2015 est une année contrastée pour Spirica. La collecte du troisième assureur-vie en ligne a explosé mais les rendements ont été fortement revus à la baisse. Le directeur général Daniel Collignon pense toutefois que les performances à moyen terme de Spirica continueront à surclasser la moyenne du marché.

Spirica a été le dernier assureur « web » à publier ses rendements 2015. Pourquoi avoir tardé ?

Daniel Collignon : « Je vais vous répondre en toute transparence. Nos chiffres sont prêts depuis la première semaine de janvier. Simplement, un certain nombre d’assureurs attendent les chiffres des concurrents pour fixer les leurs. Nous ne voulons pas favoriser cette pratique que nous n’approuvons pas. »

On pourrait penser que c’est vous qui avez attendu !

D.C. : « Vous pourriez, c’est vrai… Mais nos chiffres ne sont pas manipulés. Nous avons donné les taux de participation aux bénéfices résultant strictement de la rentabilité de nos placements. Nous avons pris 100% de notre marge et nous n’avons pas fait de provision pour participation aux excédents. »

Les fonds Spirica sont en baisse. Notamment votre actif général, qui a pris une petite « claque », de 3% à 2,55% en un an…

D.C. : « Nous avons annoncé, dès le début de l’année, que nos taux de participation aux bénéfices baisseraient de 0,4 à 0,5 point sur l’exercice. Cela est lié aux taux des réinvestissements obligataires. Et au fait que nous ayons pris 100% de notre marge, ce qui n’était pas le cas lors de l’exercice précédent. Nous avons deux spécificités. La première, c’est une très forte collecte brute (1,2 milliard d’euros, dont 250 millions sur internet) par rapport à nos stocks (3,7 milliards). La collecte est en croissance de 40% en un an. Cela provoque une dilution un petit peu plus rapide que chez certains de nos concurrents. A contrario, nous avons une plus forte diversification de nos placements, avec notamment une partie immobilière d’environ 16% qui permet de modérer l’effet de la dilution. »

Euro Allocation Long Terme, votre fonds à dominante immobilière (SCPI), perd 31 points de base (3,51% contre 3,82% en 2014). Comment peut-il baisser aussi fortement ?

D.C. : « Quand vous obtenez 4,5% à 5% sur les SCPI, une rentabilité de 3,51% n’est pas forcément anormale après déduction des frais de gestion du fonds. La rentabilité des SCPI a baissé, les loyers baissent régulièrement. Quand nous avons lancé ce fonds, on achetait des SCPI extrêmement décotées, suite à la crise financière. Ce qui permettait des rendements très élevés. Aujourd’hui, le produit est très recherché. On se retrouve avec une rentabilité plus faible. Il n’y a rien d’exceptionnel. »

Pourtant, d’autres fonds à dominante immobilière arrivent à livrer 3,60%, voire 4% ! Qu’est-ce qui vous différencie ?

D.C. : « Nous avons choisi l’investissement en SCPI, qui suppose une marge pour les gestionnaires, et a donc un impact sur le rendement. Par contre, nous y gagnons une vraie gestion. A court terme, cela peut être pénalisant pour la rentabilité. A moyen terme, nous bénéficions des compétences des asset managers pour faire les arbitrages qu’il faut, rénover les biens, les relouer, etc. À moyen terme, la différence entre certains fonds peut s'inverser ! »

Comment faire pour avoir le meilleur rendement ?

D.C. : « Notre ambition n’est pas d’avoir le meilleur fonds, mais un bon fonds. Sur internet, il y a eu pendant un moment une course au rendement. Depuis le début de l’année, on a le sentiment d'assister désormais à une course à la qualité. Cela peut justifier 0,1 à 0,2 point de rentabilité en moins. Cela devient un facteur important de différenciation. »

Vos fonds euros dynamiques ont connu des trajectoires opposées : -0,62 points pour EuroSélection, +0,72 points pour Néo Euro Garanti. Un gestionnaire a battu l’autre ?

