La date limite de paiement de la taxe d’habitation est dépassée pour une large partie des contribuables. L’échéance passée, le syndicat Solidaires-Finances publiques prévoit une nouvelle hausse des demandes de délais de paiement et remises gracieuses. Il évoque une atmosphère plus tendue que par le passé dans les centres d’impôts.

L’affaire des 60 parlementaires en délicatesse avec le fisc. L’affaire Thomas Thévenoud, forcé à démissionner du gouvernement pour s’être soustrait à ses obligations déclaratives. Deux motifs de mécontentement pour les contribuables venus évoquer leurs difficultés à payer leur dû dans les centres des impôts : « Les collègues se font un peu agresser » à ce sujet, affirme auprès de cBanque Florence Toquet, secrétaire nationale de Solidaires-Finances publiques, qui se présente comme le premier de l’administration fiscale. « Le ressenti en agence, c’est que les contribuables sont remontés ! Nous avions déjà eu ce type de phénomène l’an passé avec l’affaire Cahuzac. » Et Florence Toquet d’insister sur les réductions d’effectifs au sein de la Direction générale des finances publiques (DGFIP) alors que la fréquentation est croissante dans les centres d’impôts. Or, « avec l’attente, le mécontentement se fait plus pressant à l’accueil ».

Deux raisons pour lesquelles ce syndicat a diffusé un communiqué présentant le lundi 17 novembre, échéance principale de paiement de la taxe d’habitation (1), comme une journée « à risque ». En effet, ce même communiqué rappelle que « trois quarts des foyers fiscaux sont imposables à la taxe d’habitation ».

Recours gracieux : +15,2% en deux ans

Dans les centres des impôts, selon Florence Toquet, les difficultés concernent surtout les personnes ayant dépassé le seuil d’entrée dans l’impôt sur le revenu : « Cela fait quelques années que l’on enregistre une hausse des demandes sur les impôts locaux. Il s’agit surtout de personnes non imposables par le passé et qui, après avoir réglé l’impôt sur le revenu en septembre, se retrouvent en difficulté pour payer les impôts locaux et en particulier pour la taxe d’habitation, en novembre. En difficulté financière, ces personnes vont alors demander un étalement du paiement de la taxe d’habitation. »

Selon les statistiques de la DGFIP, les recours gracieux (2), demandes d’abandon de tout ou partie de l’impôt suite à des difficultés financières, sont passés de 405.252 en 2011 à 466.866 en 2013 pour la taxe d’habitation, soit une hausse de 15,2%. Si elles ont baissé pour la taxe foncière (85.721 en 2013), elles ont assez nettement augmenté pour l’impôt sur le revenu, passant de 176.131 en 2011 à 215.366 en 2013, soit une hausse de 22,3%.

Délais de paiement et contentieux aussi en hausse

La tendance devrait se confirmer en 2014 selon le syndicat Solidaires-Finances publiques, même s’il ne dispose pas de suffisamment de données pour fournir des estimations nationales. Ces dernières années, la hausse des demandes gracieuses est « systématique » selon Florence Touquet. La secrétaire nationale du syndicat n’a pour l’heure que des remontées provenant de la région Poitou-Charentes où les recours gracieux ont augmenté de 9% pour l’impôt sur le revenu en 2014.

Dans cette région, les évolutions sont légèrement plus importantes concernant les demandes d’étalement de paiement (10%), toujours pour l’impôt sur le revenu, et surtout concernant les réclamations contentieuses (14%) même si cette dernière statistique est à prendre avec des pincettes à cause d’éventuelles erreurs de saisie.

Concernant les délais de paiement, que les contribuables peuvent réclamer si leurs revenus ont baissé de 30% ou plus, l'augmentation des demandes ne serait pas une nouveauté. L’an passé, Solidaire Finances publiques annonçait même qu’une demande avait été formulée « en interne » pour privilégier les étalements de paiement plutôt que les remises gracieuses.

Des évolutions réclamant explications

Sur la base de retours de personnels en agences au niveau national, Florence Toquet note deux points délicats cette année pour l’impôt sur le revenu : la suppression de la « demi-part pour les veuves », qui était progressive et qui a conduit à sa disparition totale cette année, et la fin de l’exonération des majorations de pensions pour les retraités ayant élevé 3 enfants ou plus. Ces deux évolutions ont nécessité des « explications » en agences auprès des contribuables concernés.

La secrétaire nationale de Solidaires-Finances publiques note enfin une dernière évolution réglementaire ayant engendré des difficultés en agences : le fait que les paiements en espèces aux guichets soient désormais limités à 300 euros. Une nouveauté qui pose problème aux Français n’ayant pas de compte bancaire, notamment à La Réunion.

(1) Certains avis ne sont envoyés qu'en novembre. Dans ce cas, la date limite de paiement est le 15 décembre. Pour les avis faisant apparaître une échéance au 17 novembre, les particuliers disposent d'un délai jusqu'au 22 novembre s'ils règlent leur dû sur internet. Les contribuables ayant opté pour le prélèvement mensuel ne sont évidemment pas concernés par ces échéances.

(2) La remise gracieuse est un abandon de la totalité de l’impôt, la modération gracieuse ne concerne elle qu’une partie de la somme due. Elles peuvent être demandées en cas de difficultés financières, notamment liées à des circonstances exceptionnelles ou à un écart disproportionné entre dette fiscale et niveau de revenus.