Chouchous des banques traditionnelles, les jeunes primo-accédants bénéficient de conditions avantageuses lorsqu’ils sollicitent un emprunt immobilier : taux plus faible que leurs aînés et surtout davantage de souplesse quant à l’apport personnel. Qu’en est-il des Boursorama, ING et autres Fortuneo ? Leur offre de prêt s’adapte-t-elle aux jeunes actifs ?

Les banques traditionnelles ont le béguin pour les moins de 35 ans. En effet, comme le soulignait récemment Sandrine Allonier, porte-parole du courtier Vousfinancer : « Les jeunes actifs sont très courtisés par les banques car ils ne sont pas encore bancarisés. Ils n’ont pas encore noué de relation à long terme avec une enseigne », résume-t-elle. Pour les établissements bancaires, le financement de leur résidence principale est l’occasion d’attirer ces jeunes. Pour ce faire, les banques sont prêtes à casser les prix en proposant notamment des décotes de taux importantes. Mais ce n’est pas la seule concession faite aux jeunes.

La différence de traitement concerne également, voire surtout, l’apport personnel. C’est-à-dire l’épargne que l’emprunteur utilise pour financer son achat immobilier. « A 25 ans, lorsque vous venez de rentrer dans la vie active, la banque peut comprendre que vous n’ayez pas mis de côté les 10% d’apport nécessaires à l’achat. Par contre, si à 40 ans, vous n’êtes pas capable d’avoir 15 000 euros de côté, la banque va tiquer », observe Sandrine Allonier. Sans apport, le crédit immobilier est nommé dans le jargon bancaire « prêt à 110% », car outre l’achat du logement, l’emprunteur finance également à crédit les frais annexes comme les frais de notaire (en moyenne 7% du prix du bien), de garantie (de 1 à 4%) et les éventuels frais d’agence (5%). Il est donc un argument fréquemment mis en avant par les banques traditionnelles pour séduire les jeunes. En revanche les banques en ligne, à l’exception de Boursorama, ne peuvent pas utiliser cet argument commercial.

L’apport personnel, une condition sine qua non à l’obtention d’un prêt

L'apport doit au moins couvrir les frais de notaire, de cautionnement et d'agence

Chez ING, BforBank et Fortuneo, l’apport est en effet une condition sine qua non à l’obtention d’un prêt immobilier. « Chez nous, le montant du crédit ne peut pas aller au-delà de 100% du montant du bien. Cela signifie que le client doit disposer d’un apport personnel au moins égal aux frais inhérents à l’acquisition, tels que les frais de notaire et les frais de garantie », explique ainsi Lenhard Hubscher, responsable du crédit d’ING. BforBank, qui n’a pas répondu à nos sollicitations, adopte la même politique. Sur son site, la banque explique aussi que l’emprunteur doit financer de sa poche les frais annexes (notaire, garantie…). Chez Fortuneo, la contrainte apparait encore plus stricte, en exigeant un montant fixe, au moins égal à 10% du prix du logement, et qui doit couvrir l’intégralité des frais annexes. Pour le client, il est impossible de passer outre ces conditions. Même si celui-ci est un profil à potentiel, aucune marge de négociation n’est possible, comme l’indique chacune des enseignes interrogées. « L’avantage d’une banque en ligne, c’est la transparence. Les conditions indiquées sur le site, notamment le taux d’intérêt, sont celles proposées », explique par exemple Gregory Guermonprez, le directeur de Fortuneo.