D.C. : « C’est assez compliqué de comparer les fonds euros dynamiques. Il y a des années où ça marche mieux, et des années où ça marche moins bien. Au printemps, sur Néo Euro Garanti, la performance était autour de 4%. On s’est dit avec UAF Life patrimoine que c’était peut-être suffisant, et on a commencé à désensibiliser. C’était la bonne décision : on a pu donner 3,63%. EuroSélection est beaucoup monté en début d’année, avant de se replier. Et nous avons choisi de maintenir le niveau d’investissement ; ce qui fait qu’en milieu d’année, nous avons acheté des parts à des valeurs un peu trop élevées. C’est vraiment une question de date des investissements et désinvestissements, dans un profil d’évolution des bourses tout sauf linéaire. »

Vos contrats sont parmi les moins chers du marché, notamment pour les unités de compte. Comment fait-on pour rentabiliser un contrat avec 0,5% de frais sur les UC ?

D.C. : « Vous savez, quels que soient les frais du contrat, l’assureur a la même marge. On n’a pas de grande latitude par rapport à nos marges. L’assureur doit rémunérer ses fonds propres, payer ses frais. C’est le distributeur qui fait son affaire de se rémunérer plus ou moins sur les produits distribués. Il peut y avoir des stratégies différentes : une marge importante dès le début, conquérir le plus possible de clientèle en jouant la quantité plutôt que le taux, etc. »

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A quoi s’attendre en 2016 ?

D.C. : « Très clairement, sur l’actif général, il y aura une nouvelle baisse. Je ne serais pas étonné qu’elle soit de l’ordre de 0,2 point. Euro Allocation Long Terme devrait afficher une relative stabilité. Par contre, sur nos fonds euros dynamiques, cela va dépendre de la performance de la gestion financière. 2016 est mal parti. Mais nous n’avons pas désensibilisé. Nos clients bénéficieront donc d’une possibilité de retour vers meilleure fortune. »

Spirica lance en 2016 une offre de robo-advisors (« robots-conseillers »), en partenariat avec la fintech Fundshop. Comment cela fonctionnera-t-il ?

D.C. : « Nous serons dans une logique d’option sur nos contrats existants. Elle sera introduite d’ici l’été pour les partenaires qui le souhaitent. Le conseil en allocation d’actifs est un élément important de la chaîne de valeur ajoutée. Des outils comme les robo-advisors sont intéressants dans ce cadre. »

Quels sont vos rapports avec les courtiers internet ? On les entend dire que les contrats sont difficiles à modifier « à cause de l’assureur ». Vous dictez votre loi ?

D.C. : « Nous avons un outil de gestion extrêmement souple mais, il y a des choses que l’on ne sait pas faire. Par exemple, pour les SCPI, nous ne savons pas donner le choix au client entre le versement des dividendes sur le fonds euros ou en parts de SCPI. C’est l’un ou l’autre, et c’est notre partenaire qui fait le choix initialement. »

Peut-on changer de direction ? Interpelé sur les SCPI par ses clients depuis trois ans, Linxea répond que le mode de rémunération est bloqué par Spirica pour le contrat Spirit. Pourquoi ?

D.C. : « Soyons clair. Si l’un de nos partenaires nous demande de basculer les dividendes de SCPI sur fonds euros, on le fera. Cela ne dépend que de lui, mais ce sera pour tous ses clients. D’ailleurs, notre sentiment, c’est qu’il vaut mieux verser les dividendes sur le fonds euros. Cela offre plus de liberté au client. »

Malgré les vents contraires, l’assurance-vie a-t-elle encore de l’avenir ?

D.C. : « Pour moi, l’assurance-vie a encore une belle carte à jouer. Même s’il faut s’adapter aux changements de réglementation. À moyen terme, si les taux ne remontent pas, il est possible que les rendements soient à 1%, au mieux 1,5% à 2% pour notre actif général. Et un point de plus pour nos fonds diversifiés, si nous parvenons à avoir des gestions pertinentes. »