Plusieurs députés socialistes frondeurs, « confortés » dans leur démarche par Martine Aubry, pensent s'abstenir mardi lors du vote sur le projet de budget de l'Etat.

Leur position commune sur ce scrutin important doit être définie mardi matin lors de leur réunion hebdomadaire à l'Assemblée nationale, mais d'ores et déjà l'un de leurs animateurs, Christian Paul, estime que les frondeurs n'ont été « ni écoutés ni entendus », notamment sur le CICE, ce qui « ne prépare pas un vote positif ». « La logique voudrait que l'on s'abstienne », confirme son collègue Laurent Baumel.

« Ce budget met en œuvre la politique économique, dont on partage certains éléments mais pas d'autres », en particulier le gros effort demandé aux collectivités locales, déclare un autre chef de file du collectif Vive la Gauche, Jean-Marc Germain. « En s'abstenant, on dit qu'il faut continuer la réorientation de la politique économique, qui a commencé », ajoute-t-il.

Aubry, un soutien précieux

Ils assurent que leur décision ne sera pas influencée par le retour de Martine Aubry, qui critique ouvertement depuis dimanche une politique gouvernementale menée « au détriment de la croissance ». « Il faut distinguer ce qui relève du débat public national et ce qui relève des décisions parlementaires », appuie Christian Paul.

Le soutien de l'ex-Première secrétaire du PS est néanmoins « précieux », déclarent en choeur ces parlementaires. Pour Laurent Baumel, un ancien strauss-kahnien, « cela donne du crédit à notre discours, qui n'est pas un discours de gauchistes irresponsables », pour Pouria Amirshahi de l'aile gauche du PS « cela légitime, cela conforte ». Christian Paul le martèle : la maire de Lille n'est « ni derrière, ni devant les frondeurs », ce rassemblement hétéroclite né au printemps dernier après l'échec des municipales.

« Ceux qui pensent que les frondeurs sont le faux nez de Martine Aubry jugent maintenant avoir raison », mais en réalité il y a au sein de ce mouvement « plusieurs sensibilités qui convergent » avec la même problématique : « Faire réussir la gauche tant qu'il est encore temps », d'après Laurent Baumel.- Et « plus nous serons nombreux et plus nous pourrons obtenir un contrat de majorité » avec le gouvernement pour infléchir sa politique économique et sociale, selon Christian Paul.

Transgression trop forte pour certains

L'heure ne semble cependant pas à un élargissement important du cercle des frondeurs, qui sont actuellement 30 à 40. « Leur manière de faire ne me convient pas », explique ainsi le député Dominique Potier, qui a signé ce week-end la contribution de Martine Aubry pour les états généraux du PS, comme d'autres parlementaires non frondeurs. « Je prendrai part aux débats au sein du groupe PS pour faire valoir des idées neuves et contribuer à la réussite du gouvernement » mais « je respecterai la décision majoritaire du groupe PS » pour les scrutins, précise-t-il.

Laurent Baumel l'affirme : « Je connais beaucoup de députés qui sont d'accord avec nous depuis longtemps mais pour eux franchir le pas dans les votes serait une transgression trop forte ».

Pour sa part, l'ancien ministre du gouvernement Ayrault et proche de Martine Aubry, François Lamy, qui s'était abstenu mi-septembre d'accorder sa confiance à Manuel Valls mais n'est pas un frondeur, oscille entre abstention et vote pour le budget mardi. « J'hésite parce que ce budget s'inscrit dans le cadre de la politique du gouvernement », a déclaré à l'AFP, cet autre signataire de la contribution de Mme Aubry aux états généraux. Ce texte « n'est pas destiné à rassembler les frondeurs », relève-t-il.