Après avoir introduit l’été dernier une contrainte d’investissement en unités de compte, le 3e assureur « web » français abandonne la garantie en capital en « net de frais de gestion ». Résultat : une nouvelle gamme de fonds dynamiques remplace dès janvier l’offre actuelle. La promesse : plus de risque, mais une performance au moins aussi bonne.

Avis de tempête chez les courtiers en ligne. Le 22 décembre, une lettre adressée par Spirica à ses clients a fait l’effet d’une « bombe à fragmentation », selon un acteur du marché. Le troisième assureur du web, filiale du Crédit Agricole, y annonce son choix « d’interrompre la commercialisation » de ses fonds euros diversifiés. Eurosélection, Néo Euro Garanti et surtout le très populaire Euro Allocation Long Terme (ALT) sont remplacés, explique le courrier, par des « versions 2 », dès le 1er janvier. Traduction : tout nouveau versement devra se tourner vers les nouveaux supports.

Spirica se veut rassurant

Inquiets du sort de leurs investissements, les clients se sont tournés vers leur courtier. « Juste avant Noël, il y a eu un certain affolement », confirme Nicolas Sost, cofondateur de Patrimea. « Les appels et mails n’ont pas cessé. » La principale question : avec l’arrivée d’une « V2 », quel avenir pour les fonds V1 ? Car l'arrêt de la commercialisation précède souvent un effondrement de la performance. Le directeur général de Linxea, Yves Conan s’est immédiatement montré optimiste : « Si la stratégie de gestion ne change pas, il n’y a pas de raison que les anciens fonds soient moins performants. Au contraire, cela pourrait les protéger. » Mais rien ne permettait de garantir les performances…

Sollicité, l’assureur se montre rassurant. « Il n’y a pas lieu de s’inquiéter », affirme Daniel Collignon, directeur général de Spirica. Selon lui, le lancement des « V2 » est uniquement la conséquence de l’évolution des conditions générales : « Dès le 1er janvier, l’ensemble de nos fonds seront désormais garantis en capital brut de frais de gestion. Cela s’applique aux fonds dynamiques, immobiliers, mais aussi à l’actif général. » Les fonds V2 seraient ainsi en réalité des fonds V1… avec de nouvelles conditions générales et une garantie en capital hors frais de gestion.

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Euro ALT : deux fonds, une seule performance

Pour Euro Allocation Long Terme 2, à dominante immobilière, l’évolution pourrait même être indolore si l’on en croit Daniel Collignon : « La formule 2 est exactement la même que la première. A la différence près qu’en excluant les frais de gestion de la garantie en capital, elle coûte moins cher en capital à l’assureur. » N’y a-t-il pas un risque que l’ancien Euro ALT s’effondre ? « Pas du tout », répond l’assureur. « Le fonds reste le même. 1 et 2, cela reste la même poche. Tous les investissements restent dans la même enveloppe, gérée de la même façon. La performance sera la même ! »

Conclusion : la V2 est plus avantageuse pour l’assureur, mais pour le client, cela ne devrait rien changer, sachant que « le fonds reste cantonné » de la même façon. « Comme Euro ALT se comporte comme une grosse SCPI, ou un OPCI, avec beaucoup d’immobilier dedans, il continuera à performer, et donc le client ne verra pas la différence », analyse une source proche du dossier.

Fonds dynamiques : moins de garanties pour plus de performance ?

Pour Néo Euro Garanti et Eurosélection, fonds « à coussin » mêlant actif général et « poche de performance », l’évolution est un peu plus marquée. Pour déterminer la taille et l’élasticité du « coussin », l’assureur calcule un « budget de risque », à partir de la partie investie sur l’actif général. « Or, comme la rentabilité des fonds euros baisse, avec la baisse des taux d’intérêt, notre budget de risque devenait ridicule », regrette Daniel Collignon. « Le coussin ne peut plus assurer son rôle de booster. » En excluant dans les fonds « V2 » les frais de gestion de la garantie du capital, l’assureur va pouvoir regonfler ce coussin.

« Si l’on schématise, aujourd’hui, les coussins représentent 15% des fonds », expose l'assureur. « En introduisant la garantie en capital brut de frais, ils vont pouvoir remonter à 25%. Mais les recettes ne changent pas, et les formules 1 et 2 seront gérées avec les mêmes approches. Les anciens fonds ne seront pas délaissés, nous nous y engageons. »

Hausse des frais sur Eurosélection

Pour Eurosélection, les frais de gestion passent de 1% sur la « V1 » à 2% pour la « V2 ». La garantie en capital étant désormais calculée en « brut de frais de gestion », il faudra donc accepter un risque de 2% par an : « Mais 1% seront directement réinjectés dans la performance, pour donner plus de souplesse encore au coussin », nuance Daniel Collignon. Moralité : le risque se reporte en partie sur le client. En contrepartie, les performances pourraient être bien meilleures.

De nouveaux contrats

En attendant, les courtiers doivent s’adapter. Les anciens clients devront signer un avenant spécifique pour accéder aux fonds V2. Et de nouvelles conditions générales s'appliqueront aux souscriptions effectuées à partir du 1er janvier. Yves Conan, directeur général de Linxea, espère surtout que l’assureur « publiera rapidement un détail complet de la composition de chacun des fonds, pour rassurer totalement les clients ». Car pour un habitué du marché, « cela a pris des proportions énormes » : « Fermer les fonds, changer les contrats, pour une question de garantie en capital… L’assureur a sorti le bazooka pour pas grand-chose. Quelques jours avant Noël, cela a suscité d’énormes inquiétudes, pour des conséquences minimes… »

Voir par ailleurs le comparatif d'une sélection de contrats gérés par Spirica