Les promesses irréalisables des coopératives de Jean-Jacques Defaix, qui a fait miroiter à des milliers d'épargnants des placements à rendement élevé, sécurisés et défiscalisés, en pleine crise financière, ont été au cœur des débats vendredi, devant le tribunal correctionnel de Rennes.

Jean-Jacques Defaix, 69 ans, comparaît devant la juridiction inter-régionale spécialisée (JIRS) de Rennes pour « escroquerie en bande organisée, blanchiment et participation à une association de malfaiteurs » entre 2007 et 2010.

Il est soupçonné d'avoir mis en place un système pyramidal frauduleux permettant de rémunérer des investisseurs avec les apports de nouveaux arrivants, le tout avec la promesse de rendements allant jusqu'à plus de 6%. Quelque 1.500 personnes y ont souscrit pour plus de 34 millions d'euros.

Au deuxième jour d'audience, le juge François Lavallière s'est attaché à définir le modèle économique séduisant mis en place par ce retraité de l'aéronautique reconverti dans la finance. Les « coopératives de croissance » et les « coopératives des petites entreprises » étaient destinées à recevoir l'argent de souscripteurs pour l'investir dans des PME ayant du mal à trouver des financements bancaires.

Présentées à l'audience, les brochures publicitaires de ces structures décrivent un placement « éthique », « sécurisé », permettant de « sauver l'emploi » dans « votre ville, votre région ». Un positionnement qui, en pleine crise des subprimes, s'est avéré déterminant pour beaucoup d'investisseurs, la plupart des petits épargnants, dont certains ont placé là les économies d'une vie. « Votre argent ne servira qu'à des petites entreprises françaises, loin des multinationales », y lit-on. Nulle mention d'un quelconque projet de village vacances en Chine, qui a pourtant bénéficié de 5,8 millions d'euros de ces mêmes coopératives. Au souscripteur, on assurait que son capital était « garanti à 100% », tant par une assurance, que par un accompagnement des entreprises aidées, mais aussi par un fonds de mutualisation devant permettre de pallier les défaillances d'entreprises ou encore des comités de contrôle et de gestion interne.

« De tout ce que vous promettiez, rien n'existait », a lancé le juge François Lavallière. « C'était la philosophie, pour l'avenir », « ça n'a pas été mis en place », lui a répondu M. Defaix, assurant que son projet était « tout à fait réalisable ».

Concernant le choix des entreprises aidées, M. Defaix a expliqué qu'elles étaient soigneusement sélectionnées, avec l'aide d'experts-comptables. Mais d'après l'instruction, la sélection relevait « de la plus complète désorganisation », certaines entreprises recevant parfois plus qu'elles ne souhaitaient, hors de tout cadre contractuel, d'autres étant des coquilles vides. Une entreprise enregistrée à Quimper a ainsi reçu 281.000 euros pour fabriquer des roulottes en Chine qu'elles n'a jamais fabriquées.

Parallèlement à la procédure pénale, l'Association des victimes des coopératives a assigné au civil en mai 2015 le Crédit mutuel de Bretagne (CMB), où étaient hébergés les comptes des coopératives. La banque avait signalé en novembre 2010 des mouvements de fonds suspects auprès de la cellule de lutte anti-blanchiment Tracfin, déclenchant l'affaire. Mais l'association lui reproche d'avoir manqué à son obligation de vigilance. « Le CMB savait qu'une bonne partie des sommes restaient sur les comptes des coopératives sans être investies nulle part, ce qui rendait impossible un quelconque rendement », explique Me Hélène Féron-Poloni, avocate des plaignants. « Elle le savait dès fin 2008, et a quand même ouvert des nouveaux comptes en 2010 pour les nouvelles coopératives », a-t-elle ajouté.