Frais de service des rentes, de gestion du fonds de rente, de paiement des rentes, frais sur encours de rentes, sur arrérages de rentes, sur quittances d’arrérages, etc. Les assureurs multiplient les appellations pour prélever leurs commissions sur les rentes viagères dans les contrats qui y donnent accès : assurance-vie, PEA, Perp, Madelin retraite, Perco, « article 83 » et bien évidemment contrat de rente viagère. Que cachent ces différents frais ?

Une normalisation de l’appellation des frais pour les rentes viagères ? « Cela ne pourrait pas nuire à la transparence et à la compréhension », acquiesce Bernard Le Bras, le président du directoire de Suravenir, filiale du Crédit Mutuel Arkéa. Dans les conditions générales de leurs contrats d’épargne retraite, les assureurs distinguent généralement frais à l’entrée, frais en cours de vie du contrat, qui correspondent à la phase d’épargne, et frais de sortie, qui correspondent à la phase retraite, ou phase de rente. Dans cette dernière catégorie, trois grandes familles cohabitent : frais d'arrérage, « frais de conversion » et frais de gestion.

Les frais d’arrérage de rente

Le contrat évoque des « frais sur arrérages de rentes », sur « quittances d’arrérages de rentes » voire des « frais de gestion sur arrérages de rentes » ? Il s’agit d’une ponction que l’assureur réalise lors du versement de chaque rente à son bénéficiaire, le mot « arrérage » signifiant tout simplement « somme d’argent due et versée périodiquement à un créancier ». Le montant de ces frais est le plus souvent de 3% du montant brut de la rente versée. Certains assureurs se différencient tout de même, à l’image d’Axa qui applique des « frais forfaitaires de service de rente », par ailleurs appelés frais sur quittances d’arrérages. Ils sont de 2 ou 5 euros « par arrérage » sur le contrat d’assurance-vie Cler de l’association d’épargnants Agipi.

Les « frais de conversion »

Avant que l’assureur ne commence à verser les arrérages, le capital acquis lors de la phase d’épargne est transformé en rente viagère. On parle parfois de « conversion de l’épargne en rente viagère ». Schématiquement, le capital acquis est mis de côté par l'assureur dans une poche dédiée, qui lui permettra de servir les futures rentes.

Les assureurs appliquent-ils des « frais de conversion » ? S’ils ne sont jamais désignés ainsi dans les contrats analysés, ils se cachent parfois derrière d’autres dénominations. C’est le cas chez Apicil où la direction technique « confirme que les frais de service des rentes sont prélevés une seule fois lors de la conversion de l'épargne en rente viagère de façon à représenter actuariellement 3% de chaque arrérage de rente qui sera servi ». En bref, chez Apicil, il n’y a pas de frais d’arrérage, les 3% étant ponctionnés plus tôt, au moment du passage du contrat de la phase d’épargne à celle de rente.

Faut-il conclure que les « frais de service des rentes » ou « de la rente » sont forcément des frais de conversion ou de transformation ? A priori non, cette appellation étant suffisamment ambiguë pour pouvoir désigner, dans certains contrats, des frais d’arrérage.

Des frais de gestion du fonds de rente

Les tarifs évoqués ci-dessus cohabitent parfois avec une autre catégorie de commissions : les « frais de gestion du fonds de rente », « sur encours de rentes », appelés aussi de façon plus généraliste « frais de gestion des rentes ». Le niveau de tarification est ici plus variable mais il avoisine généralement le niveau des frais de gestion du fonds en euros, en phase épargne, le plus souvent entre 0,60% et 0,90%. Les frais de gestion du fonds de rente fonctionnent de la même manière : ils sont calculés sur l’encours global et sont déduits, chaque année, de la revalorisation du fonds de rente.

Attention toutefois : cette catégorie n’apparaît pas systématiquement parmi les « frais de sortie » dans les conditions générales. Ils figurent parfois parmi les « autres frais ».

Différentes politiques selon le type de contrat

Qui applique quels frais ? Les politiques tarifaires diffèrent fortement d’une compagnie à une autre. Exemple, Apicil facture 0,75% de frais de gestion du fonds de rente et 3% de service des rentes, et ce « quel que soit le type de contrat : retraite, Perp (Plan d’épargne retraite populaire), Madelin et même assurance-vie dans la mesure où l'assuré a choisi ce mode de sortie », affirme le service presse de l’assureur.

Suravenir différencie pour sa part le mode de tarification selon le produit d’épargne : « Le Perp a des frais sur encours de rentes à 0,68% et des frais sur arrérages de rentes à 0%. Nos contrats d'assurance-vie ont des frais sur encours de rentes à 0% et des frais sur arrérages de rentes à 3% », confirme l’assureur. La filiale du Crédit Mutuel Arkéa a fait évoluer sa politique tarifaire pour le Perp au 1er janvier dernier afin de « mieux coller aux pratiques actuelles du marché » selon le président du directoire, Bernard Le Bras. Une évolution qui concerne tous les détenteurs de Perp gérés par Suravenir, anciens comme nouveaux.

Pourquoi avoir fait évoluer cette tarification ? « Notre contrat Prévi-horizons a été construit à l’origine du dispositif, en 2003. Nous avions appliqué ce qui était la tarification traditionnelle sur les rentes viagères. » Mais le marché a évolué : « Nous avons constaté que sur les nouveaux Perp, commercialisés par les conseillers en gestion de patrimoine indépendants ces dernières années, les frais d’arrérage ont disparu. Nous avons donc décidé de nous aligner. » Principal intérêt, figurer en bonne place dans les comparatifs de Perp : « Même si de nombreux internautes ne savaient peut-être pas ce qu’étaient les frais d’arrérage, le seul fait de voir du 3% de frais en face de contrats qui pouvaient afficher des frais à 0% avait un effet très dissuasif », reconnaît Bernard Le Bras. Ce dernier appuie l’aspect « plus simple et plus transparent » des frais sur encours de rente, fixés à 0,68% comme pour les frais de gestion de la phase d’épargne du Perp.

En résumé : trois types de frais qui peuvent se cumuler

S’il existe de multiples appellations pour les tarifs pesant sur les rentes viagères, ceux-ci peuvent être appliqués à trois moments de la phase de rente : au début, lors de la conversion de l’épargne en rente viagère (« frais de service des rentes » chez Apicil), sur la durée (« frais de gestion du fonds de rente », « sur encours », etc.), ou lorsque l’argent est versé au bénéficiaire (« frais d’arrérage », etc.). Et les assureurs utilisent l’un de ces trois leviers, ou deux, voire éventuellement trois.