Dévoilé vendredi dernier, le projet de loi de finances pour 2013 modifie la manière dont les produits de placement à revenu fixe - intérêts des livrets d’épargne, des plans épargne logement (après leur 12 ans) ou des comptes à terme - vont être soumis à l’impôt. Le point sur les gagnants et les perdants de la réforme à venir, qui épargne pour l’instant l’assurance-vie et le plan d’épargne en actions (PEA).

Aligner la fiscalité des revenus du capital sur celle du travail : c’est le cadre général dans lequel s’est placé le gouvernement pour concevoir le budget 2013. Pour y parvenir, le projet de loi de finances pour 2013 prévoit notamment de faire de l’imposition des intérêts au barème progressif de l’impôt sur le revenu (IR) la règle, là où précédemment les épargnants avaient la possibilité d’opter pour le prélèvement forfaitaire libératoire (PFL).

Ce dernier, toutefois, ne disparaît pas totalement. Il se transforme, selon les termes utilisés par Bercy, en « acompte, prélevé à la source, au taux de (…) 24% sur les intérêts ». Pourquoi un tel dispositif ? L’explication est assez simple : là où le PFL est prélevé à la source, c’est-à-dire au moment de l’inscription en compte des intérêts, intégrer ces derniers aux revenus imposables reviendrait à décaler à l’année suivante la recette fiscale attendue. Pour éviter de subir ce « trou » de recettes, le gouvernement a donc transformé le PFL en avance sur les impôts à venir. Un « tour de passe-passe » sur lequel le gouvernement compte s’appuyer pour rendre la nouvelle règle applicable dès 2012 - y compris pour les épargnants qui ont déjà opté pour le PFL - mais que les débats parlementaires et le Conseil constitutionnel devront encore confirmer.

Tous les contribuables, toutefois, ne seront pas concernés au même titre. D’abord, les foyers fiscaux dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 50.000 euros pourront être dispensés de payer l’acompte, à la condition d’en faire la demande. Leurs revenus de placements seront alors seulement déclarés à l’IR, comme actuellement.

Ensuite, l'acompte de prélèvement forfaitaire de 24% conservera un caractère libératoire, toujours pour les contribuables qui le demandent, s’ils perçoivent moins de 2.000 euros d’intérêts dans l’année - soit l’équivalent des intérêts générés par un placement de 100.000 euros rémunéré à 2% brut. Ceux-là n’auront pas de solde à régler l’année suivante, quelle que soit leur tranche d’imposition. Dans les faits, seuls les foyers fiscaux dont le taux marginal d’imposition (TMI) est à 30% ou plus auront un avantage à utiliser ce système.

Enfin, ultime subtilité, les contribuables qui déclareront leurs intérêts à l’IR continueront en 2013 à profiter d’une déductibilité partielle de la CSG, mais avec un taux en repli : 5,1%, contre 5,8% actuellement.

Peu de gagnants, quelques perdants

Dans sa communication, le gouvernement argumente sur les « effets favorables pour les ménages aux revenus les plus modestes qui optent parfois pour le prélèvement forfaitaire libératoire alors que le barème progressif leur serait plus favorable. » C’est vrai. Mais en dehors de ce cas particulier, qui va profiter de la réforme ? Et qui va y perdre ?

Les nouvelles règles ne changent rien ou presque pour les ménages non imposables ou dont le taux marginal d’imposition est de 5,5% ou 14% et qui utilisaient déjà la solution la plus avantageuse pour eux, à savoir l’intégration à l’IR. Seule la baisse du taux de déductibilité de la CSG les touche, mais de manière très modérée : moins d'un euro d’impôt supplémentaire pour 1.000 euros d’intérêts.

Pour les autres tranches d’imposition, à 30%, 41% et 45% (soit pour les contribuables déclarant plus de 26.420 euros de revenus imposables par part), deux cas de figure. S’ils touchent moins de 2.000 euros d’intérêts annuels, ils continueront à profiter du caractère libératoire du prélèvement forfaitaire de 24%. Statu quo, donc.

Les autres, par contre, supporteront une fiscalité alourdie, à la mesure de leurs revenus. Exemple pour un couple avec deux enfants qui déclarerait 85.000 euros de revenus d’activité, plus 3.000 euros d’intérêts annuels. En optant pour le PFL, cette famille, dont le TMI est de 30%, doit en 2012 s’acquitter de 7.865 euros d’impôts, dont 720 euros au titre du PFL. Soit un taux moyen d’imposition de 9,89%. En se projetant en 2013, après la réforme, l’impôt de cette famille, qui devra alors intégrer ces intérêts à l’IR, s’élèverait à 7.999 euros, pour un taux moyen d’imposition de 10,08% (*).

La différence est plus significative dans le cas d’un autre couple, deux enfants également, qui déclare lui 260.000 euros de revenus d’activité, plus 40.000 euros d’intérêts. En 2012, en optant pour le PFL, la famille règle 74.908 euros d’impôts, dont 9.600 euros au titre du PFL, pour un taux moyen d’imposition de 27,15%. En 2013, avec l’intégration à l’IR, ce montant passe à 80.872 euros, pour un taux de 29,54%.

(*) Pour les besoins de la comparaison, nous n’avons pas pris en compte les effets de l’abaissement du plafonnement de 2.336 à 2.000 euros par demi-part de l’avantage procuré par le quotient familial, également prévu par le projet de loi de finances 2013.