Hier soir, à l’occasion du débat d’entre-deux-tours, François Hollande et Nicolas Sarkozy, les deux candidats en lice pour la présidence de la République, ont notamment marqué leurs différences sur les questions de fiscalité.

La TVA sociale

La TVA sociale, déjà votée par le Parlement, doit entrer en vigueur en octobre prochain en cas de victoire de Nicolas Sarkozy dimanche. Le candidat socialiste, de son côté, a répété son intention d’abroger la mesure, estimant qu'elle allait peser sur le pouvoir d'achat des Français et « dégrader la croissance ».

Selon lui, les 13 milliards d'euros d'allégements de cotisations patronales financés par une hausse de la TVA de 19,6% à 21,2% et une augmentation de la CSG sur les revenus du capital représenteront « 300 euros de moins sur le pouvoir d'achat ». L'industrie ne touchera d'après lui que 3 milliards de ces baisses de cotisations contre 8 milliards pour les services, dont 700 millions pour les banques. « Vous inventez une taxe nouvelle sur les Français (...) pour avoir un effet sur les entreprises industrielles de très faible ampleur et donner un cadeau supplémentaire aux entreprises de services, allez comprendre ! », a martelé le candidat socialiste.

Pour défendre sa mesure, Nicolas Sarkozy a évoqué l’exemple allemand. « L'Allemagne a fait la TVA antidélocalisation que je propose, trois points, vous la refusez », a lancé le candidat de l'UMP à son adversaire. « Ce n'est pas vrai », lui a répondu François Hollande, « la TVA antidélocalisation en Allemagne n'a été que d'un point ».

« L'Allemagne a fait la TVA antidélocalisation de trois points et elle en a affecté un point aux réductions de charges et les autres à la réduction du déficit », a alors complété Nicolas Sarkozy. Le 1er janvier 2007, Berlin a en effet relevé son taux normal de TVA de 16% à 19%, un seul point toutefois étant affecté à la baisse des charges patronales, dans l'intention de combattre les délocalisations, le reste allant tout simplement au budget de l'Etat. « L'Allemagne a fait le contraire de la politique que vous proposez aux Français », a insisté le candidat de l'UMP.

La défiscalisation des heures supplémentaires

Parmi les mesures de son bilan défendues par Nicolas Sarkozy, le président sortant a insisté sur les heures supplémentaires défiscalisées. « [Elles] ont augmenté le pouvoir d'achat. L'une des mesures de M. Hollande c'est de supprimer cela », a déclaré le candidat de l'UMP après avoir déclaré que « 9 millions de salariés, 9 millions, ont touché des heures supplémentaires malgré la crise l'année dernière. C'est presque 500 euros en moyenne de pouvoir d'achat en plus ».

Pour augmenter le pouvoir d'achat, le candidat socialiste avait auparavant répété sa volonté « que les salaires puissent être liés à la croissance », expliquant qu'il indexerait le Smic « non seulement sur les prix mais sur une part de la croissance », « chaque fois que la croissance s'élèvera, le Smic sera réajusté ».

Les prélèvements obligatoires

Autre passe d’armes, celle concernant le niveau des prélèvements obligatoires, le candidat socialiste accusant le sortant de porter la responsabilité du taux français, le deuxième plus élevé des pays de l'OCDE derrière la Suède, que ce dernier venait de présenter comme un handicap.

« Vous êtes conscient que nous sommes dans un monde ouvert (...) et que nous avons les impôts les plus élevés d'Europe avec la Suède », a ainsi constaté le candidat de l'UMP. « Vous aviez annoncé en 2007 que vous baisseriez le niveau des prélèvements obligatoires de 4 points. De combien ont-il augmenté durant votre quinquennat ? », interroge alors François Hollande. « Monsieur Hollande, je n'ai pas à répondre à votre question », esquive le président-candidat en expliquant vouloir continuer à développer son raisonnement. « Alors, je vais répondre pour vous », lance François Hollande : « vous avez augmenté les prélèvements obligatoires de près d'un point et demi. Nous sommes maintenant à plus de 44% de prélèvements. C'est vous qui êtes au pouvoir, alors, quand vous dites : c'est terrible, nous avons l'un des niveaux de prélèvements les plus élevés au monde. Ce n'est pas à moi qu'il faut en faire la remarque, c'est à vous ».

Le débat s’est ensuite orienté vers les couches de la population concernées par ces augmentations. « M. Hollande, face à la crise, pour réduire notre déficit, diminuer notre endettement, j'ai dû prendre des décisions qui ont conduit à renforcer l'imposition des plus riches », a ainsi justifié Nicolas Sarkozy. « Non », a contesté le candidat socialiste, « pas des plus riches, des plus modestes. Vous avez augmenté les impôts de tous les Français et baissé ceux des plus privilégiés ».

Le bouclier fiscal

Parmi les éléments du bilan fiscal du dernier quinquennat, François Hollande a attaqué Nicolas Sarkozy sur le bouclier fiscal, mesure adoptée à l’été 2007 par la majorité.

« Vous avez été capables de faire le bouclier fiscal et donc de permettre que les plus fortunés contribuables reçoivent un chèque du Trésor chaque année. Je ne veux pas citer les noms, vous les connaissez, ce sont de vos proches », a déclaré le candidat socialiste. « Lesquels proches, M. Hollande ? », a demandé le candidat de l'UMP. « Vous savez que Mme Bettencourt a été notamment bénéficiaire », a répondu le député de Corrèze à propos de l'héritière de l'Oréal. « M. Perdriel, M. Levy, M. Pigasse », a énuméré Nicolas Sarkozy, à propos du fondateur du Nouvel Observateur Claude Perdriel, du président de Publicis Maurice Levy et du directeur délégué de la banque Lazard France, Matthieu Pigasse, trois patrons plutôt classés à gauche. « Si vous avez des informations sur ce qu'ils ont reçu, moi je n'en ai pas », a répliqué François Hollande.

Sur le réseau social Twitter, Mathieu Pigasse a  immédiatement démenti : « mensonge et calomnie : je n'ai jamais bénéficié du bouclier fiscal ».