Jérôme Kerviel, l'ancien trader de la Société Générale condamné pour avoir causé une perte de 4,9 milliards d'euros à la banque, a obtenu vendredi son placement sous bracelet électronique mais restera pour l'instant en prison, le parquet ayant fait appel.

Condamné définitivement à cinq ans d'emprisonnement dont trois ferme, Jérôme Kerviel purge sa peine depuis mi-mai à Fleury-Mérogis en région parisienne. Ses avocats avaient plaidé mardi son dossier devant un juge d'application des peines d'Evry. La décision, positive, a été officiellement rendue vendredi, mais le parquet, qui s'était opposé à la demande lors de l'audience, a immédiatement fait appel.

Cet appel suspend l'exécution de la décision du juge d'application des peines, sur laquelle la cour d'appel de Paris devra se prononcer dans un délai de deux mois. Et l'ancien trader de la Société Générale restera donc pour l'instant emprisonné.

Son avocat, David Koubbi, a exprimé « dépit et consternation » après cette décision, soulignant que son client « ne présente strictement aucun danger » et son dossier « respectait parfaitement les conditions requises ». Fustigeant une décision « dans la ligne de celles prises par le parquet depuis le début de ce dossier », il a dénoncé les « dysfonctionnements et violations répétées des droits de la défense » par l'accusation.

La défense avait appuyé sa demande sur le fait qu'une fois déduites sa détention provisoire et les remises de peines automatiques prévues par la loi, Jérôme Kerviel pourrait solliciter en juillet 2015, soit à la moitié de sa peine, une libération conditionnelle. Or, l'article 723-7 du code de procédure pénale prévoit qu'une mesure d'aménagement de peine « peut être exécutée un an avant » la mi-peine, permettant à l'ex-trader de la demander dès maintenant.

« Jusqu'à ce que la vérité l'emporte » 

Un placement sous bracelet électronique aurait permis à Jérôme Kerviel « d'aller travailler et de rentrer à son domicile le soir », avait expliqué Me Koubbi. Son client, qui a présenté « une promesse d'embauche dans une société respectable » à l'appui de sa demande, disposait également d'un appartement.

Après un périple pédestre ultra-médiatisé en Italie pendant lequel il avait fait planer le doute sur son retour en France, Jérôme Kerviel avait été interpellé à Menton (Alpes-Maritimes) le 18 mai et rapidement transféré à Fleury-Mérogis. Son combat a été « long » et « douloureux », avait souligné Me Koubbi. Il « aspire à continuer » ce combat « jusqu'à ce que la vérité l'emporte ».

La Cour de cassation avait confirmé en mars dernier la condamnation de l'ex-trader à sa peine de prison mais annulé les dommages et intérêts prononcés par la cour d'appel de Paris fin 2012, qui correspondaient à la perte déclarée par la banque, soit 4,91 milliards d'euros.

Ce volet sera rejugé devant la cour d'appel de Versailles à partir de septembre. Jérôme Kerviel et ses soutiens, dont par exemple le Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon, y voient une justification de leurs accusations de manque de contrôle et d'encouragement à la prise de risques inconsidérés, contre la Société Générale.

Par ailleurs, une information judiciaire a été ouverte à Paris pour escroquerie au jugement et faux et usage de faux, en lien avec des plaintes déposées par l'ancien opérateur de marché. Il reproche à la Société Générale d'avoir aggravé, après son départ, les pertes qui lui ont ensuite été imputées, en janvier 2008.