D’un côté l’assurance de groupe que proposent quasi systématiquement les banques à l'occasion d'un crédit immobilier, de l'autre les contrats alternatifs distribués par des assureurs non liés à l'établissement prêteur. Si les contrats bancaires ont leurs avantages, notamment pour les emprunteurs les plus âgés, les assurances de prêt alternatives, en délégation, s'avèrent plus rentables pour de nombreux profils. Pour quelle différence de coût ? Le point.

L’assurance de prêt la plus chère n’est pas forcément la meilleure : « Les tarifs peuvent varier du simple au double pour des qualités de garanties souvent décorrélées du prix », soulignait le cabinet spécialisé BAO dans un rapport sur l’assurance emprunteur à la mi-2014. Et BAO de balayer « l’idée reçue » selon laquelle les contrats standards bancaires disposent « de garanties supérieures » à celles des contrats alternatifs. Malgré cela, « avec les délais courts au moment de l’achat immobilier, les acquéreurs choisissent souvent l’option de facilité en signant dans leur banque », constate pour sa part Myriam Castel, responsable prévoyance et épargne chez MMA Vie.

Pourtant, depuis 2010 et la loi Lagarde, la banque ne peut plus refuser une assurance de prêt alternative si le niveau des garanties est équivalent. Mais cette incitation à la concurrence n’a pas encore percé : les banques pèsent environ 85% du marché, voire plus selon les études, la fédération des assureurs évoquant seulement 11% en délégation en 2013 dans son dernier rapport sur le sujet. La loi Hamon, dont le volet assurance emprunteur est entré en vigueur à l’été 2014, est censée favoriser cette mise en concurrence, notamment en donnant aux emprunteurs un délai d’un an après l’offre de prêt pour changer d’assurance.

Des emprunteurs « plus avisés sur l’assurance »

Les assureurs traditionnels se lancent petit à petit sur ce terrain. Exemples : Matmut n’a lancé son assurance de prêt qu’en octobre 2013, pour 1.600 souscriptions à la fin 2014, MMA a lancé la sienne à l’été 2014, pour « environ 4.000 assurés » à ce jour. Et la médiatisation de la loi Hamon change la donne : « Les emprunteurs sont beaucoup plus avisés sur l’assurance », témoigne Jauffrey Ianszen, directeur régional d'Immoprêt sur la métropole lilloise. « Certains viennent parfois avec un article, voire même un texte de loi. Ils sont demandeurs de conseils sur ce sujet. »

Un coût divisé par deux ou trois selon les cas

Courtiers et assureurs délégués promettent des tarifs très avantageux. Dans un communiqué récent, la Macif annonçait 10.000 euros d’économies pour un emprunt de 150.000 euros sur 20 ans, et un tarif quasiment divisé par trois. Chez MMA, Myriam Castel certifie même que « pour des profils très jeunes, autour de 25 ans, on peut diviser parfois par 5 ou 6 le coût total » vis-à-vis d’un contrat groupe souscrit dans un banque. L’assurance emprunteur étant un produit complexe, avec de multiples paramètres entrant en ligne de compte (montant et durée d’emprunt, âge et santé de l’assuré, etc.), il s'avère difficile de vérifier ces promesses. Nous avons soumis un profil « classique », un couple de trentenaires empruntant 200.000 euros, au courtier Immoprêt pour qu’il simule cette comparaison.

Coût de l'assurance emprunteur, pour un couple et un emprunt de 200.000 euros
Type d'assuranceQuotité : 100%
sur chaque emprunteur
Quotité : 50%
sur chaque emprunteur
Taux moyen
d'assurance
Assurance groupe,
auprès d'une banque
22.080 euros11.040 euros0,276%
Assurance déléguée,
auprès d'un assureur alternatif
7.658 euros3.827 euros0,096%
Simulation pour un couple de 30 ans, non fumeur, non cadres, avec un revenu global de 4.000 euros par mois, pour un projet d'emprunt de 200.000 euros à 2,20% sur 20 ans.

