Face au « poison » des taux d'intérêt bas dont les effets sont « inéluctables » à long terme, le régulateur du secteur de l'assurance, l'ACPR, a appelé à nouveau lundi les assureurs à être prudents et à s'adapter rapidement. Son vice-président a particulièrement ciblé les rendements de l'assurance-vie.

« Les taux bas agissent comme un poison dont les effets sont inéluctables même s'ils n'apparaissent que lentement », a averti Bernard Delas, vice-président de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) lors de la présentation du rapport annuel de l'institution. Le marché de l'assurance doit « donc impérativement continuer de s'adapter en faisant évoluer son modèle économique et en constituant les réserves dont il pourrait avoir besoin demain », a-t-il exhorté.

Les taux d'intérêt sont actuellement très bas du fait des politiques accommodantes des banques centrales. Ce phénomène entraîne une baisse progressive du rendement des placements des assureurs, ce qui en théorie peut conduire à une moindre rémunération de leurs clients.

« Pas raisonnable » de cumuler garantie et rendement

L'autorité s'est dite particulièrement attentive à la gestion des assureurs en matière de contrats d'assurance vie. « La modération en matière de taux de revalorisation des contrats d'assurance-vie est un impératif », a rappelé Bernard Delas. A moyen-long terme, « il n'est pas raisonnable de laisser penser aux épargnants qu'ils peuvent espérer bénéficier durablement à la fois de la garantie du capital investi et d'une rémunération excédant de 2 à 3 points le niveau de l'inflation », a-t-il insisté.

« N'attendez pas pour vous adapter (...) [d'être] dans une situation plus critique que celle qu'elle est aujourd'hui », a lancé le vice-président de l'ACPR à l'attention des assureurs, indiquant qu'ils pouvaient d'ores et déjà agir sur leurs coûts de fonctionnement, leur politique commerciale et leur offres de produits.

Par ailleurs, la directive Solvabilité II, nouveau cadre réglementaire européen du secteur de l'assurance, est entrée en application le 1er janvier « sans difficulté majeure », a relevé Bernard Delas, soulevant néanmoins quelques « points de vigilance » concernant la gouvernance et les évaluations internes des risques et de la solvabilité.

Banques : « il n'y a pas de chantier Bâle 4 à ouvrir »

Au niveau du secteur bancaire, également régulé par l'ACPR, le président de l'institution et gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau a assuré qu'au niveau réglementaire, « il n'y a pas de chantier Bâle 4 à ouvrir ». Mais il faut « finaliser le chantier des réformes post-crise : le G20 l'a redit à Washington en avril, le Comité de Bâle doit le faire », a-t-il rappelé.

Les normes de Bâle III, élaborées en réponse à la crise financière de 2007, visent à renforcer la solidité des banques, en relevant notamment leur niveau de fonds propres. Elles devront être pleinement appliquées par les banques d'ici 2019 même si certains points de ces règles sont encore en discussion au sein du comité de Bâle. Le gouverneur central a réitéré son appel à « stabiliser vite le cadre réglementaire ». « Nous sommes 8 ans après la crise et tout ce qui entretient l'incertitude évidemment peut peser sur la croissance et le bon financement de l'économie », a-t-il prévenu.

En dépit du contexte de taux bas et de cette incertitude réglementaire, les bénéfices des six plus grands groupes bancaires français (BNP Paribas, groupe Crédit Agricole, Société Générale, groupe BPCE, groupe Crédit Mutuel et la Banque Postale) ont atteint 23,7 milliards d'euros en 2015 en hausse de 66% (éléments exceptionnels compris), a-t-il souligné, se félicitant de « la solidité du système bancaire français ».