Selon un article du magazine économique Challenges, l’assureur Aviva est en conflit judiciaire avec une poignée de ses clients disposant de contrats d’assurance-vie « à cours connu » datant des années 1990 et lestés aujourd’hui de sommes colossales.

Le Britannique Aviva, sixième assureur mondial et gestionnaire en France d’un des principaux contrats d’assurance-vie, celui de l’association d’épargnants Afer, devra-t-il verser plusieurs milliards d’euros à une poignée d’assurés à cause d’une erreur faite au siècle dernier ? C’est un scénario plausible, si l’on en croit l’histoire narrée par Challenges.

A la fin des années 1980, Abeille-Vie, un assureur racheté par Aviva en 2002, commercialise un contrat d’assurance-vie destiné à ses meilleurs clients. Une vraie « martingale boursière », explique Challenges : il permet en effet aux souscripteurs d’acheter et de vendre des titres au dernier cours connu. « Autrement dit, lorsque la bourse avait monté, l’épargnant pouvait acheter une Sicav au cours d’avant la hausse ». Et vice-versa. Le produit attire des clients fortunés et bien conseillés. Certains cadres d’Abeille-vie profitent également de l’aubaine, explique Challenges, allant « jusqu’à emprunter pour placer de très grosses sommes ».

Internet change la donne

Comment l’assureur a-t-il pu concevoir un produit aussi dangereux, qui fait peser entièrement sur lui le risque pris par ses clients ? Il faut se replacer dans le contexte de cette époque. « les Sicav n’étaient pas cotées chaque jour comme aujourd’hui mais une fois par semaine », rappelle Challenges. « De plus, les possibilités de passer des ordres étaient limitées (…). »

Mais voilà, la généralisation d’internet, à partir du milieu des années 1990, change la donne. Certains investisseurs tirent parti de ces nouvelles possibilités et se mettent à multiplier les arbitrages… et les gains. Aviva en est conscient, mais refuse d’indemniser ses clients en échange de la fermeture de leurs contrats, comme l’ont fait d’autres assureurs ayant commercialisé ce type de produits, Axa notamment.

Aviva passe en force

L’assureur britannique choisit au contraire de passer en force, explique Challenges : « Il commence par réduire le nombre des supports, supprimant progressivement les plus volatils, les supports actions, ceux qui permettent de profiter des variations de la bourse. Puis il tente ensuite de faire signer des avenants aux 20.000 souscripteurs de son contrat pour qu’ils y renoncent. » La plupart finissent par céder. Mais certains récalcitrants refusent de clôre, et contre-attaquent en faisant constater par huissier les opérations passées sur leurs contrats, opérations qu’Aviva a fini par refuser de comptabiliser.

Aujourd’hui, l’encours de ces quelques contrats se chiffre « en milliard d’euros », estime un avocat spécialisé interrogé par Challenges et grimpe à toute vitesse, avec des « progressions annuelles comprises entre 40% et 100% ». Aviva, de son côté, fait appel de presque toutes les décisions de justice défavorables. Cependant, en septembre dernier, la Cour de cassation l'a condamné à verser 1,4 million d'euros à un plaignant, en guise d'indemnisation de sa « perte de chance ». Affaire à suivre.