Quand les emprunteurs négocient leur crédit immobilier, ils se concentrent en priorité sur le taux d’intérêt, éventuellement sur l’assurance de prêt voire la caution bancaire… mais rarement sur les « petites » clauses du contrat. A tort ! Parmi les clauses à négocier : les conditions de remboursement anticipé.

Revente, hausse de revenus, héritage, grosse somme d’argent inattendue… De nombreux événements peuvent inciter à réaliser un remboursement anticipé de crédit immobilier, total ou partiel. Mais ces événements paraissent bien lointains au moment de signer l’offre de prêt. C’est pourtant au moment de la demande de crédit que peuvent se négocier les conditions de remboursement anticipé, plus ou moins avantageuses selon les contrats.

Clause n°1 : un seuil de 10% du montant initial de l’emprunt

Le Code de la consommation fixe deux grandes barrières, que les banques ne peuvent dépasser, pour les modalités de remboursement anticipé. La première : « Le contrat de prêt peut interdire les remboursements égaux ou inférieurs à 10% du montant initial du prêt, sauf s’il s'agit de son solde. »

Ce seuil n’est pas négligeable. Si une banque indique ce pourcentage maximal dans le contrat, pour un emprunt immobilier de 200 000 euros, un remboursement anticipé n’est possible que s’il est supérieur à 20 000 euros. Sauf s’il reste moins de 20 000 euros à rembourser. Et ce montant reste figé pendant toute la durée du prêt !

Ce que vous pouvez négocier

A vous de vérifier le montant minimum demandé dans la future offre de prêt, en réclamant des précisions au banquier ou courtier si vous n’avez pas encore pris connaissance des conditions générales. Si c’est le seuil légal de 10% qui est indiqué, il faut tenter de l'abaisser. Il est tout à fait possible de déroger à cette limite de 10%, à condition que cela soit inscrit dans le contrat : vous pouvez réclamer un seuil minimal équivalent à 2 ou 3 mensualités de remboursement, par exemple. Ce seuil peut être exprimé en montant ou en nombre de mensualités.

Clause n°2 : des indemnités correspondant à 6 mois d’intérêts

L’autre barrière fixée par la réglementation concerne le montant maximum des indemnités de remboursement anticipé (IRA). En effet, si vous souhaitez payer tout ou partie du capital que vous devez à la banque, cette dernière peut exiger des IRA, à condition qu'elles soient stipulées dans le contrat. Le Code de la consommation en fixe une double limite. Le montant des indemnités ne doit dépasser :

  • ni « un semestre d’intérêt sur le capital remboursé au taux moyen du prêt » ;
  • ni « 3% du capital restant dû avant le remboursement ».

C'est donc le plus bas de ces deux seuils qui s'applique. Dans l’actuel contexte de taux au plancher, la limite du « 3% de capital » est caduque : les 6 mois d’intérêts sont aujourd’hui systématiquement inférieurs. Et ils constituent ainsi la limite légale des pénalités. Pour les prêts immobiliers récents, le maximum d’indemnités de remboursement anticipé correspond donc à six mois d’intérêts de la somme remboursée (à ne pas confondre avec six mensualités).

Exemple, pour un emprunt de 200 000 euros à 1,20% sur 20 ans contracté en 2019. Les emprunteurs souhaitent rembourser l’intégralité de leur crédit au bout de 4 ans (en 2023). Le capital restant dû est alors de 163 743 euros.

Les indemnités de remboursement anticipé s’élèvent au maximum à 982 euros, soit 6 mois d’intérêts sur la somme remboursée au taux annuel de 1,20% (soit 163 743 × 1,20% × 6 ÷ 12). A titre de comparaison, en appliquant la limite alternative du « 3% de capital restant dû », les indemnités seraient de 4 912 euros : un seuil cinq fois plus élevé, et qui ne s'applique donc pas.

Exemple réalisé à l’aide de nos calculatrices d’emprunt

Les prêts immobiliers se négocient actuellement avec des taux à des niveaux records, au plus bas : 0,96% sur 15 ans, 1,14% sur 20 ans et 1,37% sur 25 ans selon l’observatoire Crédit Logement-CSA. Dans ces conditions, comme le montre la simulation ci-dessus, les IRA avoisinent les 1 000 euros maximum dans de nombreux cas : c’était le double il y a 3 ou 4 ans, le triple voire le quadruple plusieurs années en arrière !

En revanche, ces pénalités sont mécaniquement plus élevées pour des emprunteurs présentant un moins bon dossier. Par exemple, en empruntant 250 000 euros à 2% sur 25 ans, le montant maximum des IRA sera de 2 179 euros au bout de 4 ans.

Ce que vous pouvez négocier

Difficile d’obtenir la suppression totale des IRA : les banques acceptent rarement d’exonérer leurs emprunteurs de pénalités en cas de rachat du crédit par la concurrence. En revanche, vous pouvez tenter de limiter leur champ d'application : pas d’IRA après une certaine durée (10 ans par exemple), pas d’indemnités en cas de remboursement total faisant suite à une vente, absence totale de pénalités sauf en cas de rachat… « Avec les taux bas, nous avons moins de demandes d’exonération d’IRA, confie Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi. Mais si l’emprunteur cherche à négocier sur ce point, la banque peut déroger aux seuils prévus par la loi. L’exonération la plus courante est l’absence d’IRA en cas de revente du bien immobilier. »

A savoir : pour les prêts conclus depuis juin 1999, la loi prévoit aussi qu’aucune indemnité n’est due en cas de vente (et donc de remboursement anticipé total) faisant suite à un impondérable. Pas d’IRA, donc, en cas de vente faisant suite à une mobilité professionnelle, un décès ou une cessation forcée de l’activité professionnelle de l’emprunteur ou du conjoint.

D’autres clauses que vous pouvez tenter de négocier

Si votre montage financier se fait sur plusieurs lignes de crédit, ou s’il inclut un Prêt à taux zéro, vous pouvez aussi demander que tout remboursement anticipé se fasse en priorité sur la ligne de crédit au taux le plus élevé.

Au-delà des seules pénalités de remboursement anticipé, vous pouvez aussi réclamer l’inscription d’une clause permettant la modulation des échéances de prêt, à la hausse ou à la baisse.

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