a-t-il dit. « Il ne s'agit pas de la TVA sociale » a insisté M. Eckert. « On demandera 5 à 6 milliards (d'euros ndlr), il y en avait 12 du côté de Sarkozy. On ne touche pas aux cotisations sociales, on ne touche pas aux régimes sociaux », a-t-il martelé. « Là, c'est dans un plan d'ensemble », a-t-il encore argumenté.

Henri Emmanuelli, député socialiste des Landes : « Je reste dubitatif. Pourquoi est-ce que cela concerne toutes les entreprises alors qu'il y en a d'impactées par la mondialisation (ayant) un problème de compétitivité et d'autres pas, dans la banque ou l'assurance ou la distribution ? Le ciblage me paraît trop large », a-t-il dit à la presse dans les couloirs de l'Assemblée nationale.

André Chassaigne, chef de file des députés du Front de gauche : « Ces mesures considèrent qu'il faut financer l'investissement du privé de façon prioritaire mais au détriment de l'investissement public », a-t-il déploré, « on fait l'impasse complète sur le coût du capital, les prélèvements financiers des entreprises c'est-à-dire les intérêts, les dividendes aux actionnaires ». Concernant les relèvements de taux de TVA, M. Chassaigne a estimé cela « très, très injuste », dénonçant « une atteinte au pouvoir d'achat ». « Quant à porter le taux de 7% à 10%, cela va toucher le bâtiment, le logement (...) c'est, pour développer la compétitivité industrielle, porter un coup à un autre secteur de notre économie », a-t-il dit.

Jean-Luc Mélenchon, co-président du Parti de gauche : « Je trouve cela lamentable parce que c'est la poursuite de la même politique qui ne fonctionne pas », a déclaré Jean-Luc Mélenchon sur TV5Monde. « Nous avons battu M. Sarkozy mais ce n'était pas une affaire personnelle. On voulait une rupture avec une politique. Imaginez la tête qu'on fait maintenant quand on découvre qu'on s'est débarrassé de l'homme mais qu'on a gardé la politique », a-t-il déclaré.

Roger-Gérard Schwartzenberg, patron des députés du Parti Radical de Gauche : « Il y a quatre mois, la loi de finances rectificative pour 2012, présentée par le gouvernement, a abrogé la TVA sociale conçue par M. Sarkozy. Il est donc insolite de voir le gouvernement proposer une majoration du taux normal de TVA (de 19,6% à 20%) et de son taux intermédiaire (de 7% à 10%) », a déclaré Roger-Gérard Schwartzenberg dans un communiqué. « D'une manière générale, il serait préférable d'éviter de prendre le contre-pied des mesures annoncées aux électeurs pendant les campagnes présidentielle et législative », a conclu cet élu du Val de Marne.

Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA): "Pas de surprise. Le gouvernement a décidé pour l'essentiel de faire du rapport Gallois sa feuille de route pour répondre aux exigences du Medef (...) Face à ces mesures, il n'y a qu'une attitude conséquente à avoir : l'opposition déterminée. On ne peut plus jouer de l'ambiguïté - être ou ne pas être dans la majorité - ou faire preuve d'attentisme" (communiqué)

Nathalie Arthaud, porte-parole de Lutte ouvrière : "C'est Noël en novembre pour le patronat ! (...) Pour financer son cadeau au patronat, le gouvernement piétine sans vergogne son engagement de ne pas augmenter la TVA. Mais si cette TVA était injuste sous Sarkozy, elle le reste avec Hollande ! Les travailleurs vont payer à double titre : par l'augmentation de la TVA et par la réduction des dépenses publiques qui va encore dégrader les hôpitaux, l'éducation, les transports et priver les collectivités de ressources indispensables pour la population (communiqué).