C’est la mesure emblématique du nouveau gouvernement pour les produits d’épargne : simplifier la fiscalité en leur appliquant une flat tax dès 2018. Comment fonctionnera ce prélèvement forfaitaire unique ? Qui concernera-t-il ? Explications en 5 points.

1 – Un prélèvement global de 30%

Jusqu’à présent, les revenus du capital font l’objet d’une double contribution : l’impôt sur le revenu d’une part, les cotisations sociales (CSG, CRDS, etc.) d’autre part. A ce jour, le taux de cotisations sociales est de 15,50%. Pour l’impôt sur le revenu, le barème progressif de 0% à 45% en fonction du niveau de revenus s’applique, sauf pour certains cas particuliers de taux forfaitaires.

A partir de 2018, les épargnants entrent dans l’ère du prélèvement forfaitaire unique (PFU). Dans une logique de pédagogie, le gouvernement le présente comme un « taux unique à 30% ». Dans les faits, le double prélèvement perdure. Avec la hausse de la CSG, les cotisations sociales passent à 17,20%. S’y ajoute un taux forfaitaire d’impôt sur le revenu de 12,80%. Le PFU est donc la somme de ces cotisations sociales et fiscales, pour atteindre un total de 30%.

Pourquoi ce changement ?

Emmanuel Macron a annoncé dès février 2017 qu'il souhaitait créer un « prélèvement forfaitaire unique au taux de l’ordre de 30% ». Objectif : cette « réforme globale » rapprochera « la France de la moyenne européenne et simplifiera considérablement la fiscalité du capital », expliquait-il dans Les Echos, en pleine campagne.

Difficile de comparer précisément l'imposition du capital en Europe, la faute à de trop nombreuses particularités. Dans le dossier de presse du budget 2018, Bercy pointe toutefois l'écart entre la France et ses voisins : le taux global de taxation des intérêts avoisine les 60%, pour les plus aisés et hors régime spécifique, alors qu’il existe un taux fixe à 26% pour les intérêts en Italie, ou 26,4% en Allemagne pour tous les revenus du capital.

En contrepartie, le gouvernement compte taxer un peu plus fortement la « rente immobilière » et les plus gros contrats d'assurance-vie.

2 – Un prélèvement effectué par défaut

Le ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire l’avait annoncé début septembre, le PFU sera optionnel : « Les contribuables pourront toujours choisir l’imposition au barème, si c’est plus avantageux pour eux. » La flat tax constituera toutefois le mode d’imposition par défaut : les contribuables souhaitant être imposés au barème devront en faire la demande. Le gouvernement présente d’ailleurs le PFU comme un « taux forfaitaire de droit commun » dans les motivations du projet de loi.

Plus concrètement, les modalités de perception restent globalement les mêmes qu’aujourd’hui, mais les taux évoluent. Les cotisations sociales seront toujours prélevées à la source sur les intérêts, mais à hauteur de 17,20% au lieu de 15,50%. En parallèle, toujours sur les intérêts, un prélèvement forfaitaire d’impôt sur le revenu sera effectué à la source, à hauteur de 12,80%. Ce dernier remplace l’actuel acompte fiscal (21% sur les intérêts, 24% sur les dividendes). Comme aujourd’hui, les contribuables les plus modestes pourront bénéficier d’une dispense en en faisant la demande en amont. Et l’imposition définitive sera établie au moment de la déclaration d’impôt sur le revenu.

Le principal changement par rapport au fonctionnement actuel, c’est que le taux forfaitaire de 12,80% constituera par défaut un plafond d’imposition pour les revenus du patrimoine. Un taux bien plus avantageux que le barème de l’impôt sur le revenu qui constituait jusqu’à présent la règle générale.

3 – Une option rentable pour tous les foyers imposables

Qui aura intérêt à choisir l’option d’imposition au barème ? Le schéma apparaît relativement simple : avec un PFU à 30%, seuls les foyers non-imposables auront intérêt à opter pour le barème de l’impôt sur le revenu (IRPP).

Taux net d'imposition selon l'option choisie
Taux marginal d'imposition (TMI)Imposition à l'IRPP¹Option au PFU
0%17,20%30%
14%30,25%30%
30%45,16%30%
41%55,41%30%
45%59,14%30%
¹ taux d'impôt sur le revenu + 17,2% de cotisations sociales - 6,8% de CSG déductible.

A contrario, pour tous les foyers imposables, le PFU sera plus avantageux. Cela paraît évident pour les contribuables dont le taux marginal d’imposition (TMI) est élevé (30%, 41% ou 45%), mais cette règle est aussi valable pour les foyers de la première tranche imposable (TMI de 14%). Comme le montre le tableau ci-dessus, l’imposition au barème, avec les cotisations sociales, grimpe à 30,25% pour les foyers figurant dans cette tranche.

La CSG déductible passe à 6,80%

Actuellement, au sein des 15,50% de cotisations sociales, une part de 5,10 point est déductible des revenus imposables. A Bercy, la balance penchait pour que le 1,7 point de CSG supplémentaire soit déductible lorsqu'il porte sur les revenus du travail, mais pas lorsqu'il s'applique aux revenus du capital. Après une amorce de polémique, le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin a confirmé, sur Twitter, que « les 1,7% de CSG seront intégralement déductibles pour les revenus du travail, des retraites et du capital imposés au barème de l'impôt sur le revenu ».

4 - Quels produits d’épargne sont concernés ?

Le PFU sera applicable pour tous les placements produisant des intérêts ou versant des dividendes ainsi qu’aux plus-values de cession de valeurs mobilières. Le gouvernement a aussi choisi d’imposer les intérêts des produits d’épargne-logement (PEL et CEL) « dans les conditions de droit commun » : les comptes et plans ouverts à partir de 2018 seront donc soumis au PFU dès la première année, avec là encore la possibilité d’opter pour le barème si ce régime est plus favorable. Le prélèvement forfaitaire unique va également toucher l’assurance-vie mais de façon plus marginale : seuls les contribuables possédant plus de 150 000 euros sur leur assurance-vie (300 000 euros pour un couple) seront concernés.

Lire aussi : Comment la flat tax va être calculée pour l’assurance-vie

Reste des exceptions. Les livrets d’épargne réglementée (Livret A, LEP, LDDS, Livret Jeune) demeurent défiscalisés : ni impôt sur le revenu, ni cotisations sociales. Le Plan d’épargne en actions (PEA) et les différents plans d’épargne salariale conservent eux leur fiscalité avantageuse à l’identique.

5 – De possibles adaptations au Parlement

Le projet de loi de finances pour 2018, texte intégrant cette réforme de la fiscalité de l’épargne, a été présenté ce mercredi par les ministres de Bercy, avant d’être aussitôt déposé à l’Assemblée nationale. S’il est peu probable que les parlementaires remettent en cause les grandes lignes de cette réforme fiscale, des adaptations du PFU restent envisageables. La version définitive de ce texte ne sera donc connue qu’à l’issue des débats parlementaires, avant un éventuel passage devant le Conseil constitutionnel.