A propos des quotités, lire l’article : Diminuer le coût de l'assurance de prêt avec une couverture au plus juste

Histoire de confirmer cet écart du simple au triple, le même profil a été soumis à MMA, qui aboutit à un coût de 3.501 euros « par tête », soit 7.002 euros, en incluant la « réduction co-emprunteur » pour une quotité à 100% chacun. Un tarif relativement proche de celui évoqué par Immoprêt, dont le contrat alternatif est celui d’un assureur lié à un groupe bancaire qui propose de la délégation.

Plus rentable pour les jeunes emprunteurs

Cet écart du simple au triple est valable pour ce couple de trentenaires non-fumeurs : « Pour des personnes plus âgées, l’assurance groupe est parfois plus intéressante », avance Jauffrey Ianszen. Pourquoi ? « En délégation, l’assurance est individualisée et le coût évolue en fonction du risque pour l’assureur : c’est donc bien moins cher pour un jeune », explique Myriam Castel, de MMA. « Dans les banques, l’offre est groupée, le coût est calculé sur la base d’un âge moyen. » En bref, le tarif est le même pour tous, quel que soit l’âge. « Toutefois, certaines banques segmentent désormais les âges, avec un tarif jeune, un autre pour les classes d’âge moyen et un pour les seniors », précise-t-elle.

Des mensualités dégressives

L’autre grande différence entre contrat bancaire et contrat alternatif, même s’il existe des exceptions, c’est l’évolution des cotisations mensuelles : elles sont fixes sur l’ensemble de la durée pour le contrat de groupe bancaire, évolutives pour le contrat externe. Pourquoi ? Car à la différence de l’assurance collective proposée par la banque, l’assureur délégué recalcule les cotisations tous les ans en réévaluant le risque en fonction de l’âge de l’emprunteur et du capital restant dû. La prime d’assurance va augmenter, à cause de l'âge, mais le montant assuré va diminuer. Conséquence : « La cotisation augmente les premières années, puis diminue à mesure du remboursement du prêt pour tendre vers zéro les dernières années », explique l’assureur GMF sur son site.

Dans le cas de la simulation évoquée plus haut, pour une quotité à 100% sur chaque tête, la cotisation mensuelle est de 92 euros pour le contrat bancaire, pendant toute la durée de remboursement. Pour l’assurance en délégation, la cotisation est de 49,96 euros la première année, grimpe à 55,94 euros la deuxième, puis diminue progressivement jusqu’à atteindre 12,34 euros par mois la 19e année de remboursement et 6,88 euros la dernière.

« Encore des bâtons dans les roues »

Dans de nombreux cas, la délégation d’assurance permet de réaliser des économies. Problème : « Les banques mettent encore des bâtons dans les roues », regrette Myriam Castel, de MMA. En agence, certains conseillers clientèle avancent parfois un taux avantageux, avant de retirer leur proposition dès qu’il est question de délégation d’assurance.

Faut-il donc prendre l’assurance proposée par la banque avant de la substituer par un contrat externe pendant l’année suivante ? Ce raisonnement ne convainc ni le courtier Jauffrey Ianszen, ni Myriam Castel : « Notre priorité, c’est la délégation d’assurance au moment de l’offre de prêt », affirme la responsable prévoyance et épargne de MMA. « Après, une fois que c’est signé dans la banque, les emprunteurs s’installent : ils n’ont plus forcément le temps et l’énergie pour demander la substitution, même si cela est possible grâce à la loi Hamon. » Plusieurs années après la souscription, il reste la renégociation de crédit, qui permet aussi d’opérer un changement d’assurance emprunteur.

Les banques sont conscientes que la concurrence fourbit ses armes. Pour preuve, elles affutent des « contre-offres défensives », parmi lesquelles des couvertures collectives « réaménagées », selon une étude de Xerfi, et des assurances individuelles, à cotisations dégressives au cours du remboursement de crédit.