Pour les produits d’épargne, 2015 restera l’année marquant le passage, à la baisse, de plusieurs caps symboliques. Le Livret A sous les 1%. Le taux du PEL diminué pour la première fois depuis plus de 10 ans et au niveau le plus bas de son histoire, à 2%. Et des rendements de l’assurance-vie de plus en plus rarement au-dessus de 3%. Rebelote en 2016 ? Très probablement : les principaux taux de l’épargne risquent encore de baisser de concert.

Le PEL en 2015 : baisse du taux au 1er février

Mercredi 14 janvier 2015, au matin, l’Insee publie une inflation (hors tabac) nulle sur les douze derniers mois. En appliquant à la lettre la formule de calcul, le taux du Livret A, détenu par environ 9 Français sur 10, pourrait baisser de 1% à 0,25%. Le lendemain matin, le gouverneur de la Banque de France de l’époque, Christian Noyer, propose 0,75%, ce qui laisse à penser qu’un consensus s’est noué entre Bercy et l’institution monétaire autour de ce taux. Cependant, le jeudi soir, à 21h27, grosse surprise : le ministère des Finances prend le contrepied en diffusant un communiqué annonçant le maintien du taux du Livret A à 1% mais baisse à 2% le taux de rémunération des Plans d’épargne logement ouverts à compter du 1er février 2015.

2016 : le rendement du PEL à nouveau menacé

Ce scénario va-t-il se reproduire ? Impossible à dire à l’heure où sont écrites ces lignes, étant donné l'enjeu politique et symbolique de cette rémunération de l’épargne réglementée. Mais même à 2% brut, le taux du Plan épargne logement reste une épine dans le budget des établissements financiers : « Dans le contexte actuel de taux bas, le PEL devient la ressource clientèle la plus coûteuse pour les banques », jugeait ainsi Laurent Quignon, économiste chez BNP Paribas, sur cBanque en août dernier. Au cœur de l’été, Christian Noyer s’était d’ailleurs chargé de dénoncer le « taux trop élevé » du PEL.

Ce dernier n’est plus gouverneur de la Banque de France mais son remplaçant, François Villeroy de Galhau, avait lui-même qualifié le taux du PEL d’« anomalie de marché » quand il faisait partie de l’équipe dirigeante de BNP Paribas. Selon les dernières statistiques de la BdF, l’application stricte de la formule de calcul, hors taux plancher (actuellement à 2%), aboutit à un taux du PEL à 0,50%. Et la semaine passée, une indiscrétion du quotidien Le Monde a rendu l’hypothèse d’une baisse de ce taux plancher encore plus plausible. La décision pourrait être « effective le 1er février 2016 ». Bis repetita ?

Lire à ce propos : Les 2% du PEL en sursis ?

Le Livret A en 2015 : baisse du taux à 0,75%

En 2015, Bercy a donc décidé de maintenir le taux du Livret A à 1% au 1er février, pour finalement l’abaisser à 0,75% au 1er août. A l’époque, suite à une légère remontée de l’inflation, la formule de calcul donnait un taux théorique de 0,50%. Contrairement au début d'année, le ministère des Finances et la Banque de France ont cette fois accordé leurs violons pour fixer le taux à 0,75%. Une première : jamais le Livret A n’avait servi une rémunération sous la barre symbolique des 1%.

2016 : le Livret à 0,50% ou 0,25% ?

Premier rendez-vous en 2016 : le mercredi 13 janvier, à 8h45, avec l'annonce par l’Insee de l'inflation de décembre, sur 12 mois glissants, principal indicateur pour réviser le taux au 1er février. Il faudra alors scruter les communications de la Banque de France puis de Bercy. L’hypothèse la plus plausible voudrait que le taux du Livret A soit à nouveau abaissé, probablement à 0,50%, au 1er février voire au 1er août si le scénario de 2015 se reproduit.

Quoi qu'il en soit, la commission des banques (pour les fonds qu'elles centralisent à la Caisse des dépôts) baissera, elle, à 0,30% au lieu de 0,40%, dès le 1er janvier 2016.

Revoir aussi notre dossier sur le Livret A à 0,75%

L’assurance-vie en 2015 : des rendements grignotés

A la différence du PEL ou du Livret A, les taux des fonds en euros de l’assurance-vie ne font pas l’objet d’un choix du gouvernement. Même si le ministre des Finances, Michel Sapin, et les « sages de la finance » (gouverneur de la Banque de France, présidents de l’AMF, de l’ACPR, etc.) réunis au sein du Haut Conseil de stabilité financière ne se privent pas de livrer leurs recommandations aux assureurs. Fin 2014, le gouverneur de la Banque de France avait ainsi appelé à une baisse « significative » des rendements de l’assurance-vie. De 2,80% au titre de l’année 2013, le moyen rendement est passé à 2,54% en 2014. Diminution certes, mais pas la baisse « significative » réclamée, ni la chute des rendements prédite par certains observateurs !

2016 : une nouvelle érosion se dessine déjà

Comme l’an passé et à la différence des années 2012 ou 2013, le bal des annonces de taux a débuté tardivement en cette fin 2015. Les assureurs poussent même la ressemblance avec 2014 en annonçant leurs baisses dans la même chronologie. La filiale de la Macif, Mutavie, a annoncé ses taux (jusqu'à 2,40%) la première, le 16 décembre. Puis la Mif (3,30%). Puis AG2R La Mondiale (jusqu'à 3%). Dans une belle unité, ces assureurs ont ainsi communiqué des rendements perdant de 0,20 à 0,35 point selon les cas, ce qui confirme les pronostics d’une érosion sensible. Mécaniquement, les taux au-dessus de 3% vont se faire de plus en plus rares et les plus faibles s'établiront sous la barre des 2%.

Comme l’an passé, là encore, les « sages de la finance » ont appelé les assureurs à servir des rendements en adéquation avec le contexte de taux bas. Ils sauront très rapidement si leur recommandation est suivie : le bal des annonces de taux 2015 va battre son plein en janvier 2016, puis s’étirer tout au long du mois de février.

Lire aussi : Une nouvelle ligne de démarcation pour les rendements de l’assurance-vie en 2016

Vers des taux de marché durablement bas

En 2016, les taux de l’épargne seront plus bas qu'en 2015 ? Très probablement. Mais ce constat n’est que la conséquence logique de la politique de taux bas sur l’ensemble des marchés financiers. Certes, la Banque centrale américaine (Fed) a amorcé le mouvement inverse, en annonçant une légère hausse du taux de refinancement à la mi-décembre, et la progression graduelle de ses taux directeurs pour les ramener à un niveau « standard » après de longs mois autour de zéro.

En Europe, a contrario, la banque centrale (BCE) a choisi de poursuivre le mouvement baissier pour soutenir et encourager l'activité économique. Le taux de dépôt, déjà négatif, a ainsi été porté à -0,30%. Et en France, aucun signal ne permet d’entrevoir une sortie de la période de taux bas. L’inflation n’est certes pas encore retombée en territoire négatif, comme en janvier 2015 (-0,4%), mais elle colle à nouveau au zéro depuis plusieurs mois, malgré un soubresaut au printemps.