La banque et le sponsoring sportif, en France, c’est une histoire de chasse gardée. Le foot ? Pré carré de la banque verte depuis une quarantaine d’années. Et le Crédit Agricole sera encore le seul acteur bancaire mis en évidence lors de la Coupe du monde féminine 2019, en France.

Des logos « CA » au bord du terrain, derrière les joueuses lors des interviews, un spot « Les valeurs du sport rendent plus fort » signé Crédit Agricole à la mi-temps de chaque match phare, sur TF1 et Canal+… Comme à chaque grand événement footballistique, la banque verte est omniprésente. Elle a acquis auprès de la Fifa, puissante institution internationale organisatrice de l’événement, le titre de « supporter national » de la Coupe du monde féminine 2019, organisée en France, et qui débute ce soir avec le match des Bleues face à la Corée du Sud. Pour cela, la banque aurait déboursé 1 million d’euros selon les chiffres publiés voici quelques mois par L’Equipe.

De l’équipe de France au stade de la Licorne à Amiens

« Partenaire majeur » de l’équipe de France féminine depuis 10 ans, le Crédit Agricole est plus largement sponsor de la Fédération française de football (FFF). Ce partenariat d'envergure, tissé au niveau national à partir de 1984, n'a cessé de grossir. Aujourd'hui, la banque verte se retrouve à parrainer la Coupe de France, féminine et masculine, la semaine du football féminin... Elle est ainsi devenue un « partenaire de tous les footballs », de l’échelon amateur local au national, des équipes nationales masculines, féminines, toutes catégories d’âge confondues, de la Coupe Gambardella couronnant chaque année les équipes de jeunes… Un sponsoring tous azimuts qui est assuré de se prolonger jusqu'en 2023 puisque le contrat avec la FFF a été renouvelé l'an passé pour un montant qui dépasserait les 8 millions d’euros annuels selon les indiscrétions. La banque mutualiste figure actuellement parmi les « partenaires majeurs » de la fédération aux côtés d’EDF, Nike, PMU, Orange et Volkswagen.

A une autre échelle, le Crédit Agricole pose aussi son nom sur le « Stade Crédit Agricole de la Licorne », à Amiens, club pensionnaire de Ligue 1, par le biais de sa caisse régionale. Le « naming » des stades est une pratique désormais courante pour les établissements financiers : Groupama, Matmut ou encore Allianz sponsorisent les stades des clubs de l’élite. Mais aucune banque, hormis le Crédit Agricole, n’est entrée sur ce terrain : une véritable chasse gardée !

Une assise qui s’étend depuis la Coupe du monde 1998

Pour asseoir sa légitimité, le Crédit Agricole appuie à l’envi sur son ancrage dans le football amateur depuis 1974, année de la création du Challenge de l’Offensive, depuis renommé Mozaïc Foot Challenge. L'enseigne cherche tout de même à s'associer aux plus grands événements : « banque officielle » de la Coupe du monde en France en 1998, sponsor de l’équipe de France à partir de 2000, des Bleuets (espoirs) et Bleues (féminines) à partir de 2010…

Sollicité par cBanque à l’occasion des 40 ans de ce partenariat, en 2014, la communication du Crédit Agricole appuyait sa volonté de « concentrer [ses] efforts sur le sport numéro 1 en France », sport « dont les valeurs d’universalité, de proximité, de diversité sont cohérentes avec les siennes ». En octobre 2018, à l’occasion de la signature du partenariat avec la Fifa pour la Coupe du monde féminine 2019, le directeur général adjoint Bertrand Corbeau tient un discours similaire : « Le football est un formidable vecteur de lien social, de mixité et d’égalité des chances, des valeurs chères au Crédit Agricole et que nous défendons dans l’ensemble de nos territoires via notre approche du sport comme école de la vie. »

L’accroc de la grève de Knysna

Un ancrage durable, qui offre une exposition indéniable à la banque mutualiste : la FFF revendique près de 2,2 millions de licenciés, dont 165 000 féminines, sans compter les téléspectateurs des matchs de l’équipe de France… Pourtant, ce partenariat fructueux a été fortement mis à mal suite à la grève des joueurs, refusant de sortir de leur bus à Knysna le 20 juin 2010 lors de la Coupe du monde en Afrique du Sud. « On a pris la décision d'arrêter la campagne télévisée qui mettait en scène l'équipe de France et qui devait s'arrêter le 25 juin », déclare alors la communication de la banque à l’AFP, avant d’ajouter : « L’engagement du Crédit Agricole dépasse l’équipe de France. On reste aux côtés du football amateur. » Il a fallu attendre 2014 pour que l’enseigne s’associe à nouveaux aux « Bleus », une fois leur image améliorée. Le titre mondial 2018 de l’équipe de France masculine a définitivement relancé l’association aux différentes stars de l’équipe, les Mbappé, Griezmann, Pobga ou encore Giroud.

« Partenaire de tous les footballs »

Depuis l’épisode du bus, la communication de la banque a tout de même toujours été soigneusement attachée à la fois aux Bleus et au football dans son ensemble. Mot d’ordre : le Crédit Agricole est le « partenaire de tous les footballs ». Le slogan « On a tous un côté bleu », mis en avant à partir de 2007, a laissé la place à son pendant « On a tous un côté foot » voire plus récemment « Le sport comme école de vie ». Des comptes « On a tous un côté foot » ont été créés sur les principaux réseaux sociaux. Sur Twitter, @tousuncotefoot fait jeu égal, en nombre de followers, avec le compte officiel de la banque : 54 000 contre 59 000. Sur Facebook, elle surclasse la page institutionnelle : 340 000 fans contre 250 000.

La Coupe du monde féminine permet justement à la marque d’appuyer encore plus fortement cette association aux « autres footballs », en se détachant des stars masculines : « Les jeunes filles manquent d’icônes féminines sportives auxquelles s’identifier », regrette ainsi Veronique Faujour, directrice marketing de Crédit Agricole SA dans une tribune sur LinkedIn. « 1 milliard de personnes devraient suivre la Coupe du monde Féminine de la Fifa à partir du 7 juin prochain. C’est une occasion unique pour rendre la pratique plus accessible, exploiter l’impact social positif du sport pour les jeunes filles et les femmes. »

De façon plus terre à terre, la Coupe du monde féminine permet aussi aux caisses régionales de relancer des opérations commerciales. Comme un crédit conso à taux préférentiel pour vous inviter à acheter un « nouvel équipement télévisuel » et à profiter des matchs sur grand écran…