Un même assureur, mais plus de 20 taux de rémunération différents ! Cette multiplication des rendements touche plus des deux tiers du marché. Et de moins en moins d’assureurs servent un seul et même taux à tous leurs clients.

Les assureurs servant un taux unique sur toutes leurs gammes de contrats, et à tous leurs titulaires ? Une espèce en voie de disparition à en croire les statistiques du régulateur du secteur, l’ACPR (1). En 2015, seuls 9% des assureurs ont opté pour ce « taux unique », contre 11% un an plus tôt ou 14% sur l’année 2011. Près d’un assureur sur dix, tout de même ! Mais il s’agit clairement des plus petits. Ces mêmes assureurs, sept en l’occurrence, sur 82 organismes étudiés par l’ACPR, ne pèsent que 1,8% de l’épargne amassée sur l’assurance-vie en France.

Un assureur pour près de 400 contrats différents

Les plus grosses entités, elles, multiplient les contrats. En commercialisant d’une part un contrat « grand public », d’autre part un contrat à la clientèle plus aisée, et en lançant de nouvelles formules de ces mêmes gammes de contrats tous les 5 ou 10 ans. Résultat : au sein de chacun des 21 plus gros assureurs français, plus de 360 types de contrats différents cohabitent, en moyenne, selon l’ACPR !

Dans ces conditions, les taux de rémunération se multiplient logiquement. Ces gros gestionnaires « appliquent plus de vingt taux de revalorisation différents », chaque année, selon le régulateur. Cette disparité concerne plus des deux tiers du marché : 67,8% des encours de l’assurance-vie très exactement. Qui sont ces assureurs adeptes de la disparité ? L’ACPR ne livre aucun nom mais les plus gros gestionnaires sont évidemment concernés : CNP France, Crédit Agricole Assurances, Axa France, BNP Paribas, etc. Exemple, dans le réseau Crédit Agricole : en 2015, les titulaires du très accessible contrat Cap Découverte ont profité d’une rémunération de 1,60% (2) sur leur fonds en euros, contre 2,40% pour certains détenteurs d’Espace Liberté, réservé à de plus gros patrimoines. Entre les deux, se glissent de multiples taux intermédiaires selon les clients et les contrats.

« Vieux » contrats : du taux mini au jackpot !

A cela s’ajoute la politique de bonus de rendement, qui permet à certains assurés de voir leur taux bonifié s’ils investissent sur des supports risqués, ou s’ils disposent d’une épargne significative.

La multiplication des taux chez les gros assureurs dépend aussi fortement des « vieux » contrats. Certaines assurances-vie, souscrites il y a plusieurs dizaines années, intégraient des taux garantis très élevés. Le rapport de l’ACPR montre que certains assureurs versent encore des rendements annuels avoisinant les 8% ou 10% ! Contraints et forcés. Mais l’aspect « jackpot » ne concerne pas tous ces « vieux » contrats. En l’absence de taux garanti élevé, lorsqu’un contrat n’est plus commercialisé, le rendement de son fonds en euros tombe souvent bien en-deçà du marché. Ce qui renforce encore la disparité de rémunération chez un même assureur.

Lire à ce propos : Que deviennent les vieux contrats d’assurance-vie ?

Moins de taux différents chez les assureurs mutualistes

A l’opposé, quels sont les rares assureurs qui optent pour un taux unique ou qui, du moins, se limitent à quelques taux différents ? Les assureurs mutualistes ne se privent généralement pas de mettre en avant leur politique d’« équité ». Exemple : GMF gère plus d’une dizaine de contrats différents (Altinéo, Certigo, Multéo, etc.) mais l’assureur affirme servir du 2,80% pour 2015 sur la « totalité des encours » des fonds en euros. Autre exemple : la MACSF, pourtant dans le top 15 dans plus gros assureurs, n’a communiqué qu’une poignée de taux différents pour 2015, entre 2,85% et 3%. Tous les assureurs mutualistes n’optent toutefois pas pour cette politique : la Maaf a ainsi annoncé des taux allant de 1,71% à 3,01% sur l’année 2015.

Le rendement moyen de l’assurance-vie, de 2,27% en 2015%, cache donc une réalité très disparate. Le cas particulier des taux garantis à près de 10% mis à part, les assurés restent toutefois logés à la même enseigne sur un point : les rendements baissent. C’est le cas de 92% des encours selon l’ACPR ! Son vice-président, Bernard Delas, rappelle d’ailleurs les épargnants à la réalité des taux bas, dans ce même rapport : « Il n’est pas raisonnable de laisser penser aux épargnants qu’ils peuvent espérer bénéficier durablement à la fois de la garantie du capital investi et d’une rémunération excédant de 2 à 3 points le niveau de l’inflation. » Au cas où le message n’était pas encore passé…

Lire aussi notre dossier sur les rendements 2015 de l’assurance-vie

(1) L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution a publié en juillet son analyse annuelle des taux de revalorisation des contrats individuels de l’assurance-vie, portant sur l’année 2015. Cette analyse porte sur 82 assureurs ayant répondu à l’ACPR, lesquels gèrent 99% des encours relatifs aux contrats individuels d’assurance-vie.

(2) Tous les taux évoqués s’entendent net de frais de gestion, mais avant application des cotisations sociales et fiscales.