La France et la Suisse ont évoqué jeudi leur coopération fiscale mais Paris a fermé la porte pour l'instant à un accord similaire aux textes, controversés, conclus par Londres et Berlin avec Berne, a-t-on appris auprès du ministère français des Finances.

« On a dit à la Suisse que les conditions n'étaient pas réunies pour engager des discussions sur ce type d'accord », a-t-on déclaré à l'AFP à l'issue d'une rencontre à Paris entre le ministre français François Baroin et son homologue suisse Eveline Widmer-Schlumpf.

Accord avec l'Allemagne et le Royaume-Uni

L'Allemagne et le Royaume-Uni ont signé cette année des accords qui prévoient que les personnes domiciliées dans ces pays peuvent régulariser leurs relations bancaires en Suisse, en acquittant un impôt supplémentaire unique ou en révélant leurs comptes. Ces textes permettent aux Allemands et aux Britanniques concernés de conserver l'anonymat à condition de se mettre en règle avec le fisc, ce qui va à l'encontre de la politique européenne de lutte contre le secret bancaire.

Fin août, la France avait dit avoir « une attitude ouverte » vis-à-vis de ces accords mais qu'elle refuserait de signer un traité qui ne respecterait pas la lutte contre la fraude.

Les deux ministres ont aussi fait le point sur l'application de la convention de double imposition en vigueur depuis le début de l'année entre leurs pays, qui permet notamment l'échange d'informations bancaires en cas de soupçon d'évasion fiscale, selon un communiqué du département fédéral suisse des Finances. « Il y a encore quelques calages à faire sur des interprétations divergentes du texte. Nous avons mis en place un comité de suivi technique pour lever ces incompréhensions », a-t-on affirmé côté français.

Mme Widmer-Schlumpf a « souligné la volonté de la Suisse de collaborer avec la France dans le cadre des accords négociés, ainsi que les importants efforts déployés par la Suisse pour appliquer les standards de l'OCDE », selon son communiqué. La Suisse fait partie des pays épinglés par le forum fiscal mondial, sous la houlette de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), pour ne pas respecter totalement les normes internationales.

Les propos de Sarkozy peu appréciés

Berne n'a pas apprécié les propos du président français Nicolas Sarkozy, au G20 à Cannes début novembre, lorsqu'il avait dénoncé les « déficiences » dans les efforts de la Confédération pour ne plus être considérée comme un paradis fiscal. Mme Widmer-Schlumpf a ainsi « exprimé son étonnement au sujet des dernières critiques françaises à l'égard de la collaboration de la Suisse en matière fiscale ». Suite aux remarques du chef de l'Etat français, la présidente suisse Micheline Calmy-Rey avait affirmé à la télévision helvétique que « Nicolas Sarkozy a probablement un problème avec nous, je ne sais pas lequel ».

La présidente avait indiqué avoir convoqué l'ambassadeur de France à Berne, pour lui signifier le « mécontentement » de la Suisse quant à « cette manière de faire ». Par ailleurs, Mme Widmer-Schlumpf a « fait part à son homologue français de l'intérêt de la Suisse à trouver une solution durable à la crise de l'endettement dans la zone euro », soulignant la contribution de la Confédération aux programmes d'assistance financière à l'égard des pays très endettés de la zone euro.