Le système de rémunération des conseillers bancaires est encore mystérieux pour le grand public. Les chargés de clientèle sont-ils commissionnés ? Ont-ils des intérêts financiers à proposer un produit plutôt qu’un autre ? Dans son édition de novembre, le magazine 60 millions de consommateurs publie une enquête éclairante sur les pratiques des banques en la matière.

L’équipe du magazine a contacté huit grandes banques françaises afin de connaître le système de rémunération de leurs conseillers. Les réponses des directions, pas toujours très transparentes, sont complétées par des visites de « clients mystères » dans 180 agences, partout en France. Tous les enquêteurs ont ainsi demandé à leur conseiller : « Êtes-vous commissionné sur le produit que vous me vendez ? » Là encore, les réponses restent souvent vagues, voire contradictoires.

Une rémunération en partie variable

L’article de 60 millions de consommateurs rappelle que « la part variable de la rémunération d’un conseiller ne serait que de 8 à 9% en moyenne ». Un chiffre qui ne se vérifie pas toujours. La direction du Crédit Agricole a indiqué au magazine que « les salariés en contact avec les clients touchent une part variable, représentant en moyenne 14,5% de leur rémunération ». Toutefois, la banque verte assure qu’il ne s'agit pas de commissionnement à l’acte mais d'une part variable basée sur un « objectif collectif par famille de produits ». Une formule confirmée par les conseillers en agence : l’un a notamment confié à un enquêteur qu’il avait « par exemple, un quota d’obligations à dix ans à placer ; cela fait partie des objectifs, mais c’est toujours pour l’agence, ce n’est pas individuel ». La part variable semble également dépendre de la satisfaction des clients, qui notent tous les ans leur conseiller, et du nombre de clients reçus en entretien.

Les Banques populaires et Caisses d’épargne ont un système de rémunération qui se rapproche de celui du Crédit Agricole. Officiellement, les deux réseaux proposent à leurs chargés de clientèle des rémunérations avec part variable plafonnée à 12%, et jusqu'à 15% pour les directeurs d’agence. Dans les faits, la part variable moyenne est de 7% dans les Caisses d’épargne et de seulement 3% dans les Banques populaires. Toujours selon la direction du groupe, « aucune rémunération à l’acte n’est autorisée » : la fidélité et la satisfaction des clients seraient privilégiées au volume des ventes. Toutes ces informations sont toutefois difficilement confirmées en agence par les conseillers qui parlent de commissions, mais pas à l’acte de vente, ou d’objectifs commerciaux individuels et au niveau de l’agence.

Des commissions qui n’en portent pas toujours le nom

A la Société Générale aussi, « les salaires sont composés d’une part fixe et d’une part variable » révèle 60 millions de consommateurs. Officiellement, la banque précise que la part variable, plafonnée à 15%, dépend « des performances commerciales, de l’engagement en matière de qualité et de la satisfaction client ». Seules les performances commerciales sont pourtant évoquées aux enquêteurs par les conseillers. Ces derniers, bien souvent, jouent sur les mots. « Nous ne sommes pas commissionnés sur des placements, nous avons juste un budget à réaliser annuellement » ont confié certains chargés de clientèle.

BNP-Paribas admet commissionner ses conseillers tout en précisant que « les actes doivent être réalisés dans le respect de la primauté du client ». Dans les faits, le client semble passer après les chiffres. Une conseillère a affirmé à un enquêteur de 60 millions de consommateurs être commissionnée selon un système de points : « Actuellement, le point est à 8 centimes. Un Livret A me rapporte dix points et une assurance-vie dix fois plus » précise la chargée de clientèle.

Zéro commission : un argument de vente

A l’inverse, certaines banques clament haut et fort ne pas commissionner leurs conseillers et en font même un argument de vente. C’est le cas du Crédit Mutuel dont les salariés bénéficient simplement d’une participation aux bénéfices de l’entreprise, selon la direction du groupe. Sur le terrain, les enquêteurs du mensuel regrettent une trop grande discrétion des conseillers sur le sujet ce qui les pousse à soupçonner un système de rémunération variable.

Les chargés de clientèle de la Banque Postale sont, eux aussi, restés très discrets sur la question de leur rémunération. L’enquête du magazine ne relaie donc seulement le discours officiel, qui assure que les conseillers ne sont pas commissionnés et qu’ils n’ont pas d’objectif chiffré. Toutefois, ils reçoivent en fin d’année « une prime qui dépend de la mise en œuvre de leur contrat de performance ».

Du côté de LCL et de HSBC, c’est le mutisme total. Le magazine n’a obtenu aucune information officielle de la part des deux banques. Sur le terrain, les enquêteurs ont pu obtenir quelques informations : les conseillers de LCL auraient une part variable de 20%, basée sur des objectifs à atteindre. Ceux de HSBC auraient une part variable sur le chiffre d’affaires de leur agence. Mais tout cela reste trop opaque pour savoir exactement sur quels critères repose leur système de rémunération. Globalement, toutes les banques rechignent encore à communiquer sur les salaires de leurs employés.

Mise à jour (31/10/2012) - Suite à la publication de cet article, LCL nous a contacté et nous a informé que 60 millions de consommateurs ne leur avait pas envoyé de questionnaire, c'est pourquoi la banque n'a pas répondu aux questions du magazine. Le mensuel publiera un erratum dans son prochain numéro.