Dans son dernier Focus de marché, la Banque de France analyse l’évolution du patrimoine financier des ménages français entre 2000 et 2014. Principaux enseignements : une épargne qui s’étoffe sensiblement et qui se concentre sur « les produits à traitement fiscal favorable et à rémunération réglementée » tels que les Livrets A, LDD, Plans d’épargne logement ou encore l’assurance-vie.

4.258 milliards d’euros à fin septembre 2014 : voilà ce que pèsent les placements financiers des ménages français, « plus de deux fois le PIB, » note la Banque de France dans son étude. En 2000, ce patrimoine ne s’élevait « qu’à » 2.478 milliards, soit une croissance de près de 72% en 15 ans, alors que sur la même période, l’institution fait état d’un investissement des ménages dans l’immobilier quasiment stationnaire.

Quels supports profitent le plus de cet accroissement ? Incontestablement l’épargne réglementée et les contrats d’assurance-vie qui, selon la Banque de France, concentrent en 2014 plus de la moitié (52%) de l’ensemble du patrimoine, contre 44% en 2000. A elle seule, l’assurance-vie voit sa part de marché passer de 27% à 37% sur ces 15 dernières années, et ce malgré un certain « passage à vide » en cours de route avec la crise financière et un minimum de souscriptions à 21 milliards d’euros en 2012, loin du record de 2006 à 94 milliards. Des montants en cours de reprise, avec 38 milliards en 2013 et 50 milliards en 2014.

Investissements plus risqués « découragés »

Mais la Banque de France met l’accent sur l’orientation croissante vers l’épargne réglementée après l’éclatement de la crise financière. Les causes : « Au sein des dépôts bancaires, les Livrets A et de développement durable (LDD), totalement liquides, défiscalisés, exonérés des prélèvements sociaux et bénéficiant de la garantie de l’État, offrent, depuis 2008, une rémunération fortement supérieure au taux de politique monétaire. » Un avantage renforcé encore par l’extension de la distribution du Livret A à tout le système bancaire en 2009 et le relèvement des plafonds en 2012. Et l’on sent bien que cette orientation n’est guère du goût de l’institution, qui avance que « cela a pu contribuer, au plan macroéconomique, à une relative faiblesse de l’investissement et de l’innovation, pourtant importants pour la compétitivité des entreprises, donc pour la croissance et l’emploi. » Et la Banque de France d’insister en arguant que cette épargne réglementée se trouve de plus en plus concentrée chez les ménages aisés, découragés d’investir sur des placements plus risqués et à la fiscalité nettement moins favorable. Illustration : à fin 2014, des livrets A supérieurs au plafond de 22.950 euros qui pèsent pas moins de 20% des encours totaux. Pire côté LDD : les livrets dépassant les 12.000 euros représentent près de 50% des encours.

La Banque de France y voit la cause du désengagement des Français de la détention directe de titres, au-delà des fluctuations conjoncturelles. Car si les ménages ont certes acquis pour 18 milliards de titres cotés entre 2000 et 2006, « en cumul sur la période 2007-2014, ils vendent en net pour 76 milliards de ces titres »… Néanmoins, l’institution note que les ménages investissent toujours dans le capital d’entreprises non cotées. Un flux plus difficile à évaluer, qu’elle estime toutefois à 14 milliards par an en moyenne depuis 2000.