Les restrictions d’accès aux fonds en euros se généralisent pour l’assurance-vie en ligne. Mais l’assureur Apicil a tout de même surpris, mi-septembre, en obligeant ses assurés à investir 30% en unités de compte quasiment du jour au lendemain. Pourquoi cette restriction ? Va-t-elle s’accompagner du lancement de nouveaux supports ? Les réponses de Renaud Célié, directeur général adjoint chez Apicil.

Pourquoi avoir imposé une contrainte d’investissement de 30% en unités de compte pour accéder à votre fonds en euros ?

Renaud Célié : « Je rappellerais simplement la dégradation de l’environnement financier, le contexte de taux bas – nuls voire négatifs -, qui s’est brutalement accélérée ces derniers mois. Dans ces conditions, nous ne pouvons plus investir l’épargne des fonds en euros sur des actifs offrant sécurité et rentabilité. Les rendements vont donc inexorablement baisser. Dans ce contexte, le 70/30, pour 70% sur le fonds en euros et 30% en UC, est une actualité que je qualifierais de quasi anecdotique pour nos distributeurs partenaires. Car cela n’a rien d’anachronique et nos partenaires sont déjà prêts. Pourquoi est-ce nécessaire ? Parce qu’il s’agit du devoir de conseil ! Le tout fonds en euros ne peut plus fonctionner. Dans les faits, en moyenne, les assurés se contentaient d’allocations 90/10 il n’y a pas si longtemps. Cela a grimpé à 80/20 ces dernières années. Intégrer aujourd’hui une contrainte en 70/30 correspond à une évolution logique dans le contexte de taux bas actuel. »

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Vous incitez les épargnants à investir en UC pour aller chercher plus de rendement ?
« En 2016, le rendement moyen devrait encore perdre 0,30 point. »

R.C. : « Le succès des fonds en euros a toujours reposé sur la garantie en capital, d’une part, et le rendement d’autre part. Or les taux convergent vers une rémunération nulle. Ainsi, l’an passé le taux moyen était de 2,27% : en 2016, ce rendement moyen devrait encore perdre 0,30 point. Le fonds en euros n’est plus ce qu’il était ! L’une des deux promesses initiales ne sera plus tenue. Notre mission, qui repose sur le conseil aux épargnants et la protection de leur capital, conduit donc à leur proposer une alternative. Proposer du 100% fonds en euros, aujourd’hui, peut relever du défaut de conseil, car n’offrant pas les perspectives de rendement espérées. »

Mais pourquoi avoir annoncé cette décision de façon soudaine et pour une application quasi immédiate, en septembre ?

R.C. : « Les modalités de communication n’étaient peut-être pas les plus adéquates en effet. Mais il faut aussi considérer l’environnement et l’accélération de la baisse des taux au cours du premier semestre ; cela a sans doute bousculé notre processus de décision. »

Aujourd’hui le fonds euros est parfois présenté comme un produit de luxe : qu’en pensez-vous ?

R.C. : « Je ne suis pas d’accord avec la formulation. Si les rendements convergent vers zéro, il deviendra plutôt un produit d’attente. A ce titre, on peut imaginer qu’il reste une composante de l’assurance-vie pour l’épargnant, pour la sécurité, sans rendement. L’assurance-vie doit rester attractive par son équilibre entre sécurité et recherche de rendement. Cela peut notamment passer par de la gestion pilotée. »

Pourriez-vous lancer un fonds en euros dynamique ou immobilier, avec des perspectives de rendement supérieures, comme le font d’autres assureurs, notamment sur l’assurance-vie en ligne ?
« Si l’assuré accepte une part de risque, nous pourrons rechercher une rémunération supérieure. »

R.C. : « Ce à quoi nous réfléchissons, c’est plus un fonds en euros avec une moindre garantie en capital. Si l’assuré accepte une part de risque, par exemple sur 5% de son capital, nous pourrons réaliser une gestion plus dynamique et rechercher une rémunération supérieure. »

Cela ressemble à l’euro-croissance, en moins complexe…

R.C. : « Je ne peux pas vous en dire plus à ce stade de la réflexion mais je pense qu’il faut passer par ce type d’innovation. »

Et l’incitation à l’investissement en UC, via les bonus de rendement sur le fonds en euros ?

R.C. : « Je trouve ce principe paradoxal. Cela revient à dire à l’investisseur : moins vous mettez sur le fonds en euros, plus je vous en donne… Surtout, chez Apicil, nous aspirons à une certaine équité entre nos clients. »

Vos assurances-vie sont notamment distribuées par les courtiers web Bourse Direct, Linxea ou encore MonFinancier. Comptez-vous développer l’assurance-vie en ligne ?
« Notre encours d’assurance-vie en ligne est d’environ 200 millions d’euros. »

R.C. : « Oui, et nous souhaitons en premier lieu développer nos partenariats existants. A ce jour, notre encours d’assurance-vie en ligne est d’environ 200 millions d’euros. »

Si l’assurance-vie en ligne perd son attrait « taux » sur le fonds en euros, comment séduire les particuliers ?

R.C. : « C’est aux distributeurs web d’apporter leur savoir-faire et leur valeur ajoutée. Leur expertise, sur l’investissement financier notamment, peut permettre de guider les particuliers dans leurs investissements en UC. »

Allez-vous développer votre offre en UC sur ces contrats web ? Avec de nouveaux supports immobiliers ou de nouveaux trackers par exemple ?

R.C. : « L’offre d’UC est très large et étoffée. Ensuite, nos partenaires, éventuellement avec notre support, font leur sélection en fonction de la valeur ajoutée qu’ils veulent apporter. »