Dans une étude parue jeudi, l’association de consommateurs UFC-Que Choisir accuse les grandes plateformes de financement participatif de surévaluer les hypothèses de gains et de minimiser les risques. Elle appelle les pouvoirs publics à « recadrer » le secteur.

Un système « vérolé ». UFC Que Choisir n’est pas allé par quatre chemins, ce matin, pour dénoncer les pratiques des principales plateformes de crowdlending du marché. « Ce n’est pas une condamnation du mode de financement », a expliqué le président de l’association, Alain Bazot, « mais un problème de modalités de mise en œuvre. Ce secteur n’a pas d’avenir s’il n’y a pas assainissement ». Et de citer l’exemple du crédit renouvelable, dont l’association avait attaqué il y a quelques années les pratiques de distribution, avant que le législateur ne s’empare du sujet.

« Il ne s’agit pas d’interdire car le crowdlending, comme le crédit revolving, a son utilité », a poursuivi Alain Bazot, « mais de le recadrer », deux ans après la publication des premiers textes le réglementant.

Plus de risques, moins de rendement

A l’appui de sa démonstration, qui a parfois ressemblé à un réquisitoire, UFC-Que Choisir s’est appuyé sur une étude empirique du secteur. Mathieu Robin, chargé de mission de l’association, s’est mis dans la peau d’un particulier qui aurait investi 1.000 euros sur chacun des 789 prêts financées entre le 1er décembre 2013 et le 1er décembre 2016 par les principales plateformes du marché.

Résultat : l'UFC-Que Choisir estime que le financement participatif « offre une rentabilité proche voire inférieure à celle du Livret A, sans offrir son caractère entièrement sécurisé et liquide ». Concrètement, elle estime que le taux de défaut au bout de 3 ans est « 5 à 10 fois supérieur » au risque communiqué par certaines plateformes et que le rendement des placements, après déduction des défauts et de la fiscalité, « devrait s'établir entre 1,6% et 0,33%, loin des promesses de taux d'intérêt allant jusqu'à 7% ».

Elle demande ainsi au gendarme du secteur bancaire, l'ACPR, de « s'assurer du respect par les plateformes de leurs obligations légales d'information » et de « sanctionner les manquements persistants », et les pouvoirs publics à « légiférer pour obliger les plateformes à fournir une information pertinente et impartiale ».

Clauses abusives

Autre grief exprimé à l’encontre des acteurs du crowlending : les conditions générales d’utilisation des services (CGU) seraient truffées de clauses abusives, d'exonération de responsabilité financière notamment, déjà condamnées par le passé dans d’autres secteurs d’activités.

UFC-Que Choisir met donc en demeure six grandes plateformes - Lendix, Unilend, Lendopolis, Pretup, Bolden et Prexem - pour qu'elles « purgent leurs conditions générales d'utilisation » de ces clauses. A défaut de réaction, l’association se réserve « le droit d'agir en justice ».

Une croissance exponentielle

Si le crowdlending reste un produit relativement confidentiel, il connaît néanmoins une croissance exponentielle comme l'a montré UFC-Que Choisir chiffres à l’appui. Les montants investis dans les prêts rémunérés aux TPE/PME ont ainsi été multipliés chaque année par 2 entre 2013 et 2016, passant 43 à 321 millions d'euros. Un succès que l’association explique par trois éléments de contexte : les rendements historiquement bas des produits d’épargne traditionnels, la défiance des Français vis-à-vis des professionnels de l’épargne et la simplicité d’accès aux offres de placements alternatifs sur le web, crowdlending, Forex, etc.