Le Conseil constitutionnel a retoqué vendredi le registre public des bénéficiaires des trusts « ayant des conséquences fiscales en France », en ligne depuis fin juin, jugeant qu'il portait une atteinte « disproportionnée » au respect de la vie privée.

« Les dispositions contestées portent au droit au respect de la vie privée une atteinte manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi », a estimé le Conseil constitutionnel, qui avait été saisi en juillet par le Conseil d'Etat sur la question de la conformité de la création de ce registre public. Les « Sages » de la rue Montpensier ont considéré que la mention de ces noms « dans un registre accessible au public (...) fournit des informations sur la manière dont une personne entend disposer de son patrimoine ».

« Une atteinte au droit au respect de la vie privée »

« Il en résulte une atteinte au droit au respect de la vie privée », ont-ils ajouté, constatant que « le législateur (...) n'a précisé ni la qualité ni les motifs justifiant la consultation du registre » et « n'a pas limité le cercle des personnes ayant accès aux données de ce registre ».

Les trusts sont des structures juridiques permettant à des personnes physiques ou des sociétés de transférer des actifs à une personne de confiance qui les gèrera selon les consignes qui lui seront données. Ces montages peuvent permettre de dissimuler l'identité des véritables ayants-droit. La France a pris la décision de créer un registre de ces structures controversées après le scandale des Panama Papers, qui avaient révélé l'existence de sociétés offshore établies dans ce pays et qui permettaient à ses bénéficiaires de rester anonymes.

Bercy « prend acte »

Le ministère de l'Economie et des Finances a « pris acte » de la décision du Conseil constitutionnel dans un communiqué. Il estime qu'elle « ne remet pas en cause le principe même de l'institution de ce registre mais vient souligner la nécessité de mieux encadrer la diffusion d'informations relevant de la vie privée », a expliqué Bercy.

Conséquence de l'affaire des Panama Papers, ce registre accessible au public depuis le 30 juin liste les bénéficiaires effectifs des 16.000 trusts « dont le public ne connaît pas les propriétaires ou les bénéficiaires ». Cette liste « permettra de connaître exactement qui est derrière toute entité de quelque nature juridique que ce soit et permettra à tout le monde d'y accéder », avait expliqué le ministre des Finances Michel Sapin, lors de sa création.

C'est une ressortissante américaine ayant sa résidence fiscale en France, et « ayant à ce titre déclaré à l'administration française les trusts qu'elle a constitués dans son pays d'origine en vue de sa succession à venir », qui avait saisi à l'origine le Conseil d'Etat dans ce dossier.