Pour justifier cette politique moins souple que dans les banques avec agences, les enseignes en ligne mettent en avant la précaution d’usage. « « Notre rôle et notre responsabilité vis-à-vis de nos clients nous imposent de nous assurer que leur emprunt correspond à leur situation personnelle, notamment à leur capacité de financement », souligne Lenhard Hubscher d’ING. « Bien que le crédit sans apport semble être une solution pour les primo-accédants, chez ING, nous estimons qu’il représente un risque et représente un coût élevé pour l’emprunteur surtout s’il doit déménager quelques années seulement après son achat immobilier », ajoute-t-il. En pratique, effectivement, si l’emprunteur est rapidement amené à changer de résidence, il devra de nouveau payer des frais fixes, alors même qu’il n’a pas encore amorti les précédents. Pour la porte-parole de Vousfinancer, c’est également la gestion interne du risque qui incite les banques en ligne à demander un apport minimum. « Comme elles se sont lancées plus tardivement sur le crédit immobilier, je pense qu’elles sont plus attentives au risque et se faisant proposent une offre plus standardisée », analyse Sandrine Allonier.

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Une clientèle cible plus haut de gamme

ING et Fortuneo assurent toutefois que cette différence par rapport aux banques traditionnelles ne les empêche pas de séduire de jeunes primo-accédants. Gregory Guermonprez souligne ainsi qu’un tiers des emprunteurs chez Fortuneo a moins de 35 ans et que 20% gagnent moins de 2 000 euros. Néanmoins, les personnes passant par Fortuneo s’avèrent en moyenne plus âgées que les clients des courtiers. L’emprunteur moyen de Fortuneo, qu’il soit primo-accédant ou non, est âgé de 39 ans, contre 36 ans pour Meilleurtaux par exemple.

L'offre d'ING semble, elle, davantage séduire les profils premium. Pour preuve, les primo-accédants, qui représentent 1 emprunteur sur 4, apportent en moyenne 69 000 euros. A titre de comparaison, l'apport moyen des primo-accédants passant par Meilleurtaux atteint 13 000 euros, soit 5 fois moins que chez ING. « En fait, les banques en ligne ciblent une clientèle certes jeune mais plutôt haut de gamme », constate à ce propos Sandrine Allonier de Vousfinancer. Boursorama, avec plus de la moitié des emprunteurs âgés de moins de 36 ans, semble toutefois échapper à cette logique.

L’exception, sous condition, de Boursorama

Pour attirer les primo-accédants, ING met en avant la transférabilité de son crédit

Boursorama Banque a en effet récemment assoupli ses conditions de financement. Comme ses concurrentes, au lancement de son offre, Boursorama imposait à ses clients qu’ils prennent en charge au moins les frais de notaire. Mais désormais, la banque en ligne accepte les demandes où l’apport est insuffisant pour couvrir ces charges, détaille Xavier Prin, son directeur marketing et portail. Boursorama limite toutefois ses crédits sans apport aux prêts qui n'excèdent pas 20 ans.

Pour expliquer ce changement de politique, Xavier Prin pointe l’évolution de la clientèle de Boursorama : « Désormais, la moitié de nos nouveaux clients a moins de 30 ans [clients ayant un compte courant, ndlr]. Il faut donc logiquement que notre offre s'adapte au rajeunissement de notre clientèle », souligne-t-il. Capter davantage de jeunes actifs a également motivé ce changement. « Avec le succès des offres Kador et Welcome, Boursorama est clairement devenue une banque pour tous les publics. Les jeunes actifs disposent certes de peu d’épargne mais ce sont les clients à potentiel de demain », ajoute le directeur marketing et portail de Boursorama.

Pour attirer les jeunes, les autres banques en ligne mettent l’accent sur les spécificités de leurs crédits. « L’offre d’ING intègre d’autres éléments qui s’adressent spécifiquement aux jeunes emprunteurs, comme la transférabilité du crédit immobilier. Véritable avantage, cette clause est rarement proposée par les banques françaises », détaille ainsi Lenhard Hubscher, responsable du crédit chez ING. Cette disposition permet à une personne devant déménager, alors qu’elle n’a pas terminé de rembourser son prêt, d’utiliser le montant restant dû pour financer l’achat de sa nouvelle résidence principale. Se faisant, elle conserve les conditions de financement qu’ING lui avait consenties quelques années auparavant.

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