Pouvoir être libre de choisir son contrat, d'en changer pour tenir compte des changements de vie, voire de rattraper un mauvais choix... Ce sont les trois justifications du cabinet de conseil en actuariat BAO pour une résiliation annuelle d'un contrat d'assurance emprunteur.

En principe avec la loi Hamon, un emprunteur peut librement choisir son assurance emprunteur et la résilier au cours de la première année de son prêt immobilier au profit d'un autre contrat. Ce changement est possible à la condition que les garanties soient équivalentes pour permettre à l'établissement de crédit d'accepter la résiliation. Ensuite, il n'est plus possible d'en changer jusqu'au terme du crédit immobilier. Dans les faits, selon l'étude du cabinet de conseil en actuariat, Banque Assurance Optimisation (BAO), ce type de résiliation ne représente que 0,5% des crédits réalisés sur une année. Un chiffre très faible alors que « le contenu des garanties des assurances alternatives est en moyenne plus riche que celui des assurances bancaires », explique l'étude. Ce qui l'amène à ce constat amère : « les lois facilitant la mobilité des assurés par la capacité de remise en concurrence n'ont jamais fait bouger les foules. » Cette situation n'est pas propre à l'assurance emprunteur. BAO remarque que « le changement d'assurance automobile est encore moins fréquent que le changement de voiture et malgré les lois de mobilité bancaire, les Français changent encore plus souvent de conjoint que de banque... ».

Tenir compte des accidents de la vie

Que faire pour faciliter ce changement ? BAO argumente pour la mise en œuvre d'une résiliation annuelle, à la différence de la résiliation à tout moment après la première année pour l'assurance habitation. La résiliation annuelle « permet à l'emprunteur de choisir librement son assurance, sans conséquence négative sur l'accès ou le coût total de son crédit », avance son étude. C'est donc ici une extension de la liberté de choisir son assureur déjà effective au moment de l'octroi du crédit. A lui seul, cet argument ne suffit pourtant pas à expliquer l'utilité de pouvoir résilier chaque année.

Le cabinet de conseil en actuariat lyonnais avance un second argument : changer chaque année d'assurance « apporte aussi la flexibilité indispensable pour faire face à l'évolution des besoins de protection de l'emprunteur ». Et il rappelle : « les ruptures professionnelles et familiales restent de loin la cause majoritaire de défaillance de remboursement des emprunteurs, et ne sont pas couvertes par l'assurance emprunteur ». Par ailleurs, la fréquence des sinistres avec décès ou incapacité progresse de 7,5% chaque année pour la tranche d'âge 25 à 70 ans, selon l'Insee (d'où une facturation différenciée selon l'âge de l'emprunteur). En donnant la possibilité de résilier chaque année le contrat d'assurance emprunteur, les banques ou les fournisseurs dits alternatifs auraient la possibilité de caler au plus près de la réalité de chaque emprunteur, leurs garanties et ajuster en conséquence leur prix.

Favoriser des pratiques commerciales plus saines

Le troisième argument en faveur d'un changement de contrat annuel porte sur l'opportunité de « corriger un choix d'assurance initialement biaisé par les conseils d'un acteur dont les intérêts étaient multiples (prêteur et distributeur d'assurance) ». Le cabinet de conseil constate que l'interdiction dès 2010 avec la Loi Lagarde de lier les conditions de crédit au choix de l'assurance n'est pas forcément respectée et que les « mauvaises pratiques perdurent ». Avant il y avait les grilles de taux de crédit, aujourd'hui la suspicion vient des quotas de délégations d'assurance, notamment chez les courtiers, « et parfois même l'interdiction de présenter des candidats à l'emprunt à certaines banques avec une assurance qui n'est pas la leur ». La possibilité de résilier chaque année son contrat permettrait de « rendre les pratiques commerciales plus saines, car elle réduit l'efficacité des comportements abusifs en permettant à l'emprunteur pénalisé d'en limiter la portée dans le temps ».

De leur côté, les banques se refusent à la résiliation annuelle. Pourtant, selon l'étude, une résiliation en cours de prêt pourrait renforcer la rentabilité relative de leurs contrats : plus un contrat d'assurance dure longtemps plus la probabilité de couvrir un sinistre augmente, ce qui amène les marges au fil du temps. La résiliation consoliderait leurs marges, la période d'assurance étant plus courte. Par ailleurs, les personnes présentant des risques avérés, sont en réalité assurées par des fournisseurs alternatifs, lesquels, bien que plus exposés à la probabilité d'un sinistre, proposent une meilleure tarification (1). Le débat reste ouvert.

(1) Selon une étude de l'Institut national de la consommation reprise par BAO