« Diatribe », « réquisitoire », « attaque en règle », « vengeance »: les éditorialistes n'ont pas de mot assez fort lundi pour qualifier la charge de Martine Aubry contre la politique du tandem Hollande-Valls, tout en soulignant la capacité de la maire de Lille à se poser « en recours ».

« Aubry sort du bois ? Plutôt une bonne nouvelle », estime Laurent Joffrin (Libération). « La voici chef de l'opposition intérieure à la gauche, levant l'étendard de la social-démocratie si longtemps vilipendée au PS. C'est plus clair. »

De fait, « le véritable adversaire de Hollande a un visage » désormais, renchérit Stéphane Dupont (Les Echos). « Les frondeurs étaient peu nombreux et n'avaient pas de chef. Ils ont maintenant une figure de proue et leurs rangs pourraient vite grossir tant Martine Aubry dit tout haut ce que beaucoup d'élus socialistes pensent tout bas, sur le Cice, le travail le dimanche, les seuils sociaux, les économies budgétaires, la réforme fiscale ou l'assurance-chômage. » Alors que Martine Aubry s'affiche en « rose vif », Yves Harté (Sud-Ouest) souligne qu'il « manquait aux frondeurs du Parti socialiste un solide porte-voix. Ils l'ont enfin. »

« Maintenant la fronde, c'est elle. »

Dans sa « diatribe contre l'exécutif », la maire de Lille « cogne là où ça fait bien mal : elle veut un État stratège. Tout le contraire du spectacle donné par la gauche, gesticulant dans les rapides depuis deux ans », relève Didier Rose (Les Dernières Nouvelles d'Alsace). « Ni les écologistes entièrement décrédibilisés, ni un Mélenchon lui-même lassé de ses ronchonnements n'incarnent une contre-proposition au tournant social-libéral de Hollande. Avec Aubry, les frondeurs du PS trouvent une voix forte et crédible. »

« La vengeance de Martine », selon l'expression de Philippe Waucampt (Le Républicain Lorrain) passe par un réquisitoire « brutal dans le constat des insuffisances, frontal dans l'inventaire des atermoiements et des reniements, cruel dans le répertoire des impasses », écrit Denis Daumin (La Nouvelle République). « Maintenant la fronde, c'est elle. »

« La dureté de ses attaques montre qu'elle est convaincue de l'échec à venir de la politique incarnée par l'axe Valls-Macron », analyse Patrice Chabanet (Le Journal de la Haute-Marne). « A sa manière, elle se pose en recours, estimant sans doute qu'elle est la seule à même de ramener dans ses filets la gauche de la gauche et tous les déçus du hollandisme. » « La croisière socialiste ne va pas s'amuser car, après les frondeurs façon révoltés du Bounty, lassés par le capitaine de pédalo, voici à Lille la grande ch'timonière Martine Aubry », ironise Alain Dusart (L'Est républicain).

Au fond, « Martine Aubry ne supporte pas qu'on puisse se résoudre à laisser le champ libre en 2017 à un duel entre la droite et l'extrême droite », conclut Jean-Louis Hervois (La Charente Libre). « Elle le dit sans ambages, on peut la comprendre. »