La ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, a annoncé vendredi à Lille la mise en place de l'encadrement des loyers dans cette ville à partir du 1er février, une première en province.

Le préfet « va signer l'arrêté d'encadrement des loyers à Lille à partir du 1er février », a déclaré Emmanuelle Cosse lors d'une conférence de presse conjointe avec la maire de Lille, Martine Aubry. Cette annonce survient dix jours après la démission de Manuel Valls, hostile à cette mesure instaurée par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault.

L'encadrement des loyers a été mis en place à Paris le 1er août 2015. Ce dispositif prévoit qu'à la signature d'un nouveau bail ou lors d'un renouvellement, le loyer d'un logement ne peut dépasser de 20% un loyer de référence fixé par arrêté préfectoral - selon le nombre de pièces et la période de construction du logement - ni lui être inférieur de 30%, sauf exceptions bénéficiant d'un « complément de loyer ».

L'encadrement « n'a pas bloqué le marché locatif à Paris »

« La cherté du loyer a une incidence négative sur l'économie de notre pays », l'encadrement des prix « n'a pas bloqué le marché locatif à Paris », a déclaré la ministre lors de la conférence. Pour le logement, Lille est « reconnue comme la troisième ville la plus chère de France » avec une hausse des loyers privés « de 70%, contre 50 » en moyenne nationale entre 2000 et 2012, et « présente un marché particulièrement tendu », ont par ailleurs indiqué dans un communiqué commun le ministère du Logement et la mairie de Lille. Elle a justifié l'annonce tardive de cette mise en place par le fait qu'« on est dans une procédure qui demande temps et rigueur ».

Pour sa part, Martine Aubry a jugé que cette mesure, dont elle réclamait l'application à Lille depuis plus d'un an, allait être « très utile pour toute la ville ». « Lille a, avec Toulouse, l'accroissement de population le plus fort de France », ce qui constitue un facteur de tension sur le prix des logements en location, a-t-elle ajouté.

Aubry : « au départ il y a eu des résistances »

En outre, a expliqué la maire, « nous avons beaucoup d'immeubles à la découpe qui ont transformé les maisons et entraîné beaucoup de loyers très importants ». L'ex-numéro un du PS s'est dite « très heureuse qu'on n'ait pas lâché car, par moments, ce n'était pas simple ». Outre qu'une série de difficultés techniques devait être surmontée, « au départ il y a eu des résistances », a-t-elle dit. Députée et adjointe au Logement à la Ville, Audrey Linkenheld a précisé qu'« il y a 55.000 loyers concernés ». « 14% » de ces loyers « sont plus élevés que le loyer de référence majoré », a-t-elle précisé.

Selon le président de l'Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) Nord de France, Jean-Pierre Berlinet, « cette mesure, c'est vraiment beaucoup de travail pour peu de résultats et c'est une mesure qui va une nouvelle fois caricaturer les propriétaires ». Avant d'ajouter : « Ça va faire fuir certains investisseurs sur la zone et peut-être décourager des propriétaires bailleurs qui sont déjà assommés par les taxes multiples et qui pourraient donc vendre ».

Une mesure controversée depuis le départ

L'encadrement des loyers avait été instauré par la loi Alur, défendue au Parlement par l'ex-ministre du Logement, Cécile Duflot. Il avait été très critiqué par l'opposition de droite mais avait aussi fait l'objet de réserves dans la majorité, au point que le Premier ministre de l'époque, Manuel Valls, l'avait cantonné à Paris et aux communes volontaires, alors que la loi Alur prévoyait un encadrement des loyers pour 28 agglomérations.

Manuel Valls avait justifié ce recul, déclarant : « ce qui marche doit être maintenu, ce qui ne marche pas doit être réétudié ou abandonné ». Cécile Duflot avait qualifié la position du chef du gouvernement d'« inouïe » et de « cadeau aux lobbies